Financement : Le Cameroun dans la Chine-dépendance
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Financement : Le Cameroun dans la Chine-dépendance :: CAMEROON

En une dizaine d’années, Pékin est devenu le premier pourvoyeur de fonds du pays.

À la fin juin 2019, la Caisse autonome d’amortissement (CAA) chiffrait l’encours de la dette extérieure du Cameroun à 5925 milliards de FCFA. Et la part due au seul État chinois était de 1697 milliards de FCFA, soit près de 29% de la dette extérieure totale. Le pays devait, en plus, à d’autres entreprises chinoises 181,7 milliards de FCFA (Huawei Tchenologie : 92,9 milliards; Polytechnologie : 70,4 milliards et Bank of China: 18,4 milliards). Ce qui porte les créances de l’Empire du Milieu à l’encontre du Cameroun à 1878,7 milliards de FCFA,soit près de 32% de la dette extérieure totale.

Selon les chiffres du ministère de l’Économie, de la Planification et de l’aménagement du territoire (Minepat), les interventions de la Chine au Cameroun, de 2007 à 2018, sont estimées à environ 3500 milliards de FCFA. Elles sont orientées dans les projets d’infrastructures (Routes, port, TIC, adduction d’eau, énergie solaire...). Du coût, quand Pékin ferme les robinets, beaucoup de chantiers tournent au ralenti lorsqu’ils ne sont pas à l’arrêt.

On l’a notamment observé à la suite de la décision de la banque publique chinoise Eximbank, prise en juin 2018, de suspendre les décaissements de fonds au profit du Cameroun. Quelques mois plus tard, les travaux de construction de la 2e phase du port en eau profonde de Kribi, des autoroutes Kribi-Lolabé et Yaoundé-Douala se sont arrêtés alors que ceux du projet d’adduction en eau potable de la ville de Yaoundé à partir du fleuve Sanaga ont ralenti. Arme « Cette position, la Chine l’utilise comme une arme de négociation comme le font tous les autres pays», confie un sinologue. En suspendant les décaissements et en finançant la contrepartie de l’État, elle a en effet obtenu du gouvernement camerounais, de confier à une entreprise chinoise, sans appel à concurrence, l’exploitation de l’autoroute Kribi-Lolabé à des conditions, pour l’heure, gardées secrets.

Yaoundé est d’autant plus vulnérable qu’il peine à honorer les échéances de remboursement de sa dette vis-à-vis de la Chine à cause notamment de son poids budgétaire. «En effet, le service total de la dette extérieure a atteint 380 milliards de FCFA en 2018 et devrait encore augmenter en 2019 à 471 milliards de FCFA soit 15% des recettes non-pétrolières dont 35% est dû à la Chine», fait observer le Fonds monétaire international (FMI) dans un rapport rédigé en juillet 2019.

Ces difficultés, associées aux nombreux retards enregistrés dans la réalisation des projets, ont poussé le gouvernement camerounais à solliciter auprès des autorités chinoises une restructuration de sa dette. Selon le FMI, Pékin a consenti l’annulation d’une dette sans intérêts de 35 milliards de FCFA et un rééchelonnement du service de la dette envers Eximbank Chine sur 3 ans, portant sur un montant d’un peu plus de 150 milliards de FCFA. Mais la contrepartie de cette opération reste inconnue.

« La restructuration de la dette n’est pas un repas gratuit», affirmait pourtant, à l’annonce de cette demande de restructuration en début d’année 2019, l’expert financier Roger Ngaya dans les colonnes d’Intégration. Pour le patron de Strategy, une agence de communication financière et corporate, proche des milieux chinois, «il faudra bien payer les frais de “la générosité chinoise”, soit par un accès aux matières premières pour nourrir la croissance chinoise en plein essoufflement, soit par la conclusion de nouveaux contrats avec des entreprises chinoises».

D’où l’alerte sur « le piège de la dette chinoise » dans lequel serait en train de tomber le Cameroun. Mais cet avertissement agace aussi bien Pékin que Yaoundé. « Nous n’allons pas tenir compte de ce genre de commentaires, émis par certains qui croient savoir mieux que les autres. Nous avons un pays à développer : c’est notre responsabilité et nous la prenons au sérieux», a sèchement répondu le Premier ministre camerounais, Joseph Dion Ngute, à l’agence d’informations chinoises Chine Nouvelles.

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