Kisito Ngoa : « Il faut attribuer les marchés à des entités performantes »
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Monsieur le président, quel regard jetez-vous, d’une manière générale, sur l’exécution des projets d’infrastructures au Cameroun ?
Rappelons d’abord qu’une infrastructure est un ensemble d’ouvrages et d’équipements collectifs fixes interconnectés destinés à faciliter les échanges socio-économiques et à soutenir de manière durable la croissance dans un pays. En fait, un accès plus étendu à des services infrastructurels améliorés constitue un moteur important pour la croissance économique. L'état médiocre de l'infrastructure est un obstacle majeur pour la croissance des pays africains, et le Cameroun ne fait pas exception. Si notre pays parvenait à porter son infrastructure au niveau des pays africains à revenu intermédiaire, l'impact sur la croissance pourrait être de l'ordre de 3 points de pourcentage. Cela passe donc par des projets pensés dans leur globalité, et connectés entre eux.

Lors du dernier conseil des ministres, le président de la République a rappelé la nécessité de voir tous les projets respecter les délais prescrits pour la réalisation. Comment peut-on y arriver, connaissant les obstacles habituels (libération des emprises, capacités des entreprises co-contractantes, etc.) ?
Je comprends fort bien le président de la République, dans sa volonté de voir les projets qu’il a parfois lui-même lancés, se terminer dans les délais annoncés, mais j’ajouterais même, être réellement livrés un jour. Trop de projets ne se terminent jamais, alors que par essence, ils sont censés avoir une fin. La vérité se trouve justement dans les délais prescrits. Pour plaire au politique, ou abuser l’opinion publique, on annonce et affiche régulièrement des délais d’exécution irréalistes. Et pourtant, nous savons tous qu’il y a une saison des pluies, qu’il faut indemniser des populations, que les ressources financières sont limitées, et qu’il est impossible pour nos entreprises de réaliser mensuellement des chiffres d’affaires (en fait des décomptes) importants. Il suffit donc tout simplement de donner des délais réalistes, tenant compte de toutes les contraintes, qu’elles soient humaines, techniques ou financières.

Justement, beaucoup de projets sont lancés sans de bonnes études préalables. Comment peut-on améliorer la maturation ?
La décision de construire n’est pas seulement politique. Elle est également économique et technique. Cela signifie qu’on ne devrait pas, quelles que soient les motivations, lancer un projet sans étude préalable. Mais ces études préalables ont un coût, parfois élevé, et c’est ici que se situe la difficulté pour nos décideurs, d’investir dans des études qui in fine, peuvent même conduire à l’abandon d’un projet. Notre pays doit financer sur fonds publics les études de projets qui entrent dans nos stratégies de développement, afin de disposer d’une véritable banque de projets, que l’on pourra ensuite présenter à des investisseurs potentiels. camer.be. Il ne revient pas à ces derniers de nous dire ce que nous devons faire pour le développement de notre pays. Et peu importe le temps que cela prend, l’essentiel étant de lancer des projets qui dans les délais annoncés donneront satisfaction aux populations.

On déplore également l’impact de la surfacturation sur la réalisation à temps de bon nombre de projets au Cameroun. Peut-on éradiquer ce phénomène qui alimente bien des intérêts mafieux ?
Oui, il est tout à fait possible de positionner un projet dans le triangle d’or « qualité – coût – délai », pourvu que les acteurs de la commande publique le veuillent bien. A partir du moment où vous lancez des projets dans l’urgence, avec des délais trop courts, vous augmentez le coût tout en diminuant la qualité. Il faudrait à l’avenir s’interdire de passer des marchés en procédure d’urgence pour des projets dont les études préalables n’auront pas été validées par des professionnels venant à la fois du public et du privé.

Comment les réformes entreprises dans le système de passation des marchés publics peuvent-elles améliorer la réalisation des projets d’infrastructures ? Ce système est dynamique, et doit sans cesse s’ajuster aux contraintes et réalités de l’heure. Il reste cependant attendu que tous les acteurs d’un projet fassent preuve d’un plus grand sens des responsabilités, et qu’à défaut, ils soient sanctionnés. Enfin, la catégorisation des entreprises doit être effective dans notre pays, pour que les marchés d’infrastructures soient attribués à des entités performantes.

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