Hubert Mono Ndzana : “Il ne peut ne pas être fatigué à 83 ans”
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Le philosophe donne son avis sur les motions de soutien qui appellent Paul Biya à briguer un autre mandat.

Des voix s’élèvent depuis quelque temps pour solliciter la candidature de Paul Biya à la présidentielle de 2018. Comment comprendre ces appels ?
Ces appels relèvent d’une culture démocratique traditionnelle. Chaque mouvement politique se mobilise pour positionner le candidat de son choix, l’encourager à se positionner en tant que candidat plus tard. C’est tout à fait normal et cela montre la vitalité de notre démocratie. Un groupe ne saurait empêcher un autre de faire appel à son candidat.  

Peuvent-ils être sincères ou sont-ils simplement une version actualisée des motions de soutien dont on a l’habitude ?
Je pense qu’ils sont sincères parce que vous ne pouvez pas rédiger et mobiliser des signatures si vous n’y croyez pas. Mais ceux qui rédigent le font en fonction de leurs intérêts car, voulant préserver au pouvoir le candidat de leur mouvance. Nous défendons les mêmes intérêts et nous cherchons un champion parmi nous, qui nous sera redevable lorsqu’il sera au pouvoir. Ceux qui sont bien positionnés dans l’appareil du parti ne peuvent pas souhaiter l’arrivée de quelqu’un d’autre, au risque de perdre leurs privilèges. Donc, ils préfèrent la continuité du pouvoir de celui qui s’occupe d’eux. C’est, pour ma part, l’objet de ces appels.

N’est-ce pas un stratagème initié par le président lui-même pour justifier un éventuel nouveau mandat ?
Cela m’étonnerait beaucoup que ces appels viennent de Paul Biya. Connaissant sa tendance aristocratique, je serais surpris qu’il se lance à ces petits jeux. C’est l’oeuvre de ses courtisans, qui sont obligés d’être engagés au regard de leur bon traitement par lui. Je n’ai pas été bien traité par Paul Biya, donc, je ne peux pas me lancer dans ce genre de choses.

Quand il est élu, il accumule les avantages sur un certain nombre de personnes, or, nous avons jeté un seul bulletin dans l’urne pour son élection. La bonne gouvernance souhaiterait que les avantages soient équitablement répartis lorsqu’il est porté au pouvoir. Il ne faut pas qu’il accumule les avantages sur certains en laissant d’autres. Quand on regarde ces appels, on constate que c’est ceux qui ont eu la part du lion qui se mobilisent dans ces appels.

Peut-on envisager un scénario où Paul Biya dit non à ces appels ?
Pourquoi ne pas dire non à ces appels ? Il a beaucoup travaillé, 33 ans au pouvoir, c’est l’âge de Jésus Christ. Un homme ne peut ne pas être fatigué à 83 ans. S’il écoute bien son corps, il doit déjà se sentir usé. Maintenant, si la majorité l’oblige à rester, il ne partira pas. Cependant, je le vois disant non car, à l’heure actuelle, il bénéficie d’un état de grâce parce qu’il a su maintenir la paix dans un continent où certains pays sont ébranlés dans des conflits. Boko Haram qui vient de l’extérieur, est le seul problème auquel fait face Paul Biya. J’avais déjà dit une fois que je souhaitais son départ pour ne pas l’assommer au travail, pour qu’on ne le tue pas avec nos motions. Il faut qu’il se retire parce qu’il a rendu de grands services qui plaident pour ce qu’il se retire dans la gloire, au lieu que des blessures injustes ternissent son image. Moi, je le vois bien dans la médiation internationale, dans la résolution des conflits par la rédaction des mémoires. Son expérience sera édifiante pour les générations montantes. De plus, son cas ferait école. J’ai vu des hommes politiques faire des chutes sur les escaliers. Ce n’est pas un beau spectacle à voir et je ne souhaiterais pas qu’il arrive pareille chose au président de la République.

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