Eric Chinje : “ Ceux qui sont aujourd’hui au pouvoir sont dépassés ”
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Ancien rédacteur-en-chef de la Crtv, mais surtout vedette de la télévision camerounaise de ses débuts, Eric Chinje a fait le tour du monde, de sa fonction à la Banque mondiale où il a posé ses valises après son départ du Cameroun en 1991, à la Banque Africaine de développement, ou à la Fondation Mo Ibrahim. Mais en tant que Camerounais et Anglophone, il s’arrête sur une question qui le concerne. Nous l’avons rencontré à Nairobi.

Que devient Eric Chinje ?
Je suis actuellement entre le Kenya et les Etats Unis. Les Etats Unis c’est la famille ; le Kenya c’est le travail, et je continue, depuis un certain temps, à gérer AMI, African Media Initiative. Je suis depuis trois ans, directeur général de AMI et je travaille avec les confrères sur les problèmes des médias sur le continent : financement, technologie, production de contenus, renforcement des capacités dans le journalisme…

Vous avez gardé votre passeport camerounais, preuve, s’il en était besoin, que vous êtes resté en contact avec le pays… Alors, comment vivezvous ce que l’on appelle « le problème anglophone au Cameroun, ces jours-ci ?
C’est une question importante de mon point de vue de Camerounais, qui est anglophone de surcroît, qui voit un pays qui doit rester un et indivisible, j’en suis convaincu. Ce n’est pas une déclaration politique, ça vient de mon for intérieur et je suis vraiment désolé de voir ce qui arrive à mon pays à cause de ce problème. Un problème qui, à mon avis, est assez simple, mais qui reste assez entier, malgré ce qui s’est fait. Bien de choses ont été faites par le gouvernement, mais la vérité, c’est que la réponse à un problème qui est, comme je l’ai dit, un problème simple, n’a pas été donnée. Et là, je suis obligé de le dire : l’anglophone au Cameroun ne s’est jamais senti Camerounais à part entière. Le Camerounais anglophone, depuis 1960, a toujours eu l’impression qu’il existe un Cameroun dans lequel il est considéré comme un citoyen de deuxième classe. Beaucoup ont expliqué cela par le fait qu’ils étaient minoritaires.

Faisant donc partie de ces 20% de populations, il n’était pas question d’exiger un certain nombre de choses… Et ils se sont donc contentés de ce statut de citoyens de seconde zone. Voyez-vous, c’est pas facile de se mettre dans la peau d’une personne, surtout qui a accepté son statut inférieur. Et surtout lorsque cette personne se lève un beau matin et se dit : « Je suis quand même un Camerounais comme tous les autres ! », la question que l’on doit se poser c’est : qu’est-ce que c’est que d’être un Camerounais de plein droit ? Et c’est cette question que les autorités ne se sont pas posée, c’est cette question que la majorité des Camerounais non plus ne se posent pas. Et c’est pour cela que je dis que c’est un problème apparemment simple, mais qui a des ramifications assez profondes. Et il faut que l’on puisse aider nos frères et soeurs anglophones et francophones à se comprendre, à résoudre ce problème et permettre à tous de s’impliquer pleinement dans les défis de développement de ce pays.  

Vous avez travaillé de longues années au Cameroun, où comme journaliste de média public, vous avez été le patron de la salle de rédaction de la télévision publique. Dites-nous, si un jour, dans l’exercice de vos fonctions, ou alors dans votre vécu de citoyen, vous avez ressenti être issu de cette «marge» dont vous parlez, de cette chape de plomb qui pèserait sur chaque citoyen anglophone dans notre pays…
Laissez-moi vous dire que du début à la fin, de mon premier jour au travail, jusqu’à mon départ en 91, je l’ai vécue, je l’ai ressentie, cette marginalisation. Mais j’avais intégré en moi quelque chose qui me disait de ne pas trop réclamer, parce que je fais partie d’une minorité… C’est même subliminal, voyezvous ? (long silence) C’est dans les esprits, voyez-vous ? J’ai eu beaucoup de chance, j’ai eu beaucoup de possibilités en tant que journaliste à l’époque, j’ai eu l’honneur de rencontrer le président de la République, j’étais parmi l’un des rares Anglophones dont on pouvait dire que tout va bien pour lui, mais la vérité c’est que, tous les jours, je sentais, et on me le rappelait, même de manière subtile ou pas, que j’étais originaire de cette partie du pays là… Certaines décisions étaient prises sans m’associer, ou quand on le faisait, je voyais bien que j’étais seul, face à d’autres, et soit je me taisais, ou lorsque j’essayais d’argumenter dans le sens d’une idée, je voyais bien que je ne pouvais pas aller droit au but… Et c’est cela, vivre avec ça quotidiennement. Je suis convaincu que même M. Yang, le Premier ministre, hors de ses habits de fonction, si vous lui posez cette question, il vous dira la même chose ! Je suis convaincu que n’importe quel Anglophone au Cameroun aujourd’hui, placé même au plus haut niveau, vous dira la même chose… C’est un sentiment que l’on a et que l’on essaye de gérer, pour ceux qui ont des postes élevés dans la République. Et pour un problème aussi profond, je crois qu’il faut une réponse bien réfléchie.  

Mais, Il n’y a pas comme cela, un peuple francophone, dressé contre un peuple anglophone…
Non, ce n’est pas de cela qu’il s’agit ! Moi, Eric Chinje, je me sens Camerounais à part entière. C’est un sentiment auquel s’ajoute beaucoup de fierté… Peut-être parce que je suis hors du système, et tout ce que je peux faire au Cameroun, c’est donner. Je n’attends rien. Et tout ce que j’ai fait, depuis mon départ, c’est essayer de donner à mon pays. Mais pour ceux qui dépendent du système en place pour leur salaire, leur vécu quotidien, leur carrière, ils vivent avec, rivé au corps, ce sentiment. Et je peux comprendre ceux qui ont envie de rejeter ce fardeau, en se sentant libres, enfin ; et qui se disent qu’ils ont le droit d’être des citoyens à part entière.

Dans les lois du Cameroun, il n’y a pas d’articles prônant une ségrégation ! Il faut des éléments tangibles à ce que vous soutenez ! Que pourraiton faire, pour parvenir à un déblocage de la situation ?
Regardez, sur une soixantaine de ministres, vous avez un seul Anglophone qui a un portefeuille réel. Et dans le Cameroun d’aujourd’hui, on accepte cela, en se résignant, en se disant : c’est un pays qui appartient aux autres, plus ou moins… Pendant très longtemps, on a accepté le fait que l’Anglophone est le « Vice » ou « l’adjoint ». A un moment donné, il y a ce plafond de verre qu’un Anglophone ne peut pas passer. Regardez l’histoire de notre pays : un Anglophone n’a jamais été ministre des Finances. Ni de l’Administration territoriale, encore moins des Affaires étrangères, de l’Armée… Même dans les grandes ambassades du monde : Paris, Washington, Londres… On n’a jamais eu un Anglophone ! (peut- être dans les années soixante…) Et pourtant ! Londres, Washington au moins, on devrait y envoyer quelqu’un qui maîtrise l’anglais ! C’est dernièrement, peut-être, avec M. Ekaney qu’on a commencé à nommer quelques-uns… Mais il ne faut pas réduire ce problème à une affaire de nominations. Quand dans les écoles, collèges de la partie anglophone on a commencé à avoir une invasion de professeurs francophones qui ne maitrisaient même pas l’anglais… Et lorsque tu te fais interpeller à Bamenda, Limbe, Buea, par un policier, en français… Et pendant des années, les gens ont pris l’habitude de se débrouiller, pour se faire comprendre en français… Face à toutes ces choses de la vie quotidienne, qui vous rabaissent, les gens se sont finalement dit : « Enough is enough ! ». Il ne faut pas que l’on balaie d’un revers de la main ce problème, en disant : « on vous a nommés à des postes ». Depuis quelque temps, on a vu que l’on a nommé quelques Anglophones, mais il ne faudra pas tout limiter à cela. Il s’agit de tout un environnement, de culture, de social. Et ceux qui ne comprennent pas doivent se poser la question : « Est-ce que j’accepte mon frère anglophone au même titre de Camerounais que moi ? » Ils seront affirmatifs s’ils ont face à eux quelqu’un qui parle français. Mais si on a quelqu’un qui ne parle que l’anglais… L’inverse, par ailleurs, est vrai ! Moi j’ai vu à Yaoundé des gens qui sont partis à la retraite, qui arrivent dans la capitale du Cameroun sans pouvoir parler un seul mot de français, et qui doivent aller de ministère en ministère pour suivre leur dossier de pension. Et cela arrive tous les jours. C’est ici qu’il faut parler de décentralisation, car il faut bien que ces gens-là aient la possibilité de régler leur problème à Nkambé, à Wum, à Kumba… Mais lorsqu’on oblige tout ce monde-là à venir à Yaoundé, cela ne fait qu’exacerber le problème. Et c’est là où ces enfants-là ont dit non. Ils ne veulent plus se retrouver dans cette situation où ils sont comme des citoyens de seconde zone, il faut qu’on règle le problème. Ce n’est pas avec une couche de peinture que l’on va cacher les fissures d’un mur qui s’est cassé.  

Vous êtes l’exemple même du Camerounais multiple… Vous êtes né en zone anglophone, mais vous avez, par les études, la culture et le métier, acquis une pratique du français et des Francophones qui fait de vous quelqu’un qui pourrait servir de pont. Parce que, chez les Francophones comme chez les Anglophones, vous êtes connu et respecté. Si vous aviez un message à délivrer aux autorités et aux tenants de la fronde anglophone, que leur diriez-vous ?
Je l’ai déjà fait, depuis que dure cette crise. Je crois au Cameroun, un et indivisible. Non pas seulement parce que les hommes politiques en ont fait un slogan, je le crois et je le ressens. Parce que je le ressens par ma famille : mon grandpère, ma famille est divisée en francophones et anglophones. J’ai des oncles, des tantes, des cousins, des frères, des soeurs, qui sont francophones. Et mes enfants : ils ont les deux cultures. Mais je dis une chose : je suis né anglophone au Cameroun, et je le ressens à ce jourci. C’est cela le problème. Je ne veux plus ressentir cela. Et les anglophones ne veulent plus ressentir cela. Comment donc évoluer vers une société normale où tout le monde peut se concentrer enfin sur l’avancée du pays ? Comment arriver à ce stade-là, où tout le monde pourrait se sentir chez lui au Cameroun ? C’est pour pouvoir servir de pont que je dis ces vérités, car j’aurais pu moi aussi jouer le jeu, comme certaines personnes le font au pays, pour préserver leur place. Je parle en toute franchise, sans blesser qui que ce soit, j’invite tous les Camerounais à chercher à comprendre ce qui se passe. Car je suis convaincu que, pour une bonne fraction des Anglophones, il n’y a pas de marche en arrière. Ils ne veulent plus se sentir moins que d’autres Camerounais. Même de très vieux amis, avec qui j’avais des certitudes, aujourd’hui, me tiennent un discours sans fard, ils sont sur une démarche vers une « libération de soi ». Je me suis posé des questions : si ce n’est pas au travers de nominations, quelle est donc la solution au problème ? Pour moi, il faut un véritable dialogue, qui commence avec le chef de l’Etat, la personne qui incarne le système au Cameroun. Le président Biya doit rentrer dans le jeu et ne plus se cacher. Il est temps qu’il invite les Anglophones, ceux qui peuvent lui dire la vérité, que l’on recherche des solutions, non pas politiciennes ou administratives. Les gens ont besoin de sentir que l’on a ouvert les portes et qu’on les embrasse. Qu’on les invite à rentrer dans la maison camerounaise, et qu’ils y prennent leur place, pas dans les antichambres. Parce qu’ils se sont toujours sentis dehors. C’est pour revenir à cette question de la reconnaissance du mérite, etc. S’il y a une délégation qui doit représenter le Cameroun quelque part, et si c’est un Anglophone qui doit la conduire, sur la base de son mérite, que ce soit le cas. Si c’est un Anglophone qui doit nous représenter aux Nations-unies, en France, qu’il soit désigné. Mais tu ne verras jamais un ambassadeur du Cameroun en France, anglophone… Jamais!

Vous avez évoqué l’entrée du chef de l’Etat dans le jeu. Quel est le rôle que prendrait Paul Biya dans ce jeu ?
Lorsqu’il y a un problème grave dans une famille, tant que le père de famille ne s’exprime pas, ne s’est pas engagé, ce sont les autres qui vont convaincre les frondeurs de revenir ? Rien ne peut se débloquer. Il y a eu une liste de 22 actions concrètes qui ont été faites, m’a-t-on dit… Lorsque j’en ai parlé avec des amis dans la diaspora, ils ont répondu : « C’est du papier ! On peut revenir dessus du jour au lendemain ». Lorsque les gens parlent de papier, ils ont vu comment avec des décrets, le Cameroun est passé de « République » à « République fédérale », puis à « République unie », avant de redevenir « République »… On a fait le tour ! En 1984, lorsque le président Biya signe le décret proclamant la « République », eh bien on y voit le retour à une république unilingue, francophone, comme ce qui existait en 1960... Lorsque vous voyez des parents accepter de laisser leurs enfants à la maison, une année, et ne reculent pas devant la possibilité d’une deuxième année, il faut y voir l’expression d’un sacrifice pour atteindre un objectif. Cela me fait mal! Moi j’ai essayé de dire aux parents d’envoyer tout de même les enfants à l’école. Ils nous disent : « Nous les avons gardés à la maison pour un an. On va les y renvoyer alors que rien n’a changé ? Ils vont étudier pour rester des citoyens de deuxième zone, ça ne sert à rien… » On va finir par décentraliser, peu importe comment on appelle cela, une fédération… il faudra permettre aux gens de trouver des solutions locales à leurs problèmes. Comment lancer ce dialogue ? Comment amener les gens à s’intéresser à ce dialogue aujourd’hui ? Puisque la réaction de l’Etat, c’était de tabasser les gens, de les arrêter, de les contraindre à l’exil, et ce sont ceux-là qui crient haut et fort que l’Anglophone au Cameroun n’a pas sa place… Ces personnes n’ont plus accès à leur famille, à leur mode de vie, à rien… Ils ne sont pas au pays, ils sont dehors. Si aujourd’hui, le président de la République se levait et disait : « Je vous ai compris, revenez à la maison, qu’on essaie de voir comment se réorganiser… » S’il y a une action comme celle à prendre, c’est pas au P.M, c’est pas au président du Sénat de l’engager. Que le président n’écoute pas seulement ceux qui l’entourent… Moi, Eric Chinje, je suis incapable, à ce jour, de parler à mes frères anglophones d’un Cameroun uni et indivisible. J’ai essayé et je me suis fait insulter, copieusement ! Aux Etats- Unis, en Allemagne et même au Cameroun, les gens ne veulent plus entendre cela. Tant que le problème perdure, le nombre de ceux qui ne veulent rien entendre ne va qu’augmenter.

Lorsqu’on résume les revendications anglophones, il y a en filigrane deux constantes : les questions liées à la gouvernance et, disons, au système politique, à l’avenir politique même du Cameroun. Et là on ne peut pas circonscrire ces problèmes à la partie anglophone, on peut les généraliser au pays tout entier…
Mais la question dite anglophone s’insère au coeur même de nos problèmes de gouvernance au Cameroun. En fait, c’est de cela qu’il s’agit, car si on avait décentralisé comme le prévoyaient les textes, ce problème ne serait jamais arrivé. Si on n’avait pas ce système centralisé à la présidence de la République, si on avait des gouverneurs capables de prendre des décisions, des responsables politiques capables d’agir et de poser des actions, nous n’en serions pas à demander l’intervention du président de la République. Nous le faisons tout simplement parce que nous savons que rien ne peut se passer au Cameroun sans l’aval du président de la République. Et nous touchons là le fond du problème. C’est cela, le système de gouvernance de notre pays. J’ai eu à dire qu’il est temps que le président de la République, qui a beaucoup travaillé pour le pays, qui a un certain âge, qui est fatigué, qu’il est temps, qu’il passe le témoin. Il est temps qu’on ait de nouvelles idées. Il y a beaucoup qui vont se fâcher, qui vont me condamner pour ce que j’ai dit. Il y en a même qui vont me créer des problèmes, mais je le fais parce que, dans une démocratie, c’est la parole franche qui fait avancer les choses. C’est cela qui permet aux pays de générer des idées qui peuvent permettre de résoudre un problème. Nous avons la possibilité, étant donné nos ressources, humaines, naturelles, d’être un pays phare en Afrique. Ce bilinguisme est un atout que j’apprécie lorsque je vais dans les pays du monde, où je trouve des Camerounais dans des positions importantes : Aujourd’hui, l’économiste en chef de la Banque Africaine de développement est un Camerounais (Célestin Monga, Ndlr). L’économiste en chef de la Banque Mondiale, pour l’Afrique est un Camerounais (Albert Zeufack, Ndlr). Le secrétaire exécutif de la CEEAC est une camerounaise… Voilà des postes-clés lorsqu’on parle de développement en Afrique aujourd’hui. Ce sont des positions, toutes occupées par des Camerounais. La personne qui a joué un rôle clé dans la transformation des télécoms en Angleterre, M. Nwana, c’est un Camerounais. Allons aux Etats-Unis, en France… même dans le domaine du journalisme, en France, quelles sont les têtes d’affiche en dehors des Français ? Encore des Camerounais… Nous avons donc tout pour transformer notre pays, le transformer en un endroit où les gens ont à manger tous les jours, leur permettre d’avoir de la fierté et de rayonner, aussi bien en Afrique que dans le monde. Donnons-nous la possibilité de le faire, libérons l’espace politique, sortons de nos faux et problèmes : problème des Nordistes, problème des Anglophones… Nous devons dépasser ces problèmeslà. Donc, je le dis, ceux qui sont au pouvoir aujourd’hui ont fait beaucoup de travail, mais ils sont dépassés : la technologie, tout va trop vite dans le monde d’aujourd’hui. Du président de la République, à celui du Sénat, de l’Assemblée nationale, il faut que tous ces gens nous aident à changer le pays, pour le bien de tout le monde, y compris eux et leurs enfants et petits-enfants. On ne peut pas continuer comme cela : de vieilles idées dans un monde qui bouge à une vitesse extraordinaire, il faut vraiment que ça change ! Je le dis pour aider mon pays…  

Quel est le rôle qu’Eric Chinje veut jouer dans ce contexte ?
J’ai une expérience assez large, je peux aider à réfléchir. J’ai dépassé 60 ans, donc je ne suis plus là… Je ne peux plus jouer un rôle de premier plan, c’est pas à moi de le faire. Mais, je peux aider les jeunes qui doivent aujourd’hui s’impliquer, qui doivent aujourd’hui diriger le pays. J’ai conseillé les présidents du Liberia, du Soudan du Sud, de RDC, de l’île Maurice. Donc, j’ai une expérience assez vaste qui peut aider le pays. Le problème c’est que dès que vous commencez à parler, on dit au Cameroun : « Celui-là veut être ministre, il veut faire la politique ». J’aimerais que mes enfants qui sont nés aux Etats- Unis reviennent au Cameroun avec fierté. J’essaye de les amener, de les guider vers le Cameroun. Je suis fier de mon pays et je n’ai jamais changé de passeport, j’aurais pu avoir un passeport américain, italien, si je voulais… Que personne ne vienne me dire que je parle parce que je vis aux Etats-Unis. Je reviens au Cameroun chaque année. Au village, j’ai créé un établissement de microfinance pour aider les villageois. J’ai amené des Noirs Américains au Cameroun, parce qu’ils avaient retrouvé leurs racines chez nous… Tout cela pour faire rayonner le Cameroun ! On n’a pas continué ce mouvement de retour des Noirs Américains parce qu’on nous a cassés au Cameroun, malgré le soutien du président de la République. Nous avons apporté au Cameroun le Monument de l’humanité, un projet qui devrait aller ailleurs. Les Ark Jammers ont tout fait, le Premier ministre s’est battu, mais, malheureusement, on a tout de même réussi à nous casser ! On continue à espérer que ce projet va se réaliser au Cameroun et non pas au Ghana ou en Ethiopie, car ces pays se battaient pour ! Je rappelle tout cela pour souligner que nous ne sommes pas hors du pays parce qu’on l’abandonne ; on continue à se battre pour lui.

Comment jugez-vous l’attitude de l’élite anglophone, depuis qu’a éclaté cette crise ?
L’élite anglophone est consciente de la nécessité de survivre, mais aussi de s’affirmer dans la société. Mais si on discute avec eux, en toute franchise, ils diront la vérité. Mais j’insiste : en très peu de temps, s’il y a la volonté politique, ce problème peut trouver une solution. Libérez Agbor Bala, Fontem et les autres… Que font-ils en prison ? On doit se dépasser, prendre de la hauteur. Il faut se mettre à la place des autres, comprendre leur problème et se dire que c’est l’intérêt supérieur de l’Etat qui compte. Je tiens à souligner, au-delà de tout, que la clé de tout ce problème est détenue par le président de la République. C’est que le problème anglophone, c’est aussi le problème camerounais. Il y a des choses que le président Biya doit faire avant de quitter le pouvoir : il doit décentraliser ; et puis rentrer dans un dialogue vrai avec les Camerounais, rectifier les erreurs de la constitution camerounaise d’aujourd’hui. Il n’y a pas de raison qu’il continue à y avoir des mandats présidentiels sans limites. Il faut que le pouvoir soit décentralisé. Je tiens à lancer cet appel : M. Le président, pensez au Cameroun de demain et faites le nécessaire !

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