Cameroun, Focal, Bafoussam: Le basculement des axes politiques traditionnels
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Lors des élections couplées de septembre 2002, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc) avait réussi quelque chose de fabuleux dans la région de l’Ouest. Cette formation politique était passée de 5 sièges de député à 20. Arrachant ainsi entre les mains du Front social démocrate (Sdf en anglais), les deux sièges de la Mifi, les deux sièges du Koung-Khi, les deux sièges des Hauts-plateaux et quatre sièges des Bamboutos. Dans la Menoua, il améliorait son nombre de 2 à 5 députés. Dans le Haut-Nkam, il passait de 1 à 2 députés. Il conservait ses deux députés du Ndé et

arrachait à l’Union démocratique du Cameroun (Udc) un sur les cinq sièges du Noun. Ainsi, seul Pierre Kwemo-aujourd’hui maire de Bafang et président fondateur de l’Union des mouvements socialistes(Ums), gardait son poste de député sur les 17 que comptaient le parti de Fru Ndi. Un schéma quasi similaire s’appliquait au niveau des communes. Celles du Haut-Nkam contrôlées par l’Union des forces démocratique du Cameroun (Ufdc) Du Dr Victorien Hameni Bieleu à l’issue des élections municipales de janvier 1996 prenaient les couleurs du parti de Paul Biya. Seules les communes de Dschang, Baleng, Bafoussam-urbain restaient au Sdf.

C’est ainsi qu’après le boycott de la présidentielle de 1997 par l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (Undp), le Sdf et l’Udc, Paul Biya, contrairement au scrutin de 1992, venait largement en tête à l’Ouest. En 2004 comme en 2011, le candidat du Rdpc va rééditer ces exploits malgré les présences de Fru Ndi du Sdf et Ndam Njoya de l’Udc.

Le phénomène Kamto…

Revirement spectaculaire en 2018. Selon les résultats officiels contestés jusqu’à présent par le Mrc, Paul Biya connait un grand recul dans la région de l’Ouest. Il perd carrément dans les départements de la Mifi, de la Menoua et du Haut-Nkam. Et cela parait inadmissible pour Mbombo Njoya et autres caciques du régime. Il faut chercher des têtes à couper. On n’oublie que pour cause de maladie, ce sultan n’a pas battu campagne pour Paul Biya. Tout comme Marcel Niat Njifendji, président du Senat et hospitalisé en France pendant toute la période de campagne électorale. Pour le Rdpc, il faut endiguer les vagues du Mrc avant les prochaines échéances électorales. Mais comment ? Etant donné qu’au fil des jours, et malgré l’embastillement du Pr Maurice Kamto et des centaines de ses

partisans depuis fin janvier, les bases de cette formation politique ne cessent de s’élargir dans toutes les communes de la région de l’Ouest, y compris dans celle du département du Noun où le système bi-partique local Rdpc-Udc pourrait connaitre des bouleversements notables lors des prochaines échéances électorales. La position de Marcel Niat Njifendji comme président du Sénat et deuxième personnalité de la République ne fait pas bon marché dans l’espace politique de la région de l’Ouest. Même dans la commune de Bangangté, dont il est originaire et considéré depuis 1992 comme bastion de Paul Biya à l’Ouest, l’analyste perçoit bien que le Rdpc tient la tête grâce aux initiatives de Célestine Courtes Kectha en matière de coopération internationale décentralisée que par l’entregent du président de la chambre haute du parlement camerounais.

Les électeurs ne sont pas des imbéciles…

Les faits sont assez palpables. Les relations assez conflictuelles entre Luc Désiré Nkono, chef du centre régional des impôts de l’Ouest et les commerçants des principales agglomérations de cette région ne sauraient y favoriser des votes en faveur de Paul Biya ou du Rdpc lors des consultations électorales, qu’elles soient locales ou nationales. En effet, comment un commerçant de Bafoussam, de Dschang, de Bafang ou de Foumbot pourraient soutenir le gouvernement du Renouveau quand il a l’impression de payer un surplus d’impôts suite à un « redressement fiscal » qu’il juge « fantaisiste », car, organisée sous le couvert d’une campagne de recensement de contribuables en déphasage avec les principes élémentaires du droit fiscal camerounais qui admet le «consentement à l’impôt » en l’admettant déclaratif ? En outre, comment croire qu’un habitant de la ville de Bafoussam peut facilement apporter son soutien au champion du Rdpc quand elle est le chef-lieu de région au Cameroun qui ne dispose pas d’université d’Etat alors que le nombre de sa population jeune est croissant?

Sur un autre plan, quels sentiments habitent ces nombreux transporteurs harcelés et dépouillés au quotidien sur les routes de l’Ouest par des gendarmes et policiers engagés dans des opérations de contrôle routiers fantaisistes et inopportunes ? Que dire des familles endeuillées suite à la non prise en charge des victimes d’accident de la circulation dans les hôpitaux publics de la région de l’Ouest ? Le nombre des malades qui admis aux urgences sanitaires et y décèdent sans recevoir des moindres soins médicaux saurait-il plaider en faveur du Renouveau et des élites envoyées pour battre campagne au nom de Paul Biya dans la région de l’Ouest ?

Les paradoxes

Il est vrai, l’entame du bitumage du bassin agricole de l’Ouest sous les auspices du ministre Emmanuel Nganou Djoumessi, la mise de la commune de Bangangté sous le label des municipalités inscrites dans une logique de développement durable et équitable par Célestine Courtes Kectha, la construction de nombreuses salles de classe et de la construction et l’équipement d’un pavillon moderne à l’hôpital régional de Bafoussam par Sylvestre Ngouchinghé, les actions de Madeleine Tchuinté ou d’Albert Kouinché (promoteur de la société Express Union Finances Sa) en matière de distribution des semences améliorée ou des engrais biologiques aux agriculteurs du Koung-Khi, la flopée des actions humanitaires du ministre Pascal Nguihé Kanté en faveur des populations démunies de la Mifi, telle la campagne gratuite d’opération des becs des lièvres, ou les chantiers de réhabilitation de la voirie urbaine de Bafoussam sous le contrôle d’Emmanuel Nzété, ont contribué à rendre moins sombre le tableau du renouveau à l’Ouest.

Mais en réalité, les électeurs de la région de l’Ouest ne sont pas des imbéciles. Pour eux, « la politique est incontestablement un jeu d’intérêts et une épreuve de rapport de forces. » Ibrahim Mbombo Njoya et les autres thuriféraires du régime de Yaoundé devraient savoir cette vérité avant de pousser certains de leurs camarades vers la guillotine.

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