UNION AFRICAINE : Kamto dos au mur
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Depuis quelques jours, dans les réseaux sociaux, les thuriféraires du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) agitent une communication qu’ils disent avoir été délivrée par la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (Cadhp). Quelques curiosités l’entourent. Repères a enquêté.

La propension du MRC à brandir des documents falsifiés (cf. communiqué du Parlement européen) pousse à observer du recul chaque fois. Cette fois-ci encore, un vent d’entourloupe et de manipulation souffle audessus de la communication 718/19 de la Cadhp sur sa saisine par Maurice Kamto et le MRC. En effet, depuis la publication de ce document dans les réseaux sociaux, Repères mène l’enquête sur son authenticité. D’abord par la comparaison des documents émis par la Cadhp. A ce niveau, et à l’observation, la signature de Dr. Mary Maboreke sur la communication 718/19 ne correspond nullement à celles des autres documents que nous avons pu télécharger. Dont les plus récentes sont les invitations aux participants (ONG, institutions nationales des droits de l’homme et représentants des Etats-membres) à la 64ème session ordinaire [de la commission].

Par ailleurs, aucune communication n’est cosignée de la présidente de la commission et de sa secrétaire. « A vouloir trop montrer patte blanche, on finit par la noircir », ironise un juriste spécialisé dans le droit administratif et habitué des procédures administratives tant de l’Union africaine (UA) que de ses organes. En parcourant la section 4 du règlement intérieur de la Cadhp qui traite de l’« examen des [autres] communications reçues conformément à l'Article 55 de la Charte africaine », l’on note que c’est le/la secrétaire qui est la cheville ouvrière de la commission : c’est la porte d’entrée, de transit et de sortie de l’instance. « Dans nos procédures, c’est elle qui reçoit, transmet et oriente les dossiers. C’est la même qui saisit les parties pour rendre compte du niveau d’examen des procédures », souffle une source à la commission.

A l’UA justement, toutes les sources contactées depuis la publication du document sont formelles : « Nous ne sommes pas au courant d’une pareille procédure et certains indices de ce document nous font émettre des doutes sur son existence réelle ». Le même recul anime nos sources au sein de la Cour africaine de la justice et des droits de l’homme destinataire, selon le règlement intérieur de la Cadhp, de certaines de ses procédures après examen des arguments des parties. Camer.be. Par ailleurs, alors que le règlement intérieur indique le secrétaire prépare l’ordre du jour en incluant l’examen de toutes les communications et plaintes, l’agenda de la session ordinaire tenue à Sharm El Sheikh en Egypte du 24 avril au 14 mai 2019 ne mentionne nulle part que ce fut le cas pour la plainte de Maurice Kamto.

Bien plus, dans son discours d’ouverture, la présidente de la Cadhp, l’Honorable Commissaire Soyata Maiga n’évoque pas le Cameroun comme un cas isolé en Afrique : « La Commission africaine reste particulièrement préoccupée par la détérioration généralisée de la situation sécuritaire et des droits de l’homme au Burkina Faso, au Cameroun, au Niger et en Somalie, les attaques terroristes au Kenya; les affrontements intercommunautaires dans les localités de Yumbi au nord-ouest de la RDC, les répressions excessives et l’usage de la force létale par les forces de l’ordre ayant occasionné des décès parmi les manifestants, les arrestations et les détentions de plusieurs personnalités de l'opposition et des représentants de la société civile notamment au Cameroun et au Soudan».

INTROUVABLE

Au-delà de la comparaison des documents, c’est l’absence de cette communication 719/18 sur le site de la Cadhp qui intrigue. Des jours, et des nuits, de recherches en employant toutes les méthodes n’ont pas permis de la retrouver. Nous nous sommes alors tournés vers le MRC. D’abord en approchant quelques militants et sympathisants. Ne parvenant pas à joindre des responsables de ce parti, nous avons contacté Jean Claude Fogno de l’ONG Mandela Center International, réputé proche du parti de Maurice Kamto. Qui indique que « la procédure est confidentielle selon le règlement intérieur ». L'info claire et nette. Nous avons ensuite contacté Me Emmanuel Simh, l’un des vice-présidents et avocats du MRC. A qui nous avons demandé une copie de la plainte qui fonde cette procédure. Dans un premier temps, il nous demande de le recontacter demain. Devant notre insistance et le fait que nous commettons cet article pour ce jour, Me Simh nous promet : « Je vais donc essayer de voir dans mon phone ». Jusqu’à ce que nous allions sous presse aux environs de 20 heures, plus de trois heures après cette promesse, nous n’avions pas encore reçu la plainte.

CAMOUFLET

Selon les caudataires du MRC, la Cadhp, entre autres, « se saisit de la présente communication ; invite les plaignants à présenter « ses » (au lieu de « leurs ») preuves et arguments sur la recevabilité dans un délai de deux (2) mois conformément à l’article 105 (1) de son Règlement intérieur ; décide de renvoyer [sur ?] sa décision à la Cour à une session ultérieure ». Pour les juristes que nous avons approchés, « il n’y a pas de quoi faire du bruit du moment que nous sommes dans une phase normale de toute procédure. Celle qui consiste à informer le plaignant que l’instance en charge a pris connaissance de sa plainte et l’Etat défendeur d’une accusation portée contre lui tout en lui en transmettant une copie pour sa défense ».

Mais en réalité, le MRC a échoué où il s’attendait le moins en décidant de « ne pas octroyer des mesures conservatoires en vue de la cessation des violations commises sur les militants et les responsables du MRC […] et la libération pure et simple des personnes (militants, responsables du MRC, journalistes et membres de la société civile) arrêtées, jugées ou condamnées en raison de leur participation aux activités de contestation pacifique des résultats de l’élection présidentielle du 7 octobre 2018». A ce camouflet s’ajoute un autre qui consiste au refus de la Cadhp de se plier à la volonté du MRC de voir les instances internationales exiger du Cameroun le recomptage des voix. Et à propos des voix justement, l’on se demande toujours pourquoi les médias qui relaient généralement et promptement les actions du MRC observent un silence assourdissant autour de cette affaire. Seuls quelques sites camerounais se sont activés autour de cette publication. En attendant ce lundi 3 juin 2019.

Enfin, selon la Cadhp, « les recommandations de cette institution aux Etats n’ont pas une valeur juridique. Les Etats ne sont pas obligés de les mettre en oeuvre. Toutefois, le secrétaire de la commission peut relancer un Etat sur l’exécution d’une recommandation sans être sûre que sa relance soit mise en oeuvre ».

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