Extrême-Nord : Quand une source de vie donne la mort
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La recherche de l’eau pendant les huit à neuf mois de saison sèche est à l’origine de plusieurs décès.

A Mendézé, un quartier en plein centre de Mokolo, chef-lieu du département du Mayo-Tsanaga, le forage du coin est pris d’assaut 24h/24, signe d’une sollicitation extrême. Certaines femmes alignent juste leurs récipients selon l’ordre d’arrivée et retournent vaquer à d’autres occupations avant de revenir les récupérer une fois pleins. Pour un bidon, on peut tourner pendant trois heures de temps. Ici, il n’existe pas de vendeur d’eau comme dans les centres urbains et grandes agglomérations accessibles. C’est chacun qui se débrouille. D’aucuns vont acheter de l’eau de robinet près de leurs domiciles, d’autres creusent des puits communautaires dans les lits des mayos, lesquels tarissent deux mois plus tard. Les nantis qui n’ont pas de forages à domicile et qui ont un moyen de locomotion vont jusqu’au barrage de retenue d’eau de Woudahay à sept kilomètres de la ville pour s’approvisionner. « C’est un véritable parcours du combattant que tout le monde subit pendant 8 mois », se plaint Téméné, un habitant de Mendézé.

Les clichés pareils sont les mêmes selon qu’on est à Kolofata, Guider ou Koza. Dans les coins comme Mokolo, Soulé- Roua, Tokombéré et Mora, on estime avoir déjà atteint le fond en ce qui concerne l’accès à l’eau. « Dès que tu creuses deux mètres, tu rencontres des pierres partout. Et là où on peut creuser jusqu’à 60 mètres de profondeur, on ne trouve toujours rien. On se trouve dans des zones si enclavées que même si l’Etat voudrait y construire un forage, il ne pourra le faire. Pourtant, c’est dans ces zones que les populations vivent un calvaire. Il faut aller chercher l’eau à pied et se lever tôt tout en espérant en trouver, sinon, il faudra attendre le petit matin du lendemain », se lamente Demagai Djongofay, une ménagère de Soulédé qui ironise que boire de l’eau ici est plus qu’un luxe.

Morts d’homme

Au-delà des désagréments et autres maladies hydriques engendrés par l’indisponibilité de ce précieux liquide, ils débouchent le plus souvent par la mort des populations. Un fait d’actualité en administre la preuve. Le 1er avril dernier, à Kolofata, quatre enfants d’un même père ont succombé suite à l’éboulement d’un puits traditionnel à côté duquel leur mère faisait la lessive à Wolordé. Les chercheurs d’eau doivent également faire attention aux bêtes sauvages et autres reptiles qui se disputent des points d’eau au petit matin. C’est notamment le cas à Soulédé-Roua.

Les puits creusés de façon artisanale qui s’écroulent sous des individus, des émanations de gaz toxiques qui causent la mort de plusieurs personnes ici et là, des bousculades et les éternelles attentes aux points d’eau, des rivières communément appelés mayos qui tarissent les 8 mois de la saison sèche durant ; la liste des désagréments liés au problème d’eau dans la région de l’Extrême-Nord Cameroun, est loin d’être exhaustive.

Pour se ravitailler dans les rares points accessibles, les habitants utilisent des ânes, des bicyclettes et des motos afin de parcourir de longues distances sous un soleil de plomb. «Le problème d’eau se pose parce que tous les points d’eau réunis ne peuvent pas satisfaire la demande qui est de plus en plus grande en raison de la démographie de cette région qui croit de façon exponentielle. L'info claire et nette. On boit beaucoup d’eau en période de chaleur. Or, ces régions ont un climat très accidentel qui a du mal à retenir l’eau et une pauvre nappe phréatique à cause du climat capricieux. Je crois qu’une extension du réseau de la Camwater serait la solution la plus adéquate », croit savoir un ingénieur spécialisé dans les travaux hydrauliques. S’il faut ajouter à tout cela les maladies hydriques comme le choléra et la bilharziose provoquées par la consommation des eaux impropres, lesquelles ont fait des dizaines de centaines de morts dans les régions du Nord et de l’Extrême-Nord, le pire est à craindre.

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