Les épaves roulantes de nos campagnes
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Ils circulent à vive allure. Avec dans leur sillage des colonnes opaques de fumée. Et parfois des accidentés. Ce sont des véhicules bannis de la circulation en Europe, aux Etats Unis d’Amérique en Asie…. mais utilisés comme taxis ou véhicules à usage personnel au Cameroun. Etat des lieux d'un système de transport controversé.

Le visiteur qui débarque dans les campagnes et même certaines villes camerounaises est tout de suite happé par un phénomène singulier : la prolifération de vieux véhicules. Dans les villages reculés des centres urbains, ils sont de plus en plus nombreux ces véhicules dépassant parfois leurs conducteurs en âge. Quand ce ne sont pas les routes qui sont à l’image du village lui-même, ce sont les véhicules occupés par les usagers qui en sont la marque caractéristique.

Vous n’avez pas besoin d’avoir un œil d’observateur averti pour remarquer ces cercueils roulants. Le parc automobile réservé au transport urbain en Cameroun grouille de ces véhicules pourris, usés jusqu’aux pneus, mais toujours autorisés à circuler par on ne sait qui.

Ce qui est surprenant, ce sont les usagers camerounais qui, à leur risque et péril empruntent ces voitures, faute de mieux, disent-ils. Mais ce n'est pas tant le nombre de ces véhicules qui impressionne. Ce n'est pas non plus la nuée des carcasses de véhicules abandonnés quelquefois en bordure des routes qui gène dit on là bas.

Les vieux véhicules assurent autour de 70% du transport des personnes dans certains villages au Cameroun. Opep, Clando, Mewa'awouka, Oya oya, Morawoua … Autant de noms qui désignent les carcasses roulantes de nos campagnes. Si certains de ces véhicules ont fière allure et sont bien entretenus, d’autres par contre sont de véritables épaves sur quatre roues.

Lolodorf, Mienzip, Osuzoa, Minkala Nous avons fait le tour de certains villages du Cameroun et emprunté ces engins qui font partie de la vie quotidienne des villageois.

«Les taxi clandestins sont très fréquents dans mon garage. Ces véhicules ont souvent des problèmes mécaniques sérieux dus à la manière de conduire des chauffeurs qui entraîne ces vieux engins dans toutes les crevasses sur leur chemin. Il y a aussi les accidents qui sont quasi quotidien», souligne Onana Bekott (Onana le vesté, en langue locale), chef de garage à Essazock, localité située à 25 km de Yaoundé.

En effet, à voir ces taxi clandestins stationnés chez lui on se pose beaucoup de questions sur leur ‘‘état de santé’’. Les voitures sont rapiécées de toute part ! Ici les phares tiennent grâce à un fil de fer qui a servi à les raccrocher à la carrosserie.

Assis dans le véhicule, on aperçoit le bitume sous ses pieds tellement le châssis est fissuré. Le tableau de bord n’existe que de nom car aucun voyant ne fonctionne vraiment.

L’extérieur des véhicules n’offre pas un spectacle reluisant. Un coup d’œil sur le moteur permet de se rendre à l’évidence que les jours du moteur sont comptés. Des marques de bricolages sont encore bien visibles. «Sans vous faire peur je vous dirais que 80% des réparations sont plus du colmatage que des rechanges. Les propriétaires de ces véhiculent prétextent chaque fois qu’ils n’ont jamais d’argent : ce volet n’incombe en rien aux chauffeurs», confesse Onana Bekott.

Intérieur et extérieur rapiécés

Les chauffeurs quant à eux font ce qu’ils peuvent avec leurs engins et ne leur parlez pas de l’état de la voiture. Ils en font mêmes un peu trop souvent. «Mais mon frère est ce que la voiture ne roule pas ?», demande Mvondo chauffeur, d’un taxi clandestin. Pour lui bon ou mauvais état, l’engin doit rouler et rapporter des sous. Certains chauffeurs sont réputés pour être de véritables voyous du volant sur certaines lignes de transport. Ils font souvent exprès avec leur vieux tacot pour briser les rétroviseurs et les phares de leurs amis.

Le mauvais état de ces véhicules conduit à de nombreux drames et contre toute attente, « Ces véhicules passent la visite technique sans problème puisse qu’ils roulent. On se demande bien si nos autorités ont envie de nous débarrasser de ces cercueils roulants. C’est vrai que nous sommes dans le besoin et que les taxi clandestins nous rendent service mais il faut revoir leur état de fonctionnement.

La quasi-totalité des véhicules réservés au transport en commun ne rassurent pas du tout les usagers de la route qui sont pourtant obligés de s’y engouffrer tous les jours souvent après d’intenses luttes.

Ce qui frappe aussi, c'est le gaz toxique que crachent ces véhicules. C'est que, pour la plupart de seconde troisième ou quatrième main et donc vieux, sont mal entretenus : leurs conducteurs, plus intéressés par les recettes que par l'état de leur véhicule, en viennent à oublier les nécessaires réglages.

En conséquence de quoi leurs véhicules produisent une redoutable fumée dont l'échappement est responsable de multiples maux : Irritation des yeux, toux, sensation d'étouffement, asthme...

Des études récentes effectuées par les ONG locales montrent un accroissement des cas d’accident de circulation et de pneumonie dans cette métropole. Selon certains spécialistes, ces véhicules sont tous bannis de la circulation en Europe et le benzène contenu dans l'essence aurait des effets cancérigènes.

Malheureusement, les ravages ne s'arrêtent pas là. En réalité, certains véhicules sont de véritables carcasses mortifères. Il ne se passe pas de jour sans qu'ils ne provoquent des accidents ou dans certains cas, ne conduisent des passagers malchanceux de vie à trépas.

C’est ici que nous avons vu des taxi de brousse dits clandos à la carrosserie tenant plus par des câbles électriques ou des fils de fer et dont l’échappement crache une fumée noire.. Les motos taxi polluant eux aussi l’air klaxonnent de partout, sauf pour les oreilles des policiers à l’abri et qui ne s’intéressent qu’aux quelques pièces que leur remettra les conducteurs de ces cercueils roulant.

Devant une telle situation, quelles solutions faudrait-il adopter ? Pendant les heures creuses, Certains usagers de la route, surtout les plus ingénieux portent des masques, sortes de morceaux d'étoffe qui leur recouvrent le nez et la bouche. Il nous semble que pour réduire la pollution par le gaz d'échappement dans les villes et villages du Cameroun, des mesures courageuses doivent être prises : Surtaxer les véhicules les plus âgés de seconde main importés afin de privilégier l’entrée sur le territoire des véhicules les moins âgés. Jusqu’ici c’est plutôt le contraire qui est en pratique dans ce pays de l’Afrique centrale. Il serait aussi nécessaire de faire assurer ceux qui sont en circulation et leur faire subir une visite technique en bonne et due forme, conditions sans lesquelles aucune autorisation de circuler ne devrait être délivrée …

Le Cameroun refuse de revoir l’âge maximum des véhicules importés sur son territoire. Interpellé à plusieurs reprises, il y a de cela quelques semaines par nos soins, le ministre en charge du Transport camerounais n'a pas osé nous répondre. Une manière de dire que le Cameroun sera et continuera d'être la poubelle des vieilles voitures bricolées et rafistolées

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