Trois questions à … Jean-Baptiste Méli « Une action coordonnée pour vaincre la pandémie »
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Infirmier à Antibes, en France, et président du Collectif Soins sans Frontières, il a ouvert, il y a un an, le Centre hospitalier St-Jean, à Yassa- Yansoki, à Douala, au Cameroun. Il souhaite mettre cet établissement à disposition pour lutter contre la pandémie planétaire, avec le concours de l'Etat.

Vous êtes président du Collectif Soins Sans Frontières, promoteur du projet du Centre hospitalier St-Jean, à Douala, au Cameroun. Comment est né ce projet ?

Merci de me donner l'occasion de vous parler de mon modeste parcours. Je suis né au Cameroun et j'ai grandi dans différentes régions du triangle national dont la diversité positive est réelle. J'y ai obtenu mon bac avec mention, dans les années 1995. Mon père, enseignant et catéchiste, n'a pu, hélas dans ces années déjà de crise, me garantir des études universitaires tant souhaitées à cause de son état de santé. J'ai dû me débrouiller comme tout jeune qui voit ses rêves s'écrouler en faisant tous les petits boulots possibles qu'on pouvait faire sans capital de départ, comme pousseur, vendeur de sucettes, serveur dans une boulangerie au quartier universitaire à Yaoundé. C'est là, qu'en 1998, je rencontre un ami d'enfance qui, en partance pour l'Italie, en mémoire de notre amitié, me conseilla de prendre des cours d'italien et qu'en cas de réussite, il m'aiderait à aller en Europe. Je me suis donc mis avec enthousiasme à étudier l'italien et l'année d'après j'obtenais un visa pour l'Italie et je me rappelle cette joie dans les yeux de mon père, émerveillé que son fils puisse aller en Europe. Lui qui, toute sa vie durant, honnête homme,
croyant, géniteur de 12 enfants et enseignant- catéchiste n'y avait jamais rêvé. Je lui avais donné mon visa, il l'avait regardé longtemps, et il m'avait béni tout heureux, il me laissa voyager pour l'Europe avec le rêve de devenir neurochirurgien. Je ne supportais pas de voir les fous souffrir et se faire maltraiter dans la rue et je me disais que je me spécialiserais pour guérir les cerveaux des êtres humains. Hélas ! Arrivé en Europe, la santé de mon papa s'aggravait, pour avoir toujours été surmené par le travail entre l'école et l'église, il commençait à avoir des problèmes de mémoire. On me rapportait qu'il distribuait son maigre salaire à ceux qu'il croisait en route, et ne ramenait qu'une petite partie à la maison, et donc je décidais de non plus faire médecine, trop long, mais, plutôt un cours universitaire d'infirmier qui durait 3 ans ou je pouvais commencer à travailler, pour faire venir mon papa en Europe, le faire soigner, et continuer mes rêves en médecine ensuite. J'obtins mon doctorat en sciences infirmières, fin 2003, à l'Université de Modène en Italie, mais je perdis mon papa quelques mois plus tard en avril 2004, juste quand je commençais à réunir les conditions pour un regroupement familial qui l'aurait certainement sauvé. Ce fut pour moi un choc. Je suis revenu au Cameroun 4 ans après pour l'enterrement de mon père, décédé dans le dénuement le plus complet. J'ai découvert l'humain caché en l'autre et donc en moi et promis sur la tombe de mon père de passer le reste de ma vie sur terre à soigner les autres. D'où l'idée du projet d'un hôpital. Mon premier prêt bancaire fut pour l'achat du terrain, puis des litiges fonciers, des procès et finalement, en 2011, le titre foncier

Comment ce projet s'implémente-t-il concrètement sur le terrain aujourd'hui avec la pandémie du Coronavirus ?

Encouragé entre temps par l'expérience acquise en cardiologie et cardiologie d'urgence, le rêve devenait encore plus grand de convier mes collègues et professeurs italiens pour créer un centre de cardiochirurgie et cardiologie d'urgence au Cameroun. Ce qui a suscité un réel enthousiasme et m'a amené à essayer de prendre modèle sur le plan de notre hôpital, en Italie, grand, spacieux pouvant accueillir tous les services au même endroit. Durant la construction du Centre, j'ai voulu convier toutes les personnes ayant les mêmes désirs dans la création de l'association "Collectif Soins sans Frontières" qui pour moi était l'emblème de mes idéaux. A savoir, chaque être humain dans les mêmes conditions de maladie doit pouvoir avoir droit aux mêmes soins, sans distinction de couleur, de classes sociales et autres. C'est dans ce contexte que j'ai connu d'autres Camerounais de la diaspora, soucieux de la situation globale sur le continent donc la crise Covid-19 n'est que la pointe de l'iceberg. Ensemble, nous pensons désormais à mutualiser nos efforts car des cas comme celui de mon papa, on en a encore plus que jamais de nos jours, des parcours difficiles comme le mien aussi. On se doit de se parler, de s'unir pour créer une force d'abord spirituelle capable de guider la jeunesse en perte de repères vers le chemin juste, avec des valeurs naturelles et non violentes, donc nous, de la diaspora positive, avons les moyens de mettre sur pied. Le Centre St Jean est ouvert depuis mars 2019 et fonctionnait avec beaucoup de difficultés, du fait notamment des conditions d'accueil difficiles, la cour étant boueuse en saison de pluie, etc.

Ce projet, on l'imagine aisément, suscite beaucoup d'espoir au Cameroun. Comment les pouvoirs publics accueillent-ils cette initiative ?

L'idée actuelle est de proposer une collaboration avec l'Etat ou tout organisme International soucieux d'offrir des soins de qualité à nos populations en ces temps de crises du Covid-19, de participer efficacement dans la coordination des actions contre ce virus, car seule une parfaite coordination peut permettre de limiter voire d'endiguer sa propagation. J'en profite pour remercier d'ores et déjà le quotidien Le Messager et la Maison des Camerounais de France/Centre Franco Camerounais (Mcf/Cfc), que coordonne Abdelaziz Moundé, sans oublier tous les collaborateurs qui, actuellement, souffrent avec moi dans ce projet spécial, ambitieux et réalisable ensemble en peu de temps.

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