Le MRC-BAS est-il pour un pouvoir d’État sans symbolique sacrée ?
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CAMEROUN :: Le MRC-BAS est-il pour un pouvoir d’État sans symbolique sacrée ? :: CAMEROON

Etymologiquement et historiquement, une république repose sur des choses sacrées. Le pouvoir d’État que le MRC et son leader désirent conquérir c’est aussi un drapeau camerounais, un hymne national et une fonction présidentielle comme emblèmes sacrés et représentatifs de sa dimension symbolique et iconographique. Plusieurs Camerounais et Camerounaises pauvres ou riches, du régime ou de l’opposition, du dedans ou du dehors ont un respect viscéral de ces emblèmes. Des sportifs camerounais, quelles que soient leur discipline, leur ethnie, leur conviction politique et religieuse, n’hésitent jamais à s’envelopper du drapeau camerounais lors d’une victoire de leur équipe. Où qu’ils se trouvent, on reconnait des Camerounais aux couleurs du drapeau que déclinent les maillots des Lions Indomptables qu’ils arborent. Avant le MRC-BAS, tous les mouvements politiques et militants de la diaspora camerounaise tenaient aussi en très haute estime les couleurs camerounaises. L’hymne national de ce pays était chanté avec gravité et sérieux avant chaque réunion.

· Pourquoi un tel respect des symboles républicains avant le MRC-BAS ?

Parce que, malgré la misère, la pauvreté et les oppositions politiques, le drapeau camerounais et son hymne national représentent notre âme à tous et à toutes. Ils représentent ce petit quelque chose qui, sans vraiment pouvoir l’expliquer clairement, nous donne une identité, nous rend fiers et nous attache à une terre, à son histoire, à ses victoires et à ses défaites. C’est ce petit quelque chose qui nous fait frères et sœurs car nous tenant ensemble, allant au-delà de nous, et signifiant plus que notre petite personne et nos petits intérêts égoïstes. Ces emblèmes incarnent le sentiment de fierté d’appartenir à la terre camerounaise, d’accepter son passé, son présent et de croire en sa grandeur malgré les problèmes que nul ne peut nier.

Autrement dit, alors que, du jardin d’enfant aux lycées et collèges, les régimes Ahidjo/Biya ont, via une instruction civique, appris aux Camerounais et aux Camerounaises à s’immobiliser lorsqu’on lève les couleurs nationales et qu’on exécute l’hymne national, l’innovation pernicieuse du MRC-BAS dans ce domaine, à travers certains de leurs militants et sympathisants, est de déchirer le drapeau camerounais et de blasphémer les paroles de l’hymne national camerounais. Aucun militant, sympathisant ou membre d’un parti politique camerounais de l’opposition ne l’avait jamais fait avant le MRC-BAS car cela revient à falsifier la carte d’identité du pouvoir d’État, à le défigurer et donc à le rendre apatride et vulnérable. Est-ce cela une résistance ? La résistance doit-elle souiller les emblèmes du pays, les transformer en paillasson ou les avoir comme iconographie fondatrice de ses revendications ? Le drapeau camerounais est-il sacré uniquement lorsqu’il fait l’objet de transactions commerciales dans l’économie occulte de la résistance ?

· Et Kamto ? Que pense-t-il de cette désacralisation des symboles camerounais ?

Vouer son pays aux gémonies et désacraliser sa mémoire symbolique n’est jamais sorti de la bouche de Maurice Kamto diraient les « Kamtophiles » pour sanctuariser leur champion. Ce serait de bonne guerre mais ils n’auraient pas raison pour peu qu’on tienne à l’éthique de responsabilité qui doit être celle d’un leader dont les auteurs de ces actes se réclament publiquement. Maurice Kamto les désavoue-t-il en restant coi ? Même si les auteurs de tels agissement sont individuellement responsables Maurice Kamto ne tombe-t-il pas sous le coup de l’adage suivant lequel qui ne dit rien consent ?

Allons-y sur quelques morceaux choisis qui montrent que le MRC et son leader veulent conquérir un pouvoir d’État qu’ils s’évertuent à détruire au préalable. Patrice Nganang qui appela au génocide des Bulu est un sympathisant officiel de Maurice Kamto dont il défend les mérites malgré ses derniers revirements. Les BAS qui ont saccagé les ambassades camerounaises en Europe se sont revendiquées de Maurice Kamto et continuent de le faire. Elles l’ont démontré en souillant les effigies de Paul Biya et en mettant à leur place celles de Maurice Kamto. Max Sénior Ivoire, membre de la BAS-France qui a déchiré aux yeux du monde (Facebook) le drapeau camerounais soutient ouvertement Maurice Kamto avant et après l’élection présidentielle. La confédération des différentes BAS qui, non seulement met deux étoiles sur le drapeau camerounais, mais aussi revendique, à l’instar d’Albert Dzongang, l’alliance entre le MRC-BAS et les sécessionnistes amazoniens, sont publiquement des soutiens et des membres actifs du MRC. Wilfried Ekanga qui déconstruit les paroles de l’hymne national camerounais et traite ses compatriotes de moutons dans sa version est un membre actif du MRC invité sur tous les plateaux de télévision. Tous ces nervis et séides du MRC sont des acteurs performants de la « Kamtoland » réelle et virtuelle. Ils se réclament tous du président du MRC et cela exige, suivant l’éthique de responsabilité, que le leader politique qu’est Maurice Kamto assume enfin sa responsabilité politique en faisant une note, un discours ou une mise au point dans laquelle il condamne ces actes et interdit aux membres, militants, adhérents et sympathisants du MRC de remplacer la critique par l’injure et le blasphème de tout un peuple, de déchirer le drapeau camerounais, de changer son iconographie, de blasphémer l’hymne national, de saccager les ambassades et de s’attaquer aux artistes et journalistes camerounais qui auraient soutenu le régime en place. N’avoir jamais condamné ces agissements mais s’être affiché tout sourire à Paris avec leurs auteurs fait de Maurice Kamto un leader politique qui n’assume pas la responsabilité des actes posés par ses troupes et qui, en sous-main, les soutient et veut livrer le Cameroun à une milice multiforme qui sert de bras armé au MRC.

· Quelle mémoire de résistance porte le MRC-BAS ?

Ce n’est pas à Maurice Kamto qu’il faut apprendre que lui et ses sympathisants insultent les pères fondateurs du Cameroun lorsque l’un des leurs déchire le drapeau du Cameroun. Ce n’est pas à Maurice Kamto qu’il faut enseigner que lui et les membres du MRC-BAS insultent l’école nationale de Foulassi et souillent la mémoire des héros Samuel Mikio Bamba et René Jam Afane, lorsque Wilfried Ekanga transforme les paroles de l’hymne national en injures publiques. Ce n’est pas à Maurice Kamto qu’il faut apprendre que le pouvoir d’État c’est aussi les ambassades et la fonction présidentielle qui appartiennent aux Camerounais et Camerounaises et non à un régime spécifique. Il va sans dire, d’après ce qui précède, qu’en dehors d’une opposition frontale au régime, Maurice Kamto et le MRC-BAS sont en train de créer un pouvoir d’État éviscéré et profané. C’est-à-dire un Cameroun où il n’y a plus de lieux sacrés qui tiennent son peuple ensemble. Un Cameroun où on piétine l’âme immortelle du pays qu’on prétend vouloir gouverner.

Faire du MRC un parti politique habité par une éthique de responsabilité n’exige-t-il pas que Maurice Kamto condamne publiquement et fermement ses membres, militants, adhérents et sympathisants qui déchirent et modifient le drapeau du Cameroun, dénaturent son hymne national, saccagent les ambassades, réclament une alliance avec les sécessionnistes ambazoniens, appellent au génocide des Bulu et attaquent physiquement des artistes et des journalistes camerounais ?

Ne doit-il pas, non seulement condamner sans retenue de tels agissements, mais aussi les interdire sous peine de sanctions infligées à tous ceux qui se réclament de lui et en sont les auteurs ?

Le pouvoir d’État et ses emblèmes ne seront-ils respectés que lorsque Maurice Kamto sera le président du Cameroun ?

Ne faut-il pas, face à de tels comportements, que l’État camerounais frappe tous ceux qui déchirent publiquement son drapeau et dénaturent son hymne d’une déchéance de nationalité, d’une peine de prison ou d’une amende salée au cas où ils seraient encore camerounais ?

Un pouvoir d’État peut-il exister s’il n’a pas de fondements sacrés tels qu’un drapeau, un hymne et une fonction présidentielle pour lesquels ses citoyens sont prêts à se sacrifier ?

Comment aller en guerre et mobiliser une armée si le drapeau du Cameroun devient un Kleenex ? A quoi ou sur quoi nos soldats jugeront honneur et fidélité ?

Les Lions Indomptables moulleront leur maillot pour quel intérêt si ses couleurs ne disent plus rien ?

Ce drapeau qu’on déchire, cet hymne qu’on souille et cette fonction présidentielle qu’on émascule sont aussi les fondements du droit du Cameroun et des Camerounais à disposer d’eux-mêmes, les fondements de l’Etat du Cameroun.

Thierry Amougou, économiste, Prof. Université catholique de Louvain (UCL), Belgique.

Dernier ouvrage publié : L’esprit du capitalisme ultime : démocratie, marché et développement en mode kit, PUL, 2018. https://pul.uclouvain.be/book/?GCOI=29303100452120 

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