RUBEN UM NYOBÉ: LE PÈRE DU NATIONALISME AU CAMEROUN
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Ruben Um Nyobé: Le Père Du Nationalisme Au Cameroun :: Cameroon

La manipulation du fait ethnique est un héritage colonial dont l’ère Biya en a fait tout un programme national de division visant à s’éterniser au pouvoir.

Jadis, pour asseoir et assurer sa domination, le pouvoir colonial avait accentué les différences entre certaines des 300 ethnies que compte le pays. Les colons Français avaient joué sur ce registre au moment de leur lutte contre l’UPC du Um Nyobé, accusant ce parti politique nationaliste de « détribalisateur », c’est-à-dire de ne pas respecter les identités ethniques. « Nous ne sommes pas des “détribalisateurs”, comme d’aucuns le prétendent. Nous reconnaissons la valeur historique des ethnies de notre peuple. (...) Mais nous n’avons pas le droit de nous servir de l’existence des ethnies comme moyens de luttes politiques ou de conflits de personnes », avait répondu Um Nyobè en 1957, insistant sur la nécessité de « rompre avec un tribalisme périmé et un régionalisme rétrograde qui, à l’heure actuelle comme dans l’avenir, représentent un réel danger pour la promotion et l’épanouissement de cette nation camerounaise. »

Le régime de Paul Biya par la loi sur la décentralisation en introduisant la notion d'«autochtonie», réitère de la manière la plus déterminé, son intention de déconstruire ce projet d'État-Nation voulu par les pères fondateurs du pays comme Un Nyobe. En effet, l'article 246 stipule que tout candidat à la fonction de maire de ville doit être un autochtone de la région de rattachement à la ville en question. Cette loi est purement et simplement rétrograde et indigne du temps moderne où l'on voit de plus en plus des camerounais maires des villes occidentales.

La politique de Paul Biya est à l’opposé de la perspective d’unité nationale énoncée par Amadou Ahidjo lors du congrès de l’Union Camerounaise en juillet 1962. Il a dit dans son discours que « l’unité nationale veut dire qu’il n’y a sur le chantier de la construction nationale ni Ewondo, ni Douala, ni Bamiléké, ni Boulou, ni Foulbe, ni Bassa, etc…, mais partout et toujours des Camerounais ». Le président du conseil régional est une personnalité autochtone, précise la révision de loi de Paul Biya de 1996. Mais cette loi n’explique pas pourquoi les allogènes iront voter, puisqu’ils ne sont pas concernés.

Alors qu’en 1884, les rois douala ont signé avec les Allemands un traité dans lequel ils abandonnent « totalement aujourd’hui leurs droits concernant la souveraineté, la législation et l’administration de leur territoire ». Voici donc que le 4 septembre 2020 oubliant qu’ils avaient renoncé à leur dignité devant les allemands, ils se désignent sous l’impulsion des lois de divisions de Paul Biya « le peuple autochtone » et sortent manifester leur colère contre un arrêté préfectoral qui fait de Camille Amadou Tanko, soi-disant « un allogène », originaire du Septentrion, chef du quartier Besseke à Douala. Ce qui est curieux est que Mr Tanko remplace son défunt père qui occupait la même fonction depuis des décennies sans qu’il n’y ait aucune contestation.

Où va donc ce pays pour lequel Un Nyobe a versé son sang ? Pour rappel, Il a été tué par les colons Français le 13 septembre 1958 et son corps traîné dans toute la ville pour enlever toute envie de contestation ou de revendication à la population mais aujourd’hui Um Nyobe est plus que jamais la source d’inspiration de nombreux camerounais.

* Annette NTIGNOI est auteure de l'essai intitulé: LA DIASPORA M'A TUER
Un chef d'Etat assigné à domicile

Cet essai est disponible en librairie et sur ce lien

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