CARRIERES : Aux greffes, des morts avancent et certains vivants stagnent
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Les derniers actes d’avancement du ministre de la Justice concernant les personnels du corps des greffiers contiennent des incongruités qui ne laissent pas indifférents certains fonctionnaires. Et le président du syndicat monte au créneau pour critiquer la gestion de ce corps par les magistrats.

Cela n’a pas fait de remous retentissants auprès de l’opinion publique, mais c’est une situation qui ne laisse pas indifférents de nombreux fonctionnaires de greffe et particulièrement ceux qui espéraient bénéficier d’un ou de plusieurs avancements d’échelon en cette année 2019. La publication, le 6 novembre 2019, des textes signés par le ministre d’Etat en charge de la Justice sur la question est venue réveiller le sentiment d’injustice qui habite la plupart des greffiers par rapport à la gestion de leur corps par les magistrats. Les actes d’avancement pris par le Garde des Sceaux comportent en effet des curiosités qui alimentent, sous le manteau, toutes sortes de commentaires indignés.

La première incongruité concerne la présence du nom d’un mort dans le tableau des greffiers principaux promus. M. Djona Robert, qui bénéficie de quatre avancements selon l’arrêté N°006352, est décédé en 2013, selon le témoignage unanime de ses camarades de promotion à l’Ecole nationale d’administration et de magistrature (Enam, cycle B). Au moins les trois derniers de ces quatre avancements paraissent incongrus dès lors que l’arrêté signé de M. Laurent Esso précise, en son article 1er, que tous les promus «justifient des conditions d’ancienneté et d’une évaluation favorable». Le portail des camerounais de Belgique (@camer.be). Il est curieux de savoir où et comment le disparu a pu être évalué de 2013 à 2019, puisqu’il était déjà dans l’autre monde. La seconde incongruité est liée à la promotion d’un fonctionnaire, qui a changé de corps depuis. Mme Ayuk Agnès, puisqu’il s’agit d’elle est à ce jour administrateur civil. Bien qu’ayant intégré la fonction publique dans le corps des greffiers après un premier séjour à l’Enam, la concernée s’y était offert un second séjour, cette fois au cycle A de l’Administration générale. Elle travaille depuis lors au ministère des Domaines, du Cadastre et des Affaires foncières. Ce qui n’a pas empêché que l’arrêté du ministre de la Justice prétende qu’elle a été évaluée et qu’elle bénéficie de l’ancienneté requise pour bénéficier de quatre avancements qui l’ont portée au 5e échelon du 2e grade du corps des greffiers principaux, indice 485. Il n’en faut pas plus pour soulever l’indignation (étouffée) de certains.

Favoritisme ?

«On préfère les morts aux vivants au ministère de la Justice», constate un greffier, qui requiert l’anonymat, avant de s’interroger : «Comment une personne morte en 2013 et une autre devenue administrateur civil peuvent encore être reclassées ?» «Il est probable qu’un responsable dans la chaine de traitement du dossier des avancements ait reconnu le nom de notre collègue décédé et ait décidé de le faire avancer rien que sur ce seul détail, spécule un autre greffier. Ça doit être pareil pour celui qui a quitté le corps pour devenir administrateur civil. Dans ces deux cas, on est obligé de constater qu’il y a favoritisme quelque part. Cela ne peut pas apporter de la fierté à ceux qui avancent de façon méritée. Que peuvent en penser ceux qui s’attendaient à être promus et qui ont été ignorés. Ça ne fait pas sérieux, de toutes les façons». Pour eux, comme pour de nombreux autres, ces situations montrent que leur corps est mal géré.

Le président du syndicat des greffiers, Me Etoundi Thomas Sylvain, est plus amère : «Les mouvements d'humeur à répétition des avocats, celui programmé des greffiers, les récentes émeutes à la prison de Kondengui, la plainte de Me Nkoa contre le ministre de la Justice, les multiples révocations, les démissions en cascade des greffiers pour rejoindre d'autres corps de métier, les nominations des morts et leurs avancements sont autant de preuves que rien ne va plus à la Justice et qu'il est tant que le président de la République se penche sur le cas des greffiers. Les états généraux de la justice sont à souhaiter et toutes les incongruités relevées donnent raison au président national du syndicat que je suis lorsque je revendique à cors et à cri la création d'un secrétariat d'État en charge des greffes pour éviter toute cette désinvolture qui caractérise le traitement des affaires des greffiers...»

Rappelons que les greffiers montent régulièrement au créneau pour exprimer leur malêtre, estimant être sous la botte des magistrats. Alors qu’ils sont un corps de la fonction publique qui comptent aussi bien des agents que des cadres de catégorie A2, le sommet à la Fonction publique, leurs carrières sont gérées par un service dit «des personnels nonmagistrats », qui s’occupe du tout-venant. Et aucun d’entre eux n’occupe une fonction de directeur… Ces derniers temps, des actes de nomination de contractuels à des fonctions réservées aux greffiers ont souvent donné lieu à des procédures judiciaires. Le statut spécial des fonctionnaires de greffe n’est pas intégralement appliqué. Ils disent vivre une injustice dans un ministère curieusement chargé de la justice.

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