Hommage aux femmes Vutés
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Elles sont là, discrètes et infatigables, silhouettes élégantes qui dansent entre les tâches domestiques, la terre nourricière et les bureaux éclairés. Elles s’élancent aussi sur les routes incertaines de l’aventure, portées par un vent de courage trop souvent ignoré. Mais dans les champs où résonnaient autrefois leurs chants matinaux, la moitié d’entre elles ne s’inclinent plus devant la terre fertile. Elles n’ont pas non plus le même accès aux portes de la connaissance, ces portes qui, trop souvent, leur demeurent closes. Les études et les récits de vie montrent  les mêmes réalités : mille et un obstacles entravent le chemin  vers un avenir qu’elles oseraient rêver meilleur. La pauvreté, tel un lierre tenace, enserre leurs ambitions et réduit en poussière leurs aspirations. Les normes sociales, forgées par des siècles d’inégalités, pèsent sur leurs épaules comme un fardeau héréditaire.

Dans les villages de Yangba, Yassem, Yadjigui ou encore Serreré, la jeunesse féminine avance avec espoir jusqu’au seuil de la première, une fois qu’elles sont venues à Ngoro ou à Yoko. Là, la pression s’intensifie, étouffante. Les petites autorités locales, les convenances et les pesanteurs  de la tradition suffisent à briser leur élan. Un baccalauréat en poche devient l’or trop éclatant pour les hommes de leur contrée, qui la suivent avec une ferveur possessive, comme si franchir un seuil universitaire était une audace impardonnable. Trop peu de ces jeunes femmes osent défier l’ombre pour s’emparer d’une licence, d’un master, et encore moins d’un doctorat. Seules celles qui ont su se révolter ont franchi ces frontières invisibles et parfois en renonçant leur identité. La culture Vuté, imprégnée  de traditions séculaires, façonne les destins dès l’enfance.

On épouse jeune, on enfante tôt, et l’école devient un luxe que peu peuvent se permettre. Le quotidien, lui, est un enchaînement de responsabilités : cultiver la terre, porter la charge du foyer, parcourir de longues distances pour puiser l’eau, ramener du bois, trouver des remèdes. Elles avancent ainsi, silhouettes puissantes mais silencieuses, dans l’ombre d’un monde qui ne prend pas la mesure de leur labeur. Et pourtant, elles sont l’épine dorsale de leur communauté, la force tranquille qui nourrit et préserve. Mais leur présence demeure souvent invisible, reléguée à l’arrière-plan d’une société qui tarde à reconnaître leur inestimable valeur. Pire encore, la violence, elle, est visible. Dans ces villages où les bruissements de la nuit portent les échos des querelles conjugales, une femme battue est parfois perçue comme une femme aimée. L’absurdité de ces croyances pèse lourd sur leurs épaules déjà voûtées par le labeur. Il ne s’agit pas seulement d’un combat pour l’égalité, mais d’une lutte pour la dignité. Il faut voir ces femmes, écouter leur voix, reconnaître leur labeur. Il faut leur offrir les moyens de s’émanciper, d’acquérir des compétences, de rêver et de bâtir.

Alors que le Grand Mbam s’apprête à voir grandir une nouvelle génération, il devient essentiel d’investir dans l’éducation et l’émancipation de ces jeunes filles, non seulement pour elles, mais pour tout un peuple. Les femmes Vutés ne sont pas complexées, loin de là. Elles portent en elles un charisme naturel, une force ancestrale que rien ne peut altérer. C’est pourquoi les mères d’hier imposaient le respect, pourquoi leur aura était indéniable. Mais le modernisme a effacé tant de ces figures emblématiques… Libérer le potentiel des femmes Vutés, c’est offrir au monde une lumière nouvelle pour nous autres qui sont peu connus dans un monde effervescent. Notre mélodie ne fait que commencer et elle est  pleine de promesses. Il est temps de briser les chaînes invisibles et de leur permettre d’écrire leur propre histoire.

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