Cameroun: Dr Vincent Sosthène Fouda "Je n'accepte pas de vivre sans liberté de parole, je n'accepte pas d'être condamner au silence lorsque l'honneur de ceux que je défends est en jeu"
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Cameroun: Dr Vincent Sosthène Fouda "Je n'accepte pas de vivre sans liberté de parole, je n'accepte pas d'être condamner au silence lorsque l'honneur de ceux que je défends est en jeu" :: CAMEROON

J'ai attiré l'attention des autorités camerounaises sur la crise dite anglophone et il m'a été répondu qu'il n'y a pas de problème anglophone au Cameroun. En février dernier, sur invitation du département de philosophie de l’École Normale de Yaoundé, j'ai donné une conférence et proposé de nombreuses pistes de réflexion qui malheureusement tardent à être suivies par le système gouvernant. Que faisons nous face aux terroristes avec des armes lourdes et des politicien au discours démagogues avec des micros ? [...]

Nous apprenons avec tristesse la mort de votre mère. qui était elle ? sa mort survient à votre absence. Où êtes-vous en ce moment quand reviendrez vous et quand auront lieu les obsèques

Madame Essomba Sabine, épouse de mon feu père Hyacinthe Stanislas Essomba s'est éteinte comme une lampe qui n'a plus d'huile le 18 août 2017 dans son domicile de Yaoundé après avoir reçu les derniers sacrements suivant ses dernières volontés. Elle a eu une vie pleine donnant à la République une dizaine d'enfants donc 8 filles et deux garçons. Elle laisse une trentaine de petits enfants et cinq arrières-petits enfants. Je suis le dernier de ses fruits, Princesse Mvog Ada dans la famille Ondoa-Ada Essomba-Many Ewondo, Etenga Mvog Bassogo c'est à dire un mélange de Bamun et de Tikar nièce du grand chef Kaatou Ndengué de Ngoro dans le grand département du Mbam. Mariée chez les Ewondo, elle nous a éduqué dans cet esprit et dans cette réalité du métissage qui constitue finalement le socle de notre pays. En avril 2007, elle a été faites citoyenne d'honneur de la ville de Québec au Canada car le premier ministre Jean Charest voyait en elle, ce que fût le Canada d'avant la « Révolution Tranquille » avec des familles nombreuses.

Elle est décédée alors que j'étais en vacances dans ma belle famille dans le Nord de la France avec mes enfants. Je viens d’arriver au Cameroun. Comme chef de famille j'ai le devoir de conduire ses obsèques. Elle sera inhumée selon ses dernières volontés le 30 septembre avant le coucher du soleil en présence de tous ses enfants, ses petits enfants et arrières-petits enfants.

Une rumeur circule, vous imputant les événements du Canada ou le drapeau camerounais a été brûlé. Que répondez vous à cela.

Les événements survenus au Canada et dans bien d'autres représentations diplomatiques de notre pays, en Europe, en Amérique du Nord comme en Afrique du Sud sont déplorables et questionnent notre vivre ensemble. Mais une fois que nous avons déploré ces événements, pouvons nous nous poser deux ou trois questions ?

La république telle qu'elle est aujourd'hui est-elle la réponse à toutes nos questions et à tous nos problèmes ?

- Une république nationale est-elle encore possible ?

- Est-il possible de construire une république qui soit à la fois l'unité et la multiplicité.

Pour le cas de ma personne, le Cameroun dispose auprès de chacune de ses représentations diplomatiques des attachés militaires et possiblement de services de renseignement. Je suis un acteur politique et dans la vie de tous les jours je dispense des enseignements et fait des recherches. Je ne suis donc ni militaire ni activiste.

On parle de votre possible arrestation ou interpellation à votre retour qu'est ce qui d’après vous favorise une telle rumeur ?

Je suis un fils de la ville de Yaoundé, je suis né pas loin de l'actuel Palais de l'Unité, les Allemands ont pendu mon arrière-grand-père à l'emplacement actuel de la Cour Suprême alors c'est une grâce si l'histoire se répète plus d'un siècle après ! Nous ne pouvons pas aller très loin avec les rumeurs. Ceux qui ont peur de ma parole qui empêcherait certains de continuer à torpiller le pays, ont lancé cette campagne dans un espace public où l'on voudrait que je boxe les deux mains liées. Je n'accepte pas de vivre sans liberté de parole, je n'accepte pas d'être condamner au silence lorsque l'honneur de ceux que je défends est en jeu. Ils veulent nous détourner du vrai combat qui est aujourd'hui de sauver l'unité nationale et de redonner à la justice de notre pays ses lettres de noblesse après l'assassinat de Jean-Marie Benoît Bala. La dénonciation sans s'appuyer sur rien fait désormais corps avec les médias, la justice et les réseaux sociaux. On utilise un miroir grossissant dans les affaires anodines. Je refuse le diktat des sycophantes à un moment où la République a besoin de tous ses enfants.

Justement, la question anglophone est un épineux problème que peine à résoudre le pouvoir des pistes existent elles? des solutions? condamnez vous la destruction du drapeau camerounais par des activistes

J'ai attiré l'attention des autorités camerounaises sur la crise dite anglophone et il m'a été répondu qu'il n'y a pas de problème anglophone au Cameroun. En février dernier, sur invitation du département de philosophie de l’École Normale de Yaoundé, j'ai donné une conférence et proposé de nombreuses pistes de réflexion qui malheureusement tardent à être suivies par le système gouvernant. Que faisons nous face aux terroristes avec des armes lourdes et des politicien au discours démagogues avec des micros ? Il reste le peuple, c'est lui qui doit se mettre en action par les deux forces en présence sont de grands ennemis de l'Unité nationale, les uns sont sauvages et brutaux et les autres sont insidieux et mesquins. Si certains seront probablement neutralisés, le problème restera entier pour les autres alors que le plus important n'est pas l'homme au service de l’État, c'est l’État au service de l'homme. J'ai du mal à comprendre et à composer avec les politiciens qui soufflent sur la bougie en espérant avive la flamme, c'est ainsi que je suis. l’État actuellement sabote toutes les issues de la sortie de crise, quand il veut créer la richesse, il appauvrit, quand il cherche à organiser l'unitié il divise. Que de cafouillages, que de polémiques, que de division, il refuse de dispenser des leçons de « valeurs républicaines » mais souhaite seulement les voir appliquer, alors pour moi ce sont des mesquineries et rien d'autre. Je pense fondamentalement que nous n'avons pas besoin d'un nationalisme primaire dans notre pays, ce type de nationalisme apporte toujours la guerre. Le Cameroun s'est construit à partir de 1884 sur la destruction [des] cultures maka, Moundang, Ekang, Bamiléké, Sawa, Fulbé etc c'est la période allemande qu'on a, appelé « la pacification » elle s'est faite avec la mise à mort des grands chefs de ce pays, Nguele mendouga, Zeh Nnanga, Amougou Baana. La révolte des Bulu sous la conduite d’Oba’a Mbeti (1899-1900) ; - La résistance du roi Fontem des Bafut et des Bandeng (1901) ; - Le lamido Soulé de Rey-Bouba défait par le lieutenant Padke (1901) ; - Le lamido Oumarou de Banyo (1902) ; - L’émir de Yola, Soubeirou, chassé par les troupes britanniques du colonel Morland et vaincu par les Allemands qui le poursuivirent de Garoua à Maroua (1902) ; Le lamido Hamadou de Maroua assassiné par les envoyés de son frère Soulé que Dominik a nommé à sa place (1902); - Le chef Simekoa en pays Béti (Nanga Eboko, 1902) ; - Le chef Bertoua en pays Maka (1902) ; - Les chefs Bangwa dans l’Ouest du pays. Vous voyez que le Cameroun est une création militaire faite de nations non homogènes, nous ne pouvons pas effacer tout ceci du revers de la main. Ma formation m'oblige à vous inviter à reconnaître au moins que notre pays est une construction où l'on a rassemblé, très souvent par la force, des peuples de cultures différentes. Il y a eu des violences dans les chancelleries, c'est déplorable, brûler le drapeau est selon le Code pénal camerounais un « outrage aux symboles nationaux » ce n'est donc pas à moi de le condamner mais à la loi de notre pays.

L'affaire Mgr Jean-Marie Benoît Bala est restée en travers de la gorge de l’épiscopat. qu'en pensez-vous ?

Nous nous sommes longuement exprimé sur cet odieux assassinat. Notre position est restée la même, nous nous sommes constitués partie civile bien avant la conférence des évêques du Cameroun parce que nous pensons que l'une des missions régaliennes de l’État est d'assurer la sécurité des hommes et de leurs biens. Quand un camerounais est assassiné c'est que l’État a failli dans cette mission et quand l'autopsie est torpillée comme ce fut le cas pour Mgr Bala alors oui l’État est complice et nous ne devons pas accepter que le crime soit légalisé dans notre pays par la justice. Si vous permettez, il y a six ans (20 août 2011) Vanessa Tchatchou se faisait voler son bébé, et le communiqué rendu public à cet effet par le procureur Jean Fils Kléber Ntamack est le même que celui rendu après l'assassinat de Mgr Bala ! Ce sont les mêmes termes et les mêmes conclusions !

La mort suspecte de Mgr Bala, la question anglophone, l'affaire CAN : le Cameroun est il au cœur de la tempête, Vincent Sosthène Fouda, qui gouverne au Cameroun ?

C'est une question qui est sur toutes les lèvres depuis une dizaine d'années. Un pays, tout pays est un bateau qui tangue sans couler « fluctuat nec mergetur » comme disent les latins. Il faut que ceux qui sont à la tête du Cameroun prennent conscience des risques qu'il font courir au pays tout entier.

Quant à la concorde à l’intérieur, elle dépend essentiellement du niveau de cohérence interne de la société qui se caractérise par sa culture et donc son identité. Force est de constater que la société camerounaise dans la grise anglophone n’est pas aujourd’hui une société apaisée et ne le sera pas avant longtemps en raison de la fracture identitaire créée par le système gouvernant qui a cru devoir bâtir une société sans Histoire, sans héros sans géographie. C'est la faillite volontaire de l'élite dirigeante.

Toujours en interne et sur le plan sécuritaire, chacun sait que le Cameroun fait face à une guerre qui lui est imposée par Boko Haram qui à l'origine n'a rien à voir avec notre pays mais qui s'impose aujourd'hui comme l'ennemi numéro un de notre pays. Cette guerre est un gouffre financier et amplifie, à écouter nos hommes en tenue, la détérioration de nos capacités opérationnelles au point de mettre en danger à chaque heure, chaque jours la vie de nos soldats engagés en opération.

Pour ce qui est de la Coupe d'Afrique des Nations, on veut en faire une question d'orgueil national alors qu'organiser cet événement en ce moment n'a aucun sens et le Cameroun n'est pas sociologiquement prêt à accueillir cet événement ; nous n'avons pas le public, les populations sont prises dans des questions de survie au quotidien. Sur le plan infrastructure, nous n'avons pas les stades et malgré l'assurance du Chef de l’État il nous sera difficile de remplir le cahier de charge de la CAF. Pas de route, pas d'eau, pas d'hôtel. Enfin l'assassinat de Mgr Jean-Marie Benoit Bala est le dernier clou sur le cercueil de ceux qui confonde l’État, le pays à leur personne.

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