Covid-19 et crise anglophone : La guerre sur deux fronts
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Les différentes factions séparatistes divisées sur un cessez-le-feu.

Le secrétaire général des Nations unies demandait récemment aux belligérants en zones de conflits dans le monde d’observer une trêve afin que tous se consacrent plutôt à la lutte contre la pandémie du coronavirus. Dr Ebenezer Akwanga, leader de la Southern Cameroon Defence Forces (Socadef) l’une des factions du mouvement séparatiste dans les régions anglophones, a répondu favorablement le 27 mars dernier à cet appel du SG de l’ONU. C’est ainsi que depuis les États-Unis où il réside, le leader de la Socadef a demandé à sa milice dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest d’observer un cessez-le-feu unilatéral de deux semaines, à compter du 29 mars. Le Dr Sako, du gouvernement intérimaire de la république virtuelle d’Ambazonie, lui a emboîté le pas. C’était sans compter sur la réticence des autres factions, notamment le Ground Zero Defence Council (Gzdc) et l’Ambazonia Governing Council (Agovc).

Dans un communiqué daté du 28 mars, cosigné par un certain Général Virus et un certain Popo, respectivement SG et porte-parole de Gzdc, tous deux disent «non au cessez-le-feu jusqu’à ce que le Cameroun, qui a déclaré la guerre contre nous, cesse le feu». Ils ajoutent: «Nous, combattants pour l’indépendance et la souveraineté de l’Ambazonie au terroir, informons le peuple ambazonien et la communauté internationale que nous n’avons déclaré à aucun moment un cessez-le-feu unilatéral. Nous ne serons pas en trêve pendant ces jours à cause de la pandémie du coronavirus, jusqu’à ce que le gouvernement de la République du Cameroun, qui a déclaré la guerre contre le peuple ambazonien, cesse le feu. Le cessez-le-feu doit d’abord être négocié entre les parties et les termes arrêtés».

Pour leur part, Dr Julius Nyiawung et Obadia Mua, respectivement vice-président et secrétaire général de Ambazonia Governing Council (Agovc), indiquent, dans un autre communiqué qu’«il n’y aura pas de cessez-le-feu unilatéral dans la guerre d’indépendance de l’Ambazonie à cause de la pandémie du Covid-19». À les croire, lit-on dans cette missive, «permettre une telle action unilatérale serait donner libre cours au Cameroun d’accéder partout dans nos villes et villages pendant et après la pandémie du coronavirus»? Toujours est-il que les signataires du Gzdc demandent néanmoins à «tous les Ambazoniens, surtout ceux du terroir, d’observer les mesures nécessaires d’hygiène et de distanciation pour éviter la contamination du coronavirus». Ils se réjouissent du fait qu’«aujourd’hui, tous les pays du monde ont suivi les pas de l’Ambazonie et pratiquent le lockdown (confinement NDLR)».

Les cosignataires du communiqué du Gzdc rassurent le personnel de santé et humanitaire national ou international. «Nous vous permettrons de continuer votre travail d’assistance médicale à notre population en conformité avec les normes internationales en zone de conflit». Sur le terrain, dans les deux régions anglophones, alors que les autorités administratives, concomitamment avec le personnel de santé, s’activent tant bien que mal auprès de la population à barrer la voie au Covid-19, les armes n’ont pas cessé de crépiter. Le 29 mars 2020, date d’entrée en vigueur du cessez-le-feu unilatéral initié par la Socadef d’Ebenezer Akwanga, un véhicule blindé de l’armée gouvernementale a été victime d’une attaque à Oku, village de l’ancien Premier ministre Philémon Yang.

Huit personnes, dont des militants du Rdpc et des éléments des forces de défense et de sécurité, ont perdu leur vie dans cette attaque. On a appris que le véhicule s’est retrouvé dans un ravin. Les quatre rescapés ont été rattrapés et réduits au silence définitif par des séparatistes. À Mamfe dans le Sud-Ouest, plus précisément dans le village Egbekwa, considéré comme l’épicentre du conflit armé, la population a été réveillée par deux attaques qui se sont soldées par l’incendie d’un centre de santé et la résidence d’Agbor Benson Besong, premier adjoint au maire de la commune de Mamfe. Peter Eyong, un résident du coin a été enlevé à cette occasion. Conduit et gardé en captivité, il a été libéré quelques heures plus tard.

À Mbengwi, le 1er avril 2020, une attaque, repoussée par la brigade territoriale, s’est soldée par la neutralisation de trois combattants séparatistes et la saisie des armes et munitions. Des enlèvements avec demandes de rançons ont également eu lieu la semaine dernière à Bambalang dans le Nord-Ouest. La guerre fait donc son chemin sur deux fronts dans le Noso: le front sanitaire avec la pandémie du coronavirus dont déjà quelques trois cas ont été confirmés dans le Sud-Ouest, et le front de la crise sociopolitique. Il est à noter que Tibor Nagy, sous-secrétaire d’État aux Affaires africaines du gouvernement américain, a félicité le leader de la Socadef pour sa décision du cessez-le-feu unilatéral.

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