Maître  André Marie Tassa « Les enjeux des débats actuels concernant le barreau sont fondamentaux »
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Cameroun :: Maître André Marie Tassa « Les Enjeux Des Débats Actuels Concernant Le Barreau Sont Fondamentaux » :: Cameroon

Jackson Francis Ngnié Kamga était dans la ville de Bafoussam en fin de semaine dernière. Ayant au préalable réuni ses pairs dans un hôtel de la localité, le bâtonnier de l’ordre des avocats du Cameroun s’est engagé a tout faire pour renforcer cette corporation. Les questions liées à la gestion de la crise anglophone par cette instance ont également meublé les débats. Certains avocats ont exigé une solidarité sans réserve à l’endroit de leurs confrères des régions sinistrées, mais lesdites préoccupations ont été abordées avec beaucoup de diplomatie par Me Jackson Francis Ngnié Kamga. Pour ce juriste, des reformes et des aménagements ont été opérées dans le sens des revendications formulées par les avocats des régions du Nord-Ouest et du Sud-ouest. Mais la complexité de la crise dite anglophone complique l’intervention de l’instance placée sous sa responsabilité. D’ailleurs, l’Assemblée générale élective du barreau des avocats du Cameroun a été retardée à cause des blocus liés à la gestion de cette crise. Membre du conseil de l’ordre et représentant du bâtonnier des avocats dans la région de l’Ouest, Me André Marie Tassa aborde cette question en parlant de « force majeur ». Supporter du bâtonnier sortant, il soutient que c’est la seule tâche qui couvre le mandat confié, en février 2015, au bâtonnier Me Jackson Francis Ngnié Kamga et à son équipe. Dans cet entretien, il souligne que le bilan de cette équipe est largement positif. Formation optimale des avocats stagiaires, rigueur du conseil de l’ordre sur les questions disciplinaires et accommodation des avocats aux révolutions technologiques et scientifiques font partie des lauriers du bâtonnier sortant et candidat à sa propre succession lors de la prochaine assemblée générale élective du barreau des avocats du Cameroun. Avec des arbres de paix que lui ont remis les avocats de la région de l’Ouest en guise de bénédictions. Lisez plutôt…

Qu’est ce qui justifie cette mobilisation particulière des avocats de la région de la région de l’Ouest autour du Bâtonnier Me Jackson Francis Ngnié Kamga ?

Nous sommes toujours en état d’alerte. Nous travaillons sans cesse et sans relâche pour la solidité du barreau des avocats du Cameroun. Il faut assurer la continuité de l’action. La crise anglophone a impacté notre mandature. Elle a été prolongée à cause de la force majeure. Les enjeux des débats actuels concernant le barreau sont fondamentaux et je suis conscient de l’ampleur de la charge de travail que nous imposent nos attributs de membres actuels ou futurs du conseil de l’ordre. Je suis heureux de pouvoir les entamer sous le bâtonnat de Me Jackson Francis Ngnié Kamga. Ce travail ne peut se réaliser qu'en équipe. C'est la fonction d'un conseil de l'Ordre.

Sous votre mandat, de nombreux avocats stagiaires admis au dernier concours organisé ont été recalés lors de l’examen final de sortie. Qu’en est-il ? N’ont-ils pas été victime d’un triage élitiste ?

Ils étaient 1533 avocats stagiaires. Nous avons organisé leur formation professionnelle. Ils ont reçu des meilleurs enseignements. C’est l’une des promotions la mieux formée du pays. Nous avons joué franc jeu pour l’examen final de sortie. Charge au ministère de la Justice de jouer sa partition. Nous avons été intègres. Nous n’avons pas perçu des pots de vin. Nous avons été rigoureux. C'est le barreau qui continuera à prendre en charge la formation initiale aux stagiaires – qui existe déjà – mais en la rendant davantage qualifiante. J'entends par là que l'avocat stagiaire doit avoir, au terme de cette formation initiale, le sentiment qu'il a reçu un bagage de formation qui le rend à apte à entamer pratiquement le métier d'avocat, à la différence de ce qui s'observe parfois. Actuellement lorsque le stagiaire termine sa formation initiale avec le sentiment d'avoir entendu une répétition de ce qu'il avait déjà appris à l'université. C’est dans cette optique que le barreau du Cameroun, sous Me Ngnié Kamga, a préparé une réforme de cette formation initiale. En réalité cette réforme poursuit des objectifs ambitieux : relèvement du niveau qualitatif des experts ou professionnels-formateurs, relèvement qualitatif des compétences que le jeune avocat stagiaire devra avoir acquises au terme de la formation initiale et enfin relèvement qualitatif du niveau des exigences attendues lors des examens.

On observe toujours des clients qui se plaignent d’avoir été abusés par des avocats. Tout comme des justiciables dénoncent la non accommodation de certains avocats aux révolutions technologiques. Qu’en dites-vous ?

Dans notre ressort, ce genre de situation n’est pas abondant. Nous donnons le meilleur de nous même pour qu’il ait harmonie entre l’avocat et son client, et même avec tous les justiciables. La solidarité est nécessaire pour que toutes les avocates et tous les avocats disposent des outils leur permettant d'exercer leur profession dans des conditions optimales notamment sur le plan de la qualité du service donné au client. Le barreau tout entier peut avoir à pâtir de l'incompétence ou du manque de formation de quelques-uns. C'est là que la solidarité peut avoir sa place. Même si les avocats sont concurrents entre eux (et la concurrence est parfois féroce !), il est nécessaire que le barreau veille à ce que le travail des avocates et avocats soit exemplaire, aux yeux tant du public que de nos gouvernants, pour qu'ils gardent (ou retrouvent) confiance dans la qualité de leur travail. Comment atteindre cet objectif ? Le barreau doit davantage mettre à la disposition des avocates et avocats des outils leur permettant de bien exercer les missions qui sont les leurs. Le barreau peut faire en sorte que lorsqu’un avocat est chargé d’un dossier, la qualité du service presté soit exempte de reproche. Tout cela serait réalisable si les avocats faisaient davantage preuve de solidarité entre eux plutôt que d’un individualisme d’un autre temps. La solidarité des avocates et avocats entre eux sera l’un des facteurs qui fera rentrer le barreau du Cameroun dans le XXIème siècle. Je suis confiant.

Vous semblez dans une logique d’autoglorification….alors que le barreau ne joue pas correctement son rôle de sentinelle en matière de défense des libertés publiques et des droits de l’Homme ?

Nous avons l’intention de construire le siège du barreau des avocats du Cameroun. Personne ne peut le contester. Les avocats se sont battus pour le respect des libertés individuelles ces derniers mois au Cameroun. L’actualité est riche en exemple. Dans le cadre de la crise anglophone, nous avons fait un excellent travail de médiation. Certains avocats en exil sont rentrés grâce aux bons offices du bâtonnier.

Parlons du niveau de formation des jeunes avocats ou des avocats stagiaires. Quelle plus value par rapport aux autres promotions ?

Hier, l’avocat concluait et plaidait. Sa chasse était gardée et il y évoluait en terrain conquis. Aujourd’hui, il doit être capable de suivre son client sur les terrains les plus divers, en ce compris d’abord dans les médias. Plaider en matière électorale ou intervenir de façon pertinente devant un public exigeant, surtout en cas de médiatisation du procès comme récemment au Conseil Constitutionnel font partie des nouvelles exigences de la profession. Et nous tenons à ce que les avocats stagiaires suivent l’exemple des ainés. Ils sont inscrits dans cette dynamique de formation permanente. Plaider et accompagner son client dans un mode alternatif de règlement des conflits requiert aussi des expertises bien différentes. Aujourd’hui l’avocat, et surtout le jeune stagiaire, doit avoir compris l’entreprise de son client, deviner les pièges et les opportunités que de nouveaux textes, de nouvelles situations, de nouvelles possibilités de partenariat, … lui dessinent. Et il doit être à même de les lui servir. Aujourd’hui, l’avocat doit scruter l’innovation, détecter celles qui lui permettront de rendre à ses clients les services les plus efficaces, au meilleur prix. C’est en ce sens que nous disons que l’avocat de plaideur devenu conseiller doit se muer en accompagnateur stratégique. Nos jeunes confrères sont également à cette école. Ce n’est pas une vision « économique » du métier. C’est le constat de ce qu’attendent aujourd’hui les justiciables dans un monde surjuridicisé mais qui se détourne progressivement du judiciaire parce que celui-ci ne lui apporte pas de solution suffisamment rapide, économique et adaptée à ses attentes.

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