NON, CE N’EST PAS LA SORCELLERIE
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Le ballet loufoque de ces chefs traditionnels, tous habillés par le même styliste, perdus entre le costume moderne et le respect d'une tradition qu'on leur somme d'incarner, est une pure mise en scène. Non, ce n'est pas de la sorcellerie. C'est l'héritage colonial qui se donne en spectacle. Son but ? Légitimer un pouvoir néo-colonial en parant la confusion d'oripeaux traditionnels. Les voilà, ces « majestés-professeurs-excellences-ministres », déchirés entre le protocole de leur cour et celui de l'administration qu'ils servent l’épisode du chapeau qu’enlève un chef traditionnel lui-même ministre d’Etat, devant un ministre fait débat. Cette pantomime révèle l'essence même du régime : à Yaoundé, on n'a jamais fait de politique, seulement de l'administration... coloniale.

En effet nous assistons avec cette élection à une confusion  entre la politique et l'administratif. Ce que l'on observe au palais présidentiel n'est pas du fait politique, mais une gestion administrative du pouvoir, perpétuant un modèle hérité de la période coloniale.

Sous l'administration coloniale, le gouverneur recevait les chefs locaux non comme des partenaires politiques, mais comme des sujets, dans le but unique de maintenir l'ordre et la soumission, non de développer une vision émancipatrice. Aujourd'hui, le symbole est frappant : le palais, propriété du peuple, est le théâtre de rencontres où les moyens administratifs de l'État sont mis au service d'un seul homme. Les acteurs conviés y participent avec leurs attributs tribaux, non en citoyens égaux, mais en sujets d'un système vertical.

Le candidat lui-même incarne cette absence de politique : invisible, il ne se présente pas devant ses concitoyens, ne débattre pas, ne propose ni programme ni projet. Son action se limite à signer par délégation des décrets qui organisice la vie publique, inverse les calendriers électoraux et désigne qui est acteur légitime ou non. Il gouverne par décret, un outil de l'administration, non par le débat, l'essence même de la politique.

Cette dérive est rendue possible par la capturation de l'appareil d'État. Les fonctionnaires, payés par l'argent public pour un service neutre, sont déployés pour soutenir politiquement un homme dont le pouvoir administratif leur confère pourtant carrière et poste. Cette instrumentalisation de l'administration fausse profondément le jeu démocratique.

L'épisode du sous-préfet tentant de bloquer le convoi de Bello Bouba Maigari est l'illustration parfaite de cet affrontement. Ici, l'administratif (le sous-préfet), a tenté d'obstructer la politique (la campagne de l'opposant). La réaction des populations, déplaçant sa voiture pour laisser passer le convoi, fut une leçon de souveraineté populaire : un rejet clair de cette administration abusive qui outrepasse son rôle et doit laisser place au débat politique véritable.

Cette situation démontre que l'héritage colonial au Cameroun perdure et demande encore 7 ans: un pouvoir qui ne se discute pas, un pouvoir qui s'administre et se décrète. A quand cette démocratie qui exige pourtant l'inverse : que l'administration, neutre, soit au service de la volonté politique du peuple, et non l'outil de conservation au pouvoir d'un seul.

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