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© Kalara : Christophe Bobiokono
- 06 Sep 2019 10:03:00
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CAMEROUN :: Amadou Vamoulke et Abah Abah, otages du TCS et du Minfi :: CAMEROON
Le parquet général et l’avocat du ministère des Finances ont présenté pour la quatrième fois depuis octobre 2018, la copie controversée d’un procès-verbal d’enquête menée en 2009 par la police judiciaire sur la gestion de la Crtv. Un document déjà rejeté à trois reprises par les juges pour violation de la loi. Cela fait deux ans que le procès piétine.
Le 16 septembre prochain, le procès qui oppose le ministère des Finances (Minfi) et la Cameroon Radio Television (Crtv), d’une part, à M. Amadou Vamoulké, ancien directeur général de la Crtv, M. Abah Abah Polycarpe, ancien directeur des impôts, et Mme Antoinette Essomba, ancien responsable de la régie commerciale de la Crtv, d’autre part, pour détournement présumé de fonds publics, sera quasiment au même stade qu’il y a un peu plus de cinq mois. Le 1er mars 2019, en effet, le procureur général près le TCS avait présenté ses réquisitions intermédiaires dans cette affaire en concluant que le tribunal devait inviter les accusés à présenter leurs arguments de défense après avoir jugé que des charges réunies contre ces derniers étaient suffisantes.
Le représentant du parquet venait d’échouer, pour la deuxième fois, dans sa tentative de faire admettre comme pièce à conviction dans le dossier du tribunal, la copie du procès-verbal d’une enquête menée par la police judiciaire en mai 2009 sur la gestion de la Crtv. Ce 1er mars 2019 là, après un long débat entre les parties, les juges avaient en effet estimé que la copie du procès-verbal de l’enquête de police en question était «réputée, en l’état, comme n’ayant pas été certifiée en la forme régulière». Ils l’avaient par conséquent rejetée en même temps que des copies de certains chèques bancaires, elles aussi présentées par le parquet comme pièces à conviction contre les accusés. Un débat similaire autour d’une autre copie du même procès-verbal de l’enquête s’est de nouveau invité au menu de l’audience du Tribunal criminel (TCS) spécial consacrée la semaine dernière à cette même affaire après deux autres tentatives infructueuses. Présentée le 28 août dernier cette fois par l’un des avocats du ministère des Finances, la version du document a essuyé un tir nourri de la part des avocats des accusés, qui ont estimé en gros qu’il ne s’agissait que d’un faux.
C’est Me Mong, le chef de file des avocats de M. Abah Abah, qui a le premier pris la parole, pour relever que le document en question n’est pas identique à l’original. Pour avoir déjà pris connaissance de cet original dans un premier volet du procès, qui mettait aux prises cette fois-là son client et M. Gervais Mendo Ze, prédécesseur de M. Vamoulké à la direction générale de la Crtv, l’avocat a indiqué qu’il n’y retrouvait pas de trace des cotations (numérotation et classement dans le dossier de procédure) qui y avait été faites. Il va ajouter que le rapport d’enquête initial comptait 11 pages seulement tandis que le document présenté comme sa réplique parfaite en compte 48. Soit quatre fois le volume de départ... Il révèle que des pièces annexes au rapport initial, en faveur des accusés, manquaient à l’appel, notamment un document matérialisant les retraits des sommes d’argent dont le détournement est aujourd’hui reproché à M. Abah Abah.
Préoccupations sémantiques
Ces retraits d’argent avaient été opérés par Mme Obelabout Carine, fonctionnaire et responsable à la direction des impôts à l’époque des faits, a précisé l’avocat. Pour Me Mong, le document brandi par l’accusation a été confectionné pour les besoins de la cause puisqu’il n’existe qu’un seul rapport d’enquête préliminaire avant la disjonction de la procédure judiciaire, c’est-à-dire son éclatement en deux. Il a de ce fait demandé que «nouveau rapport d’enquête» soit rejeté. Position appuyée par Me Pondi Pondi, avocat de M. Amadou Vamoulke, qui va simplement ajouter que parler de copie certifiée conforme à l’original revient à dire qu’il faut présenter la réplique exacte du document original.
Cette réplique exacte est d’après lui inexistante à la lumière du code de procédure pénale. C’est le procureur général qui va apporter la réplique aux avocats de la défense, devant le silence quelque peu surprenant de Me Nchankou Njidam, avocat du ministère des Finances, qui a pourtant présenté le document en discussion au tribunal pour la seconde fois consécutive, depuis les deux premières tentatives infructueuses effectuées par le parquet lui-même. Le représentant du parquet ne partage naturellement pas les arguments déployés par ses adversaires, qui soutiennent le rejet de la pièce par les juges.
Pour l’accusation, les préoccupations de la défense sont d’ordre sémantique. Le magistrat explique que l’autorité compétente habilitée à certifier le rapport d’enquête, autorité qui a diligenté l’enquête à l’époque des faits, c’est-à-dire le directeur de la police judiciaire, a été saisie. Cette autorité a effectivement mis à la disposition du parquet général, la copie certifiée conforme du document issu de son enquête, dit l’orateur. A son entendement, il ne s’agissait pas d’aller prendre le document original adressé au juge d’instruction en son temps, en 2012, qui a fait l’objet d’attribution de numéros précis pour aller le faire certifier conforme par la police judiciaire.
Le procureur général a rappelé la démarche effectuée par le parquet pour obtenir le document, sans expliquer ce qui justifie que l’avocat du ministère des Finances présente au tribunal un document en principe reçu par le parquet lui-même, selon les explications de son représentant. Au terme de 2 heures de débats, le tribunal a refermé son registre d’audience en annonçant qu’il se prononcera le 16 septembre prochain sur la recevabilité de l’ensemble des documents présentés par Me Nchankou Njindam, avocat du ministère des Finances, pour étayer les accusations contre les trois mis en cause. C’est la quatrième fois que le tribunal fera cet exercice dans ce même procès (lire encadré), depuis le 22 octobre 2018, date au cours de laquelle le procureur général avait présenté au tribunal ce procès-verbal d’enquête de police pour la première fois.
La semaine dernière, le tribunal a quand même fait un pas de chenille dans la poursuite de l’instruction du dossier, en soumettant Mme Antoinette Essomba, troisième accusé dans ce procès, au choix de son option de défense, cette formalité légale obligatoire ayant été accomplies pour ses deux autres compagnons d’infortune lors de la dernière audience, le 26 juin 2019. Comme ses coaccusés, l’ancienne directrice de la régie publicitaire interne de la Crtv a choisi de se défendre en qualité de témoin sous serment. Elle a indiqué qu’elle n’avait pas d’autres témoins à faire auditionner dans le cadre de sa défense, mais qu’elle allait présenter des documents au tribunal pour espérer convaincre les juges de son innocence. Ce sera donc, en principe, le 16 septembre prochain.
3,9 milliards de francs
Pour comprendre l’insistance du procureur général à faire admettre le procès-verbal de la police judiciaire dans le dossier du tribunal, il faut savoir que l’accusation n’a jamais été soutenue dans ce volet de l’affaire dite «Volet 2 de la Crtv» par un quelconque témoin. La liste des témoins du parquet avait été contestée dès le démarrage du procès en juillet 2017, pour avoir été présentée hors délais, c’est-àdire plus de cinq jours après l’ouverture des débats par les juges. Ces derniers avaient pourtant ignoré le blocage des avocats de la défense, en admettant ladite liste. Le portail des camerounais de Belgique. Mais le parquet allait finalement décidé, au bout d’une année entière de discussion, de renoncer à ses propres témoins. C’est une décision qui a réduit l’épaisseur du dossier de l’accusation, toutes les expertises menées à prix d’or pendant l’instruction de l’affaire ayant été mises de côté, les expertises en question étant l’oeuvre des personnes aux qualités d’expert contestées.
Rappelons que M. Amadou Vamoulké, M. Polycarpe Abah Abah et Mme Antoinette Essomba sont poursuivis pour des faits supposés de détournement des biens publics, très souvent en coaction, pour un préjudice total estimé à environ 3,9 milliards de francs. M. Abah Abah, ancien ministre de l’Economie et des Finances a déjà été jugé et condamné dans le cadre de ce même dossier, en compagnie de M. Gervais Mendo Ze. Dans le volet de l’affaire en jugement, le procès a déjà connu vingt-et-un renvois au total. Au départ poursuivi libre, M. Vamoulké avait été jeté en prison au prétexte inexact qu’il ne justifiait plus d’un domicile connu à Yaoundé. De nombreuses organisations de la société civile camerounaises et étrangères du champ de la défense des droits de l’Homme estiment que M. Vamoulké est poursuivi de façon fantaisiste. De nombreux dirigeants de l’audiovisuel public africain et français mais aussi certains hommes politiques demandent sa remise en liberté.
Du fait de ses ennuis judiciaires et ses faits d’armes de journaliste, M. Vamoulké est considéré par Reporter Sans Frontières (RSF) comme une victime de la répression de la liberté de presse. Il fait partie des huit personnalités nominées cette année dans le monde pour recevoir l’un des trois prix attribué par la célèbre ONG aux personnalités ayant fait avancer la cause de la liberté de presse. C’est l’unique Africain nominé cette année. Le prix sera attribué le 12 septembre prochain à Berlin à l’occasion des 25 ans de la section allemande de RSF. Ce sera quatre jours avant la prochaine audience d’un procès qui marque le pas.
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