L'Afrique, la Françafrique, le Fcfa et les mots de trop du président Macron.
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L'Afrique, la Françafrique, le Fcfa et les mots de trop du président Macron. :: AFRICA

"Ba nlebel be mbog liyot " (1). Avant le premier tour des élections présidentielles, le candidat Macron avec un air visiblement satisfait déclarait ceci:"C'est un choix qui appartient d'abord aux africains eux-mêmes. Je note avec raison que les gouvernements africains restent attachés, avec raison attachés aux deux zones monétaires".

Devenu président de la république française très peu de temps après, cette fois très énervé, voici ce qu'il nous a servi:"...si on ne se sent pas heureux dans la zone franc, on la quitte et on crée sa propre monnaie...si on y reste, il faut arrêter les déclarations démagogiques faisant du franc CFA le bouc émissaire de vos échecs politiques et économiques, et de la France, la source de vos problèmes".

Comment comprendre cette sortie musclée et épidermique du président français ?

Cette réaction inhabituelle serait-elle une démonstration de l'agacement et de la lassitude devant la pression croissante et de plus en plus insupportable des peuples africains contre la Françafrique et le Fcfa qui empêchent le développement de notre continent?

Cette déclaration porterait-elle une odeur de chantage? Serait-elle aussi simplement un bluff?

L'AGACEMENT ET LA LASSITUDE DU PRÉSIDENT MACRON: DES SIGNES QUI NE TROMPENT PAS...

Une chose est certaine, la Françafrique va mal: il existe un sérieux malaise, un grand malaise qui devient insupportable pour la France qui a toujours plongé dans les réserves monétaires de l' Afrique sans que personne ne bronche, elle s'est toujours servie sans bruit ni résistance aucune. Dans ce contexte de crise financière mondiale interminable, avec les nécessités et les diverses exigences monétaires qui augmentent de plus en plus, il paraît difficile pour une France qui veut s'imposer en maître souverain, de comprendre, et même d'accepter que l'Afrique, est elle-aussi en train de changer et d'évoluer.
Des voix africaines s'élèvent, la mobilisation de la jeunesse africaine augmente progressivement un peu partout dans le continent, il devient donc de plus en difficile pour la France d'expliquer convenablement pourquoi c'est elle qui garde encore, et qui décide toujours dans sa Banque en France, des ressources financières des états africains, pourtant devenus "indépendants" depuis plusieurs décennies.

UNE MONNAIE PAS COMME LES AUTRES, PARCE QU' IMPOSÉE DANS LE SANG ISSU DU CONTENTIEUX HISTORIQUE FRANCO-AFRICAIN.

Bien que créé unilatéralement le 26 Décembre 1945 par le général De Gaulle, avec pour but principal, l'instauration de l'autorité monétaire française, afin de mieux servir les intérêts de la France, avec le temps, il a fallu beaucoup de sang pour l'imposer dans le continent, tel que le Fcfa nous apparaît aujourd'hui : lorsqu'un centrafricain a un billet de Fcfa dans les mains, il devrait penser à Barthélemy Boganda. Lorsque c'est un togolais, sa pensée devrait aller au président Sylvanus Olimpio, quant à un camerounais ça devrait être Um Nyobe et Félix Moumie et ainsi de suite. 
Le Fcfa devrait rappeler aux africains, les rivières de sang versés par les patriotes africains.

Le Fcfa n'est donc pas une monnaie normale comme toutes les autres, il apparaît comme l'une des matérialisations de la défaite des patriotes africains, dans leur lutte pour une véritable Indépendance de notre continent, c'est aussi l'un des symboles les plus visibles de notre servitude monétaire, de notre tutelle politique et financière liée au contentieux historique franco-africain.
Mais il faudrait ajouter que dans sa composition, et surtout dans son contenu, cette monnaie a toujours été exclusivement africaine, puisque son émission et son fonctionnement ont  toujours été uniquement dépendants des réserves financières africaines, la France n'y ayant jamais mis aucun moyen financier. 

Le Fcfa est donc une propriété africaine.

Ce qui voudrait dire,contrairement à ce qu'a affirmé le président Macron : c'est à la France de quitter unilatéralement le Fcfa, en enlevant ses mains et en remettant aux africains, toutes les réserves monétaires africaines qui se trouvent dans la Banque de France, où elles n'auraient jamais dû entrer.
Ce ne serait d'ailleurs qu'une question de "Bon Sens, de Justice et non de générosité", comme l'a bien admis l'ancien président français Jacques Chirac, en affirmant que la grande partie de la monnaie qui circule en France, provient de l' exploitation pendant des siècles de l'Afrique.
L'actuel édifice Fcfa changera de dénomination et de localisation, ses différentes structures organisationnelles et fonctionnelles, serviront demain à l'édification d'une Afrique Nouvelle, Forte, Unie, Indépendante et Souveraine.

UNE RÉALITÉ MALSAINE, NAUSÉABONDE ET IMMORALE.

Deux poids,deux mesures...lorsqu'il s'agit de l'Afrique et des africains, il n'y a plus d'éthique ni de morale car tout est permis, puisque les normes, les règles et les principes changent.
Le très célèbre Victor Hugo, l'un des plus grands écrivains français de tous les temps a d'ailleurs montré la voie en affirmant que c'est l'homme Blanc qui a transformé l'africain en un homme au 19 eme siècle, puisque l'Afrique n'est que barbarie et sauvagerie, qu'elle n'a pas son histoire et n'a jamais appartenu à personne, qu'elle devrait servir à résoudre les problèmes sociaux des occidentaux en transformant les prolétaires occidentaux en propriétaires.( 2 )

On l'a vu, il n'y a pas longtemps, lorsque le même Occident, qui venait de survivre de la barbarie nazie soutenait, assistait, faisait du commerce, et coopérait militairement avec le régime de l'Apartheid sud-africain...même des survivants de l'holocauste se rendaient paisiblement dans ce pays.

C'est grâce aux sacrifices inouïs des africains eux-mêmes, les angolais aidés par les cubains et les russes, que l'Afrique s'est débarrassée de l'Apartheid en infligeant une défaite historique aux troupes militaires racistes sud-africaines dans la bataille de Cuito Cuanavale. C'est alors que l'Occident s'est réveillé et a réalisé que le "terroriste" Nelson Mandela avait passé 27 années dans les geôles de l'Apartheid. ( 3 )

Aujourd'hui les africains crient haut et fort qu'ils ne veulent plus de la Françafrique et du Fcfa. Des présidents africains le disent...mais pour le président Macron, la source des problèmes de l'Afrique est dans la fertilité de la femme africaine, non du pillage de notre continent par l'Occident. Où est le problème, si nous aimons nos femmes africaines? Dans une Afrique sous-peuplée et presque vide, où est le problème si nous voulons faire, si nous sommes capables de faire des enfants en Afrique ? Une Afrique souveraine n'a pas besoin de l'aide extérieure pour se développer!

Alors qu'il est inimaginable un seul instant pour la chancelière Angela Merkel, que la Deutsche Bank soit installée à Paris, alors qu'il est inadmissible pour le président Macron, que la Banque de France s'installe à Madrid ou à Lisbonne, Macron ne veut pas comprendre que les africains veulent leurs Banques Centrales en Afrique. 

Le président Macron fait semblant de ne pas comprendre ces exigences africaines, il hausse le ton en faisant du chantage essentiellement aux élites dirigeantes africaines, porteuses de passeports français avec des intérêts et des propriétés en France, car même étant minoritaires dans le continent, elles ont une grande capacité de nuisance, car ce sont elles qui trahissent cette Afrique qu'elles n'aiment pas, tout en raffolant de ses richesses. 

La France leur montre d'ailleurs un exemple de ce dont elle est capable, avec le procès du Vice-président équato-guinéen...
Cette incapacité de la classe dirigeante française, de comprendre que les africains eux-aussi, comme tous les autres humains, ont le DROIT et la CAPACITÉ de se gérer eux-mêmes politiquement, financièrement...commence à poser de sérieux problèmes, elle devient une insulte à l'intelligence africaine, car la Françafrique est un Apartheid...

La lutte pour la libération de la Françafrique et du Fcfa ne sera pas facile. 

L'ancien président Nicolas Sarkozy a d'ailleurs annoncé la couleur en affirmant :"...il est hors de question de laisser les anciennes colonies françaises posséder leurs propres monnaies...la meilleure voie de préserver la bonne santé de l'économie française est de maintenir le Fcfa comme monnaie unique dans ces pays, si ces pays ont un contrôle total de leurs banques centrales, ce sera une catastrophe pour le Trésor français, ce qui fera de la France, la vingtième puissance économique mondiale...".
Avec 2935 milliards de dollars, la France occupe actuellement la sixième place mondiale après la Grande Bretagne. La vingtième place est occupée par la Suisse avec 680 milliards de dollars, il y aurait donc un manque à gagner de 2255 milliards entre ces deux pays, qui proviendrait des manœuvres liées au Fcfa...

LE PRÉSIDENT IDRISS DEBY ITNO, UN PERSONNAGE SINGULIER, QUI IRRITE LA FRANÇAFRIQUE.

" Jam li mut, u tehe, u kal". ( 4 )
Les présidents  Alassane Ouattara, Paul Biya, Idriss Deby...sont tous des créatures de la Françafrique, mais le président  Idriss Deby Itno n'est pas Ouattara, ni Biya. 
Il nous montre qu'il n'est jamais trop tard pour bien faire !
Deby dit à Ouattara et à Biya: " Ibale u yi be, u benge i pan yon".(5)

Non seulement depuis un certain temps, le président tchadien Deby fait savoir au monde entier qu'il ne peut pas avoir de développement de l'Afrique avec ce Fcfa et la Françafrique, mais il est passé à tout autre niveau dans l'émission "Internationales" de TV5 Monde et RFI du 25 Juin 2017, en pointant du doigt la France et l'Occident, dans l'exacerbation du terrorisme en Afrique, avec la chute du régime lybien et l'assassinat du colonel Khadafi, en ajoutant trois affirmations qui ne sont en réalité que des aveux et des confirmations:

1- Première révélation-confirmation: cette France qui a organisé à Paris l'offensive panafricaine tous azimuts contre la secte islamiste Boko Haram, n'a pas encore mis un seul Fcfa dans cette guerre. 
Pour le moment, c'est le Tchad et ses frères nigérians, nigériens et camerounais qui se débrouillent seuls, sans l'aide financière française et occidentale.
L'argent étant le nerf de la guerre, la France se retrouve ainsi toute nue, après la gesticulation parisienne du président Hollande...
Une question légitime devrait être posée : que font alors les troupes occidentales ( françaises et américaines) dans cette région ? La lutte contre le terrorisme serait-elle un alibi pour renforcer les présences militaires occidentales, qui cacherait les velléités de ré colonisation de notre continent? ( 3 )

2- La deuxième révélation-confirmation est dans cette affirmation du président Deby : "...c'est toujours la France qui fait, c'est toujours la France qui critique, c'est toujours la France qui est derrière...". 
Pour la première fois dans notre continent, un président en fonctions, dénonce  ouvertement la France en affirmant clairement qu'elle est derrière tous les changements de constitution et les tripatouillages des élections en Afrique dite  "francophone". 
Le président Deby révèle comment contre sa volonté, la France a changé la constitution du Tchad en 2006. 
Ce qui rappelle très bien ce qu'a fait le président français Mitterand au Cameroun en 1992, lorsqu'il a dicté au président Biya qui avait perdu les élections, de se maintenir au pouvoir.

3- Troisième révélation-confirmation : Les dirigeants africains "anglophones" et "lusophones" sont unanimes : La Françafrique est un obstacle majeur pour le développement, non seulement de l'Afrique dite "francophone", mais de tout le continent africain. ( 3 ).

Voici tout ce qui a irrité le président Macron et l'a amené à parler des échecs politiques et économiques des dirigeants africains au sommet G5 de Bamako, au Mali.
La vérité c'est que l'Afrique ne veut plus de la Françafrique, puisque la France est la source de nos problèmes. Quant à l'incompétence des dirigeants africains, c'est une affaire de compétence entièrement africaine, mais le linge sale se lave en famille...encore que, lorsque les populations burkinabés ont voulu exiger des comptes au président Compaore, c'est cette même France qui critique, qui l'a mis hors du Burkina Faso.

LE MAUVAIS CHOIX DE LA FRANCE.

On aurait souhaité une issue pacifique à la Françafrique, mais visiblement la France a choisi la bagarre, qui hypothèquerait durablement les relations franco-africaines.
Comme Hier dans sa lutte contre l'Apartheid, la Jeunesse africaine doit se mobiliser non seulement dans les pays dits "francophones", mais devra militer pour cette cause, dans TOUT notre continent.
La lutte contre la Françafrique doit aussi être faite dans l'Union Africaine, car cette France ne lâchera pas facilement. Nous l'avons déjà vécu avec nos pseudo-indépendances des années 60,où ne voulant pas de nos Indépendances, acculée par les pressions internes et internationales, elle a quand même réussi, en profitant du début de la Guerre Froide, à nous imposer cette Françafrique qui nous suffoque aujourd'hui.

Aux présidents africains de continuer cette lutte en mobilisant la Jeunesse et les populations africaines, les seuls véritables garants de leur sécurité. 

Que les présidents africains qui ont pris position contre la Françafrique comprennent une fois pour toutes, que l'unique voie de succès pour eux et pour l'Afrique, est dans la continuité de ce noble combat, et que l'on ne tergiverse pas avec la très rancunière France néocolonialiste et ses réseaux, puisque des motifs seront trouvés pour les trimballer dans la Cour Pénale Internationale...
Seule une forte mobilisation des peuples africains sera à mesure de faire que le grand peuple de France oblige l'Etat prédateur assassin français, à mettre le contentieux historique franco-africain sur la table de négociations avec les peuples africains.

Pour un Audit International en vue de la récupération des fonds "perdus" par les pays africains par le biais du Fcfa! (3)
Pour une solution pacifique du contentieux historique franco-africain!
Pour une véritable relation de Liberté, de Fraternité et d'Egalité entre les peuples d'Afrique et de France!

(1)  Un proverbe Bassa sur la colère : On ne jette pas le Mbok par emportement, la colère est mauvaise conseillère,elle peut conduire sa victime au drame ou à perdre l'essentiel. Dans le livre "Proverbes Basaa du Cameroun"  de l'Association pour les cultures vivantes et la précieuse nature CUVIPREN page 35 éditions L'Harmattan 2014.
(2) Victor Hugo: Allocution sur l'Afrique lors du banquet commémoratif de l'abolition de l'esclavage qu'il présidait le dimanche 18 Mai 1879.
(3) Daniel Yagnye Tom dans le livre: "Le contentieux historique franco-africain, cas du Cameroun, RCA, Togo, Gabon, Tchad..." Éditions Amazone.
(4) Une expression en langue Bassa : " la chose de quelqu'un, tu vois, tu parles".
(5) Un dicton en langue Bassa:"Si tu ne sais pas faire, regarde ce que fait ton voisin".

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