BOKO HARAM : Le Tchad va t-il s’enliser au Nigeria ?
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BOKO HARAM : Le Tchad va t-il s’enliser au Nigeria ? :: CHAD

Face à la résistance des islamistes, Ndjaména vient d’envoyer de nouveaux renforts à Gambarou.

Le 15 février 2015, l’armée tchadienne continuait sa progression vers Baga en bombardant des positions de Boko Haram à Sigal, localité située à 45 km de Fotokol. Il est cependant évident que cette avancée est désormais ralentie par une intense activité des combattants de la secte dans ses arrières qu’il faudra désormais traiter. «C’est une étape prévue dans les opérations militaires qu’il faut traiter avec soin. Le 15 février 2015, le ratissage à Gambarou a permis à notre armée de récupérer du matériel dont trois véhicules land cruiser de l’armée camerounaise, et plusieurs combattants qui essayaient de s’échapper au Cameroun ont été neutralisés par l’armée camerounaise », rassure une source tchadienne.

Un mois à peine après son entrée en territoire Nigérian, des experts s’interrogent déjà sur les chances de succès de l’offensive engagée contre la secte islamiste. Alors qu’elle multiplie les attaques à l’intérieur du Nigeria comme ce fut le cas le 14 février 2015, à Gombé, capitale de l’Etat du même nom, Boko Haram opte pour la ruse face à l’armée tchadienne, donnant le sentiment d’être trop rapidement vaincue et cherchant manifestement à l’endormir. Et l’armée camerounaise avec. D’où le succès de son attaque lancée le 04 février 2015 contre Fotokol par Boko Haram depuis…

Gambarou. «Nous n’étions qu’une quinzaine sur le pont El Beid et nous pensions que les véhicules qui franchissaient le pont appartenaient à l’armée tchadienne, puisqu’elle contrôlait officiellement la ville de Gambarou. Quand il est apparu que c’étaient des pick-up de Boko Haram, il était trop tard, nous étions déjà sous une pluie de balles», raconte un militaire sur zone. Ce jour, une colonne de l’armée tchadienne opérant en territoire nigérian avait été contrainte de rebrousser chemin pour venir en appui aux forces camerounaises et mettre ainsi un terme à l’incursion des combattants de la secte qui s’est soldée par de nombreux morts civils.

L’armée tchadienne avance-t-elle alors trop vite ?

Pour certains en effet, elle pensait rapidement tout balayer sur sa route en direction de Baga, son objectif prioritaire. Désormais, il reste que après l’épisode de Fotokol et les nombreuses escarmouches enregistrées à Gambarou, l’armée tchadienne doit assurer ses arrières. Prendre de son temps pour nettoyer les villes, quitte à avancer à pas de tortue. A moins d’engager plus de troupes dans la bataille. De sources concordantes, plus de 500 militaires tchadiens sont arrivés dans la journée du 13 février 2015 à Gambarou pour procéder à des opérations de nettoyage qui se poursuivaient encore au moment où nous allons sous presse.

A cette vague, s’ajoute celle de 80 hommes positionnés à Fotokol et arrivés le lendemain de l’attaque du 4 février 2015. «L’armée tchadienne ne doit surtout pas s’enliser dans une opération de pacification, car le Nigeria a perdu trop de villes sur le corridor qui doit le conduire jusqu’à Baga, et qu’il lui sera difficile dans ces conditions de concilier efficacement offensive et pacification», explique un analyste militaire. D’où l’urgence de l’accélération de la mise en place de la force multinationale de 8700 hommes dont le déploiement devrait soulager le Tchad, seul pays actuellement sur le front de l’offensive militaire contre Boko Haram. Et même, de nombreuses voix s’élèvent déjà sur la composition de cette force. «Cette force doit créer un environnement sûr et sécurisé dans les régions affectées par les activités de Boko Haram et d'autres groupes terroristes.

Seulement, pour atteindre cet objectif, il faut que les pays injectent dans cette coalition des forces capables de se projeter vers l’avant. C’est là où se trouve toute mon inquiétude. Si l’on prend simplement le cas du Nigeria qui doit contribuer à hauteur de 3.250 hommes, où ce pays va-t-il puiser de si bons soldats en peu de temps alors même qu’il n’arrive déjà pas à faire face à la situation tous les jours ? En dehors du Nigeria, je porte de sérieuses réserves sur la capacité d’autres pays à jeter dans le panier de troupes bien formés et aguerris. La force multinationale est une partie de la solution, ce n’est pas toute la solution. Il faut couper l’approvisionnement, couper les sources de financement», affirme une source camerounaise proche du dossier.

Toutefois, en attendant que  les conditions soient réunies, le Tchad se doit de bien manoeuvrer pour éviter de porter seul en territoire nigérian, le fardeau de la guerre. «La guerre sera longue contre un ennemi qui connaît parfaitement le terrain et dont les sources de financement et les voies d’approvisionnement sont encore plus ou moins intacts. Mais plus vite les pays impliqués se mettront à niveau, mieux les choses iront. La grosse inconnue reste cependant le Nigeria, car le Cameroun et le Niger, comme le Tchad sont décidés à en finir avec les agissements de la secte. Hélas, pour leur malheur, l’épicentre du problème se trouve au Nigeria», explique Hissène Mahamat, opérateur économique à Kousseri.

© L’Oeil du Sahel : GUIBAÏ GATAMA

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