Grand dialogue national : Avis d’éclipse sur la crise anglophone
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Inscrite comme sujet principal des pourparlers qui s’ouvrent lundi par le chef de l’Etat, la question du Nord-Ouest et du Sud-Ouest risque d’être diluée dans le tout venant de revendications déversées par les autres composantes sociopolitiques et culturelles du Cameroun.

Les revendications des élus locaux dans le cadre du « grand dialogue national », consignées dans un document remis le 23 septembre au Premier ministre par le président des Communes et villes unies du Cameroun (Cvuc), Emile Andzé Andzé, portent essentiellement sur la nécessité de « responsabiliser définitivement les maires qui sont élus et d’accorder une autonomie administrative et financière aux collectivités territoriales décentralisées ». Les délégations des 10 régions, qui ont été reçues tour à tour lundi dernier par Joseph Dion Ngute, si l’on s’en tient à leurs déclarations au sortir de l’immeuble « Etoile », ont chanté en coeur l’accélération de la décentralisation.

Pour ces représentants, les revendications à l’origine des troubles dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest peuvent également être formulées par les populations des huit régions. Depuis le début des consultations préparatoires, des partis politiques, des organisations de la société civile, des leaders religieux, des minorités sociologiques, à l’instar de la communauté Bororo dont des émissaires ont été consultés par le chef du gouvernement, etc., ont fait une kyrielle de propositions qu’ils souhaiteraient voir examinées avec la même attention que celles portant sur les causes profondes du conflit dans le Nord-Ouest et les solutions pour en sortir. Le portail des camerounais de Belgique. Dans son adresse à la nation, le 10 septembre, le président de la République, a pourtant été clair : « le dialogue dont il est question, concernera principalement la situation dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest ». Seulement, en voulant rassurer les autres composantes de la société camerounaise quant à ce que les pourparlers toucheraient à « des questions d’intérêt national, telles que l’unité nationale, l’intégration nationale, le vivre-ensemble », Paul Biya a ouvert une brèche dans laquelle s’est engouffrée un tout venant de revendications qui menacent de diluer le sujet vedette.

Pour l’historien et analyste sociopolitique Ahmadou Sehou, cette inquiétude est légitime, car « le grand problème à résoudre reste celui du retour à la paix au Nord-Ouest et au Sud-ouest (…) Il est évident qu'une bonne partie de l'assistance n'a qu'une connaissance limitée de la question anglophone et, avec la surreprésentation de certaines sensibilités politiques qui se profilent, il y a risque de glissement vers des discours dithyrambiques au lieu de faire des propositions réalistes et pertinentes ». L’universitaire pense néanmoins que l'agenda principal du dialogue peut être sauvé par une meilleure organisation du déroulement des travaux. « Soit créer une commission spécifique sur cette problématique, chargée de recueillir les propositions les plus pertinentes en vue de leur validation en plénière, soit consacrer suffisamment de temps à l'examen de cette question avant d'aborder les autres préoccupations des participants », suggère-t-il.

L’enseignant-chercheur trouve par ailleurs que le format du dialogue choisi n'est pas de nature à rassurer, et s’interroge sur l’issue des tractations entamées bien avant la convocation du « grand dialogue national » avec les autorités suisses, lesquelles impliquaient certains leaders sécessionnistes. Il est persuadé que celles-ci auguraient des négociations pour une sortie de crise honorable pour toutes les parties et dans l'intérêt du Cameroun. « Il aurait été plus judicieux de parvenir à un accord avec les leaders politiques et militaires de la sécession avant d'envisager un grand dialogue de réconciliation nationale qui permettrait d'apaiser les coeurs et d'envisager la reconstruction. Avec l'absence des séparatistes qui se profile à l'horizon, il est difficile de parier sur ce grand dialogue quant à la résolution de la crise anglophone. L'Etat a répondu à plusieurs revendications sans obtenir un retour à la paix. Ce qui signifie que le problème et ses acteurs sont ailleurs et que de nouvelles concessions ont peu de chance de changer la donne sans l'implication active des principaux belligérants. Espérons tout de même un miracle ou un sursaut patriotique qui conduiraient à un retour à la vie normale dans ces deux régions de notre pays », conclut Ahmadou Sehou.

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