Marche de Paris : Et si le Cameroun s’en inspirait
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Marche de Paris : Et si le Cameroun s’en inspirait :: CAMEROON

Pourquoi le Cameroun ne se mobilise-t-il pas en solidarité aux victimes de Boko Haram dans l’Extrême-Nord ?

Martin Belinga Eboutou a marché dimanche dernier à Paris contre le terrorisme. Le directeur du Cabinet civil de la Présidence de la République représentait le chef de l’Etat à cette gigantesque manifestation en soutien aux familles des victimes du carnage qui a eu lieu le 7 janvier au siège du journal satirique français Charlie Hebdo. Une cinquantaine de chef d’Etats et de gouvernements ainsi que des hommes politiques du monde ont bravé l’hiver comme d’ordinaires syndicalistes pour dire non au terrorisme. Un gros coup diplomatique que le président français a réussi à boucler en 72h. Des images d’un oecuménisme inédit resteront pendant longtemps graver dans la mémoire collective.

On a ainsi vu dans la même manifestation et pour la même cause, l’Israélien Benjamin Netanyahu et le Palestinien Mahmoud Abbas. Avant l’apothéose de Paris, place de la République, François Hollande avait déjà reçu à l’Elysée tous les dirigeants politiques sans distinction de chapelle ou d’idéologie. Nulle n’ignore que l’actuel locataire de l’Elysée, François Hollande et son prédécesseur, Nicolas Sarkozy ne s’apprécient guère. Et que dire de Marine Lepen dont la ligne politique est aux antipodes de celle défendue par le chef de l’Etat français ? Mais puisqu’il s’agit de défendre la République, tous ont rangé leurs ego de côté pour discuter des solutions à apporter au terrorisme.

La marche de Paris et les actes politiques qui l’ont précédée, qualifiée d’historique par de nombreux analystes appelle plusieurs observations en Afrique et singulièrement au Cameroun, qui fait face en ce moment à une agression de la secte terroriste Boko Haram dont les victimes sont de loin supérieures aux 17 morts français. Qu’on se souvienne que c’est à Paris, à 6 000 km de son pays, en mai 2014 que le président Paul Biya s’en alla déclarer la guerre contre Boko Haram. Sans avoir consulté le Parlement. Car, dans une démocratie, une déclaration de guerre est un acte fort qui mérite de la part du président, au moins une adresse à la nation, si ce n’est la consultation du peuple à travers ses représentants au Parlement. Huit mois après, le Cameroun compte ses morts. Une quarantaine de soldats tués, de sources officielles et de nombreux citoyens tombés sous les balles des assaillants fanatisés.

Boko Haram

L’armée camerounaise a jusqu’ici opposé une résistance héroïque aux assaillants qui déplorent plus d’un millier de pertes dans leurs rangs. Des faits d’arme salués jusqu’à présents par le chef de l’Etat uniquement dans quelques discours classiques, notamment de fin d’année. Qui aurait trouvé de mal à ce que le président Biya se rende aux obsèques des militaires tombés au front ? Qui aurait trouvé à redire que Paul Biya aille sur le terrain dans l’Extrême-Nord pour rassurer les populations meurtries quant au soutien de la République face au drame qu’elles vivent en ce moment ?

En décembre 2014, le Parlement camerounais vote une loi sur la répression des actes de terrorisme. Le texte est violemment critiqué par de nombreux hommes politiques de l’opposition, des leaders de la société civile et autres observateurs. Sans nier la nécessité pour le Cameroun de se doter d’une loi contre le terrorisme, ils soupçonnent le pouvoir, sous ce prétexte, de caporaliser le peuple ou mieux l’enfermer dans une camisole de force sécuritaire. Or, si le président Biya avait consulté toutes les composantes politiques du Cameroun, au moins les partis politiques représentés au Parlement ainsi que les leaders de la société civile, on aurait eu une loi plus consensuelle et moins critiquée.

Le Cameroun fait face à une attaque extérieure et la guerre contre cet ennemi commun ne peut pas se faire sans l’ensemble de ses fils. Les motions de soutien seules ne suffisent pas, encore moins la séance plénière spéciale de l’Assemblée nationale pour la lutte contre Boko Haram organisée en novembre dernier à Yaoundé. Le consensus national que la France a réussi, tout en ralliant à sa cause une bonne partie des dirigeants du monde, y compris des chefs d’Etat africains, ne peut que rendre les Camerounais envieux, voire jaloux. Six chefs d’Etats africains ont marché à paris. Le Béninois Yayi Boni a même écrasé une larme pour les morts français.

Ses yeux et ceux de ses pairs sont pourtant restés étrangement secs devant les milliers de morts tombés sous les balles de Boko Haram au Nigéria et au Cameroun. Tout cela s’est passé sous le regard de Martin Belinga Eboutou, représentant du président Biya. Il faut croire que le directeur du Cabinet civile de la Présidence de la République en a pris de la graine et qu’il sera bientôt à la tête d’une marche en solidarité aux Camerounais morts et en soutien à l’armée qui défend héroïquement les frontières du pays.

© Le Jour : Jean-Bruno Tagne

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