La pratique de la terreur au nom de la démocratie, de Fodjo Kadjo Abo
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Démocratie : gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple ; "Power to the people": le pouvoir au peuple. Choisir et déchoir ses « rois », ses dirigeants, sans armes ni effusion de sang, le concept de démocratie a fait rêver bien des peuples depuis l'antiquité gréco-romaine. Le rêve était trop beau.

Dans la réalité, la pratique de la démocratie a été dévoyée, elle n'a plus grand chose à voir avec la théorie, si ce n'est qu'on s'en sert comme un magistrat corrompu se servirait de la Loi pour mieux la violer, aussi paradoxal que cela puisse paraître. Pierre Daninos l'a si bien dit : « Puisque le peuple est roi, il faut le lui faire croire » (cité dans Opération Obama d'Eric Mendi). L'homme politique est par nature roublard et rusé. Le peuple, qui croit tenir les ficelles, est en fait « marionettisé », souvent malmené et même brutalisé.

On en arrive parfois à dénombrer plus de cas de violence dans une république dite démocratique que dans régime déclaré autoritaire. Montesquieu avait raison d'écrire : « Les hommes sont tous égaux dans le gouvernement républicain ; ils sont égaux dans le gouvernement despotique : dans le premier, c’est parce qu’ils sont tout ; dans le second, c’est parce qu’ils ne sont rien. » La démocratie qui a priori devrait contribuer à affermir la paix et la sérénité dans une nation est aujourd'hui la source de tous les maux, de conflits en tous genres, de terrorisme, de terreur. TERREUR. Le mot fait peur. La pratique de la terreur au nom de la démocratie, tel est l'intitulé du livre qui nous a inspiré le présent article. C'est un ouvrage de l'écrivain ivoirien Fodjo Kadjo Abo.

La Côte d'Ivoire, faut-il le rappeler, a été le théâtre d'événements malheureux engendrés par la mésentente des hommes (politiques). Des conflits et massacres souvent perpétrés au nom de la démocratie qui ont poussé à la réflexion l'auteur et magistrat ivoirien Fodjo Kadjo Abo. Le cas de son pays n'est pas unique.

Depuis l'avènement du multipartisme en Afrique dans les années 90, la bouillante démocratie n'a pas fait couler que de l'encre et de la salive, mais aussi du sang. De part et d'autre, régime au pouvoir et opposition, on a occasionné ou fomenté des émeutes et des tueries... au nom de la sacro-sainte démocratie. Des journalistes, des intellectuels et autres harangueurs, doux rêveurs de la liberté d'expression ou simplement des ambitieux en quête de positionnement, se sont heurtés à la malice de l'autre camp, emprisonnés, molestés, trucidés ou victimes de harcèlements les plus dissuasifs.

« La démocratie a le dos large », écrit Fodjo Kadjo Abo dans son livre. Avec la course aux libertés démocratiques dans le monde, les grandes puissances impérialistes ont trouvé un prétexte en or pour continuer d'asseoir leur hégémonie dans les anciennes colonies. C’est ce que l'auteur appelle « La promotion de la démocratie érigée en fondement de l'impérialisme ». Pareillement, tout comme les prédicateurs véreux opérant avec la Sainte Bible, les agitateurs et autres opportunistes ont désormais leur fonds de commerce... la lutte pour la défense des libertés démocratiques. Voici quelques passages à méditer, tirés du livre de Fodjo Kadjo Abo : « Nombreux sont les guides politiques africains qui ont obtenu ou doivent leur statut de promoteur des droits de l'homme et leur popularité à leur expertise en matière d'organisation de manifestations apocalyptiques. » ; « Manifestement, commis dans un but politique, les actes de terreur qui illustrent les manifestations en Afrique ne peuvent que relever du terrorisme au sens plein du mot. En toute objectivité, quelle différence notable peut-on faire entre la destruction au moyen de substances explosives, des locaux d'un parlement, causée par des islamistes exigeant le report d'un scrutin et l'incendie, à l'aide de produits inflammables, d'un palais de justice provoqué par des militants d'un parti s'opposant à la tenue d'une élection ? » ; « Dans la gestion des crises tout porte à croire que les sanctions internationales sont pour de grandes puissances des moyens de dompter ou d'anéantir les autorités des États qui leur sont hostiles ou, en tout cas, qui n'ont pas leur faveur. » ; « La politique est l'ensemble des activités qui concourent à la gestion d'un pays. Par la force des choses, elle est devenue dans la plupart des jeunes nations, un moyen de satisfaire des ambitions personnelles. Il en résulte des chocs d'ambitions, hélas trop souvent à l'origine de violences permanentes qui font souffrir de braves populations ».

Tout est dit... dans l'œuvre de l'écrivain ivoirien. Démocratie, démocratie, nous n'avons que ce mot à la bouche. S'il est tout à fait légitime pour un peuple d'aspirer aux libertés démocratiques, tous les moyens sont-ils bons pour y arriver (y compris la terreur et le terrorisme) ? Fodjo Kadjo Abo s'interroge et nous interroge, car quand il parle de lui il parle de nous ; quand il parle de la Côte d'Ivoire il parle du Cameroun, il parle de notre Afrique.

Fodjo Kadjo Abo est aussi l'auteur de « Que ne ferait-on pas pour du pognon », finaliste dans la catégorie Recherche aux GPAL 2015 (Grands Prix des Associations Littéraires).

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