JUSTICE : Marafa bientôt libre
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Après la libération de Me Lydienne Eyoum, les partisans de l’ex-ministre d’Etat retrouvent le sourire.

La remise de peine accordée à Me Lydienne Eyoum par le chef de l’Etat, Paul Biya, est une excellente nouvelle pour les proches de l’ex-ministre d’Etat Marafa Hamidou Yaya. Si l’avocate, condamnée à 25 années de prison, a recouvré la liberté au terme d’un artifice juridique, c’est d’abord, pensentils, en raison des pressions exercées sur le président de la République par son homologue français et par les décisions judiciaires défavorables au Cameroun.

L’espoir est donc permis pour l’ancien proche collaborateur du chef de l’Etat. L’homme qui ne se voit autrement que comme président de la République associe en effet tous les ingrédients qui ont permis à Me Lydienne Eyoum de se sortir des griffes de Kondengui. D’abord, la pression politique. Marafa Hamidou Yaya bénéficie, selon ses proches, de la compréhension des Etats-Unis. Fait rare, le 04 juillet 2013, l’ambassadeur de ce pays au Cameroun, Robert P. Jackson, lui avait rendu visite dans sa prison située dans les locaux du Secrétariat d’Etat à la Défense où il est incarcéré depuis le 25 mai 2012.

L’entretien entre le chef de la mission diplomatique des Etats-Unis et Marafa Hamidou Yaya, qui s’était déroulé dans le bureau du patron des lieux, Jean Baptiste Bokam, avait duré 45 minutes environ. «Le geste du diplomate, arrivé avec tous les attributs de sa fonction à la prison, était un message clair aux autorités camerounaises», se félicite aujourd’hui Mohamadou, un partisan de l’ex-ministre d’Etat. En effet, il n’est pas de tradition que les ambassadeurs posent de tels actes sans l’aval de leur pays et du pays hôte.

En août 2013, Robert P. Jackson accorde une interview au quotidien Le Jour, dans laquelle il explique les raisons de sa visite à Marafa Hamidou Yaya. «J’ai précisément rendu visite à l’ancien ministre de l’Administration territoriale du Cameroun, en prison, pour voir son état. Surtout pour vérifier les conditions de détention dans lesquelles il se trouve, voir comment il est traité. Et je trouve que mon acte est tout à fait conforme avec notre mission de surveiller le respect des droits humains et de nous assurer que nos deux gouvernements font tout ce qu’ils peuvent pour promouvoir les droits de l’Homme», avait déclaré le diplomate.

Mais le pic de l’entretien se trouvait dans cette petite phrase lourde de sous-entendus au sujet de la condamnation de l’ex-secretaire général de la présidence de la République : «le jugement n’a pas précisé les preuves de corruption», avait-il glissé entre les lignes.  

PRESSION

Depuis, les Etats-Unis sont restés fidèles à leur ligne de conduite sur le cas Marafa. Depuis 2012 d’ailleurs, dans leurs différents rapports sur la situation des droits de l’homme au Cameroun, ils n’ont cessé de qualifier l’ancien ministre d’Etat, condamné en définitive à 20 ans de prison pour «complicité intellectuelle» dans le cadre d’un détournement de fonds alloués à l’achat d’un avion du chef de l’Etat, de prisonnier politique.

«Les Américains doivent mettre le pied un peu plus sur l’accélérateur et ils disposent pour cela de nombreux leviers de pression. Notre espoir repose sur leurs épaules parce que les Français, du moins la gauche au pouvoir en ce moment, a déjà trop obtenu du Président sur ces dossiers judiciaires. N’oubliez pas qu’avant Me Lydienne Eyoum, il y a eu la libération de Thierry Atangana», explique un député Rdpc du Nord, proche de l’ancien ministre d’Etat.

De toutes les façons, selon des partisans de l’ex-ministre d’Etat, de nouveaux éléments renforcent la pression sur le chef de l’Etat, seul à même aujourd’hui, d’ordonner de quelque manière que ce soit la libération de son ancien collaborateur. Il y a, plus récemment, cette décision du Groupe de travail des Nations-Unies sur la détention arbitraire communiquée à l’avocat de Marafa Hamidou Yaya le 27 juin 2016 et qui demande au gouvernement du Cameroun non seulement sa libération, mais également son indemnisation pour les dommages occasionnés par la privation de sa liberté.

Mieux, ce Groupe de travail entend faire appliquer ses délibérations dans la mesure où Monica Pinto, la rapporteuse spéciale du Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU sur l’indépendance des juges et des avocats, a été saisie pour qu’elle prenne «toute action appropriée» à ce sujet. De lourdes menaces de sanctions multiformes planent donc sur l’État du Cameroun au cas où il n’appliquerait pas la décision de l’instance judiciaire internationale.  

ETAT DE SANTÉ

Un autre élément qui milite en faveur de la libération de Marafa, c’est son état de santé qui ne cesse d’empirer. Depuis toujours, ses avocats ont plaidé pour son évacuation à l’étranger où des soins appropriés pourraient lui être administrés. Cette fenêtre pourrait être mise à contribution pour justifier son élargissement. Le Président n’ignore pas l’état de santé de son ex-collaborateur. En octobre 2011, il  l’avait d’ailleurs encouragé à aller subir une opération ophtalmologique à l'hôpital américain de Paris. Offre que Marafa Hamidou Yaya avait du reste poliment refusée.

Trois mois après sa sortie du gouvernement, en décembre 2011, libre désormais des engagements publics, il avait d’ailleurs entrepris des démarches pour se rendre en France, en compagnie de son épouse pour y suivre des traitements appropriés. Après lui avoir accordé un visa, l’ambassadeur de France d’alors, Bruno Gain, lui avait néanmoins suggéré d’informer Paul Biya de ce déplacement. Suivant les conseils du diplomate français, Marafa Hamidou Yaya avait effectivement prévenu le chef de l’Etat à qui il avait indiqué la date de son voyage : le 16 avril 2012.

Mais le 13 avril 2012, contre toute attente, il recevait une convocation du juge d’instruction lui demandant de se présenter trois jours plus tard à son cabinet. On connaît la suite. En dehors des soucis liés à sa vue, Marafa aurait aussi, selon un de ses conseils, des problèmes cardiaques. «Camer.be J’ai connaissance du diagnostic d’un cardiologue réputé qui fait état de ce que M. Marafa a un problème cardiaque et devrait subir des examens et un traitement qui ne sont pas disponibles au Cameroun, et certainement pas dans sa prison», affirmait Kofale-Kale dans notre édition du 20 mars 2014.

Si les partisans de Marafa Hamidou Yaya sont convaincus qu’il ne purgera pas la totalité de sa peine en prison, ils s’inquiètent néanmoins du timing qui pourrait entourer sa libération. «Il a encore un rôle politique de premier plan à jouer. Sa libération, sans la restitution complète de ses droits, n’aurait aucun sens. 

Il doit pouvoir concourir aux échéances électorales, participer à la vie politique de la Nation. Son destin est celui d’être président dans cette République», poursuit un élu du Nord. De quoi requinquer, du fond de sa prison, l’ex tout-puissant ministre d’Etat, ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation.

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