Retour de 04 ex-combattants de Boko Haram
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Le 20 octobre 2017, Baba Oumaté, Bana Yérima, Modou Alhadji Abba et Abba Oumaté, quatre ex-combattants de Boko Haram - selon leurs déclarations - et originaires de Tolkomari, ont décidé de tourner la page du terrorisme et de regagner leur village. Ils ont été «réceptionnés» par des membres du comité de vigilance qui à leur tour, les ont remis aux forces de défense et de sécurité.

Après avoir été auditionnés, les quatre ex-combattants ont été remis en liberté. «Ce sont eux qui, volontairement, ont fait appel à nous, en précisant qu’ils venaient dans un esprit de paix. Nous sommes allés vers eux, dans leur refuge, et avons dialogué avec eux. Par la suite, nous les avons conduits à la brigade de gendarmerie puis à la compagnie de gendarmerie de Mora où ils ont été tour à tour été entendus. C’est là qu’il a été décidé de leur retour au village et autorisés à rejoindre leurs domiciles pour ceux qui en disposaient avant d’être enrôlés dans la secte. D’autres ont rejoint le domicile parental», explique Tchamaya Matthé, président du comité de vigilance de Tolkomari.

Aussi, le  guide spirituel et religieux de Tolkomari, Mal Goni, les a fait jurer sur le Coran qu’ils ne devront plus jamais collaborer avec Boko Haram. Selon les ex-combattants qui ont rejoint la secte en 2014, d’abord comme otages puis comme combattants, la réaction de la population à leur endroit était la chose la plus redoutée au moment de passer à l’acte. Durant deux jours, dans leur refuge, ils ont retourné la question dans tous les sens jusqu’à se décider finalement le 20 octobre quant aux environs de 13 heures, ils ont alors dépêché une femme auprès du chef du village, le lawan Voundou. Ce dernier s’est rapproché du président du comité de vigilance et de la gendarmerie locale.

«Vous savez, à la seule écoute du mot Boko Haram on panique  puisqu’ils sont dangereux. Aussitôt que nous avons eu l’information, nous nous sommes mobilisés pour l’intervention bien qu’il nous a été dit qu’ils sollicitaient notre aide. Cette secte nous a traumatisés au point où il nous est difficile de leur faire confiance. C’est comme ça que nous avons pris des dispositions pour nous défendre au cas où. Mais sur place, nous les avons trouvés extrêmement coopératifs. Ce sont des enfants du village connus de tous», explique Tchamaya Matthé, président du comité de vigilance de Tolkomari.

MÉFIANCE

Toutefois, le moins que l’on puisse dire est que les ex-combattants n’ont pas été accueillis avec enthousiasme par la population qui leur reproche d’avoir participé à un certain nombre d’attaques dans leur propre village. Ce que les ex-membres de Boko Haram ne nient pas au demeurant, se réfugiant derrière le pardon. «Ce ne sont plus des êtres normaux. Ils nous ont traumatisés, ont exécuté nous frères et soeurs et aujourd’hui on nous demande de cohabiter avec eux. Je crois que le gouvernement n’a pas bien réfléchi à ce niveau. Il y a moins de deux ans, une fille qui a été enlevée par Boko Haram était revenue comme ça, a été accueillie à bras ouverts par ses parents et une fête avait même été organisée.

Après, cela s’est mal passé, elle a égorgé et bu le sang de sa petite soeur dont la garde lui avait été confiée par ses parents qui étaient au champ. Aujourd’hui, on nous demande de vivre comme si de rien était avec nos anciens bourreaux ? Ils ont juré, c’est vrai, mais cela ne nous convainc pas. On aurait dû les caser ailleurs, loin de nous ou les garder quelque part pendant un temps pour mieux les connaitre avant de les relâcher parmi nous», confie Modou Brahim, habitant de Tolkomari.

Alors que la guerre est loin d’être terminée, la réinsertion des ex-combattants de Boko Haram est un nouveau caillou dans la chaussure du gouvernement. Entre la nécessaire obligation de fournir des garanties aux ex-combattants afin qu’ils regagnent la mère patrie et les craintes de la population, un travail de sensibilisation est plus qu’urgent.

«Nous n’avons pas la culture du pardon. La mémoire est si forte chez nous que même si vous vous repentissiez 100 fois, il n’y aura personne pour vous croire sincèrement. Le gouvernement doit mener une campagne d’envergure pour que s’ouvre partout dans le pays, les portes du pardon. C’est le seul gage pour que les égarés déposent les armes et réintègrent la société, autrement ils devront se battre jusqu’à la mort. Il faut aussi préciser que le gouvernement doit fixer un calendrier, pour que les défections enregistrées dans cette période soient considérées comme volontaires », explique Jacob Moussa, un habitant de Kolofata.

Il y a quelques jours, un autre ex-combattant s’était déjà rendu à Bia. De l’accueil des autorités - jusqu’ici sans politique claire sur le sujet - et des populations dépendra certainement le rythme de désertions dans les rangs de la secte terroriste. Une équation que le Cameroun ne saurait résoudre sans s’inspirer des expériences qui ont donné ailleurs de bons résultats.

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