Genève : Guerre de l’information, controverses et interrogations..
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SUISSE :: Genève : Guerre de l’information, controverses et interrogations.. :: SWITZERLAND

Le journal genevois <<le temps>> vient de publier un article intitulé<< fin d’un séjour chahuté pour Paul Biya>>, au même moment certains journaux helvétiques parlent de l’embarras des autorités confédérales. Pour toute personne qui a vécu en Suisse, les termes <<chahuté>> et<< embarras>> prennent une gravité particulière lorsqu’on les situe dans la sociologie de ce pays.. Les helvètes n’aiment pas le chahut, car la suisse une société très conservatrice, bourgeoise et paisible. Et l’<<embarras>> parce que les suisses ont une conception du pouvoir très différente de la nôtre. La suisse est comme les pays scandinaves. Ce sont des pays où le pouvoir n’est pas jupitérien, il est même à la limite trop banal et proche du peuple.. La suisse est un pays où vous allez rencontrer un ministre dans un transport en commun sans garde du corps (Un spectacle qui étonne les africains), Vous le rencontrerez dans la rue entrain de se promener à pieds, Vous le rencontrerez très couramment dans le café du coin, vous allez prendre un verre et causer. Les milliardaires genevois ne sont pas différents, ils se promènent souvent à vélo. Imaginez comment raisonnent les gens qui vivent dans une telle culture. L’idée qu’un cordon de sécurité très imposant puisque bloquer la rue pour un chef d’Etat, ne fait pas parti de leurs mœurs. On peut donc imaginer devant une telle actualité, des vieilles femmes inonder le réseau téléphonique pour se plaindre. Elles adorent téléphoner parce que ça les occupe, elles adorent la délation..Mais laissons les vieilles femmes avec leurs mœurs, parlons des nôtres.

Une question nous a particulièrement préoccupés dans le séjour genevois de notre président. C’est la manière dont l’information sur les incidents qui l’ont émaillé a été gérée par les deux parties en confrontation que son le camp légitimiste et l’organisation politique radicalisée dénommée la BAS. On a vécu quelque chose qui ressemble à une guerre de l’information ou alors de la désinformation car on a davantage désinformé, qu’informé.

Depuis l’arrivée du président Biya sur les bords du lac Leman, La ville de Jean Jacques Rousseau, a été le siège de spectacles insolites sur fond de protestations, de batailles rangées, de promesses de kidnapping… A l’affrontement physique dans la rue et les halls de l’intercontinental s’est associée une autre confrontation, c’est celle qui se joue sur le terrain de la communication. Pro et anti-biya se sont rués sur la toile et les médias pour revendiquer le contrôle du terrain, le triomphe dans les rixes.

Tout commence le 25 Juin 2019 par une altercation à l’hôtel intercontinental entre la brigade anti-sardinard et les membres de la garde présidentielle.

Le film de l’évènement n’est pas parfait. On voit une scène de bagarre dans le hall du prestigieux hôtel où séjourne le chef de l’Etat Camerounais. On ne sait pas très bien qui prend le dessus dans cette bagarre assez étrange dans un lieu aussi prestigieux. Aussitôt la rixe achevée, les deux camps vont se livrer à une guerre de l’information, chacun revendiquant la victoire…Nous avons reçu sur whatsapp ce compte rendu envoyé par des personnes proches du pouvoir.  :<< 9 Gorilles contre au moins une quarantaine de gros bras…Un camp remuant et possédant des outils de casse, celui de la BAS. L’autre camp silencieux, habillé en costume noir et cravate, lunette aux yeux et bras nus. Le choc dans le chic va se produire. Le déploiement des 9 Gorilles super body-guards va se faire. Sans hésitations , ils vont aller vers les casseurs. Des coups bien placés, des frappes ciblées. Petite résistance des hussards de la BAS. Alors montée en puissance de la garde. Les coups ne vont plus être avec douceur. Luxations , brisures ,dislocation des membres du corps..Et le recul va se faire à la BAS. Les gars vont commencer à supplier, à être obéissants. La violence était si impressionnante que même les policiers suisses qui regardaient ce qui se passait, avaient peur , la frousse aux yeux>>

Au même moment la BAS publie une vidéo où nous apprenons qu’il y a eu affrontements, la BAS a pris le dessus et les blessés se trouvent plutôt du côté de la garde présidentielle.

Nous avons là deux versions contradictoires. Qui a vraiment pris le dessus ? Aucune des deux versions ne réunit tous les éléments de crédibilité.

La garde présidentielle était-elle composée de 9 personnes contre 40 comme le laisse penser le message publié par les partisans du régime ? Les membres de la BAS disent le contraire. Ils prétendent qu’ils(les anti-sardinards) étaient au nombre de 6 contre trente gorilles, et que les blessures se trouvaient dans le camp d’en face.
Nous trouvons très peu crédible que la BAS ait pu prendre le dessus dans une rixe contre des gorilles surentraînés aux techniques de combat importées d’Israël.

Encore…Encore une guerre des chiffres 

La télévision pro-gouvernementale Vision 4 a diffusé un reportable où l’on expliquait que les manifestations de Samedi n’ont pu mobiliser du côté de la BAS que 20 Personnes. Par contre, prétendait le même reportable, le mouvement des patriotes avait pu mobiliser 200 personnes.

Ces chiffres relèvent de la propagande. Plusieurs journaux suisses présents à la manifestation de samedi parlent de 250 personnes du côté de la BAS et 25 personnes du côté des soutiens du président Paul Biya. Ce sont les chiffres que la police Genevoise a communiqué aux médias.

La manifestation de Samedi a-t-elle été un échec ?

Jean jacques ZE Journaliste de vision 4 a égrené 3 arguments pour démontrer que la manifestation de samedi a été un échec. Le premier tenait selon lui au fait que la BAS n’a pas pu déloger le chef de l’Etat.

Le deuxième élément qu’il prenait en compte était le fait que les manifestants n’ont pas pu approcher l’hôtel intercontinental et le troisième était la masse.La BAS annonçait des milliers de manifestants , il n’y eu qu’une poignée.

Le premier argument avancé par jacques ze est faible. Car tout porte à croire que le souhait proclamé de déloger Biya était davantage un slogan qu’un objectif. Ce n’est pas sur ça qu’on peut juger l’évènement.

Le deuxième argument de jacques ze est partiellement défendable. Oui les manifestants auraient bien voulu approcher l’autel. Ils ont été bloqués dans leur progression par la police.

Le troisième est beaucoup plus recevable. La tribune de Genève annonçait 5000 manifestants, il n’y a eu que 250 d’après la police genevoise. Sur ce point on peut parler d’un relatif échec.

S’il faut analyser l’évènement dans son ensemble en prenant en compte plusieurs paramètres comme la capacité à occuper le terrain ou même sa médiatisation, on pourrait penser que la BAS a plutôt marqué des points car l’évènement a été largement médiatisé par la presse suisse.

Toute personne qui a vécu chez les helvètes sait que la suisse est une société très bourgeoise où on parle rarement du noir positivement. Et les noirs qui y vivent se montrent souvent distraits. Or pour une première fois toute la presse Suisse accordait une attention respectueuse à un évènement qui concerne les noirs. La tribune de Genève, le journal de l’establishment a accordé à l’évènement plusieurs articles. Pas des entrefilets comme on le ferait pour un non évènement, mais des articles qui occupaient une page entière.

L’attitude de la police suisse

L’attitude de la police suisse semble avoir divisée les différents protagonistes. Les commentateurs proches du pouvoir parlent d’une manifestation réprimée. Du côté des manifestants ont salue plutôt la maîtrise et le professionnalisme de la police helvétique situés à des années lumière de la barbarie africaine.

Pourquoi cette polémique ? Prouver que la manifestation a été brimée permet de diluer sa légitimité. Ça permet aussi de dire au peuple camerounais : Cessez de critiquer nos forces de l’ordre : Ailleurs, des personnes de ce genre ne bénéficient pas d’un meilleur traitement.

La vérité c’est que la manifestation n’a pas été brimée. Elle a été encadrée. La police helvétique a fait usage de méthodes reconnues par les démocraties. On peut d’ailleurs s’en réjouir, parce qu’on pouvait redouter de la part de la police des dérapages racistes. Rien de ce genre n’a été signalé du côté des manifestants.
Les manifestants semblent avoir eu dans l’ensemble une bonne tenue dans leurs rapports aux forces de l’ordre et au bien public. Aucune casse, aucune dégradation, aucun jet de pierre. Ceux qui ont voulu se livrer à ce genre de comportements ont été dissuadés par les autres manifestants. On ne jette pas la pierre sur la police d’une démocratie.

Le tabassage d’une militante

Ce qu’on a vu sur internet, concernant la scène dont nous allons parler, ne fait pas honneur à la BAS. Et ça c’est le moins qu’on puisse dire. C’était tout simplement méprisable, odieux, innommable, et idiot. Une foule qui fonce sur une camerounaise et menace de la lyncher au seul motif qu’elle porte sur elle une tenue où se trouve l’image du président Biya est une scène tout simplement surréaliste par l’énormité de sa bêtise. Cette dame aurait peut-être perdue la vie sans l’intervention de la police suisse. Portée à l’échelle théorique, cette scène nous rappelle tristement ce que la psychologie des foules nous enseigne depuis Gustave le Bon : Un être humain fondue dans la foule vit une diminution de son esprit critique.

Extirpée de la foule, la militante pro-Biya s’est retrouvée poursuivie sur une longue distance par une femme furieuse qui la harcelait d’injures. Au policier suisse qui essayait de la calmer, elle répondait, je ne lui ferai rien c’est ma sœur, c’est une femme comme moi. Cette scène est tout simplement consternante.

Quittons la rue, allons à la télé. Comment les médias ont commenté le tabassage de la militante patriote. Une fois de plus , nous allons suivre Vision 4.

Une autre femme s’est retrouvée au cœur de l’actualité pour avoir eu dans cet incident, un rôle un peu ambigu. Vision 4 en a fait une cible en lui imputant la responsabilité de cette agression. C’est vrai que cette femme apparaît dans certaines images comme celle qui agresse la militante patriote. Or dans d’autres images en circulation, elle apparaît comme celle qui protège la victime et prend soin d’elle. L’incontournable Ernest Obama ne s’est pas encombré de tous ces détails. Il a jeté cette dame en pâture, il a cité son nom, il a promis de donner l’adresse de son domicile à paris. On appelle cela la mise en danger de la vie d’autrui. Or une étude minutieuse des éléments disponibles aurait dû l’inciter à la réserve.

Les soldats du journalisme d’Etat 

Un débat organisé par Vision 4 le 29 juin sur les évènements de Genève nous a offert la meilleure illustration possible de ce que peut constituer un journalisme de combat porté vers la défense du système. C’est un journalisme où l’injure abonde. En retour on reçoit très peu d’informations, ou même aucune, très peu d’analyses véritables. L’injure n’est-il pas finalement, le refuge de ceux qui ne travaillent pas suffisamment leur sujet ?

Le critique était monomaniaque et radicale. Le débat tournant pour l’essentiel au procès de la BAS, les interventions non pas fait l’économie de la diatribe. La brigade anti-sardinard a été présentée comme une bande sans papiers sans nationalité. Pour Jacques ZE ce sont des mercenaires des temps modernes ayant pour seul objectif , la recherche de la survie. Leur quotidien en Europe, croit-il, serait des plus dramatique, retourner dans leur pays étant quasi impossible parce qu’ils ont tout vendu. Ce sont de véritable SDF à la dimension internationale.

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