Cameroun, A lire: Um Nyobè, le combat interrompu
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Cameroun, A Lire: Um Nyobè, Le Combat Interrompu :: Cameroon

Um Nyobè se battait dans des conditions extrêmement difficiles. S’il était parvenu à libérer le Cameroun de la domination coloniale, il aurait, bien vite, été l’objet d’un coup d’Etat orchestré par Jacques Foccart, le Secrétaire Général aux affaires africaines de Charles de Gaulle, ainsi qu’en a été victime Sylvanus Olympio au Togo, ou d’un assassinat, comme Barthélemy Boganda, en Oubangui-Chari (Centrafrique), ou Patrice Lumumba au Congo.

(…)

Ahmed Sékou Touré, en Guinée Conakry, est parvenu à sortir son pays du colonialisme français, en faisant, lors du referendum du 28 septembre 1958 sur la Communauté, que proposait aux Africains Charles de Gaulle, voter le « Non » par la Guinée. Aussitôt, il a obtenu l’indépendance de son pays, évitant à celui-ci que ne s’y instaure pas un régime néocolonial.

Toutefois, si Ahmed Sékou Touré est parvenu à affronter, victorieusement, le gouvernement français, c’est bien parce que, à la différence de Ruben Um Nyobè, il jouissait des atouts suivants : 1/- il était un parlementaire, à savoir, député à l’Assemblée Nationale à Paris ; 2/- il était Premier ministre de la Guinée ; 3/- le Parti Démocratique de Guinée, PDG, jouissait d’une implantation nationale, bien mieux, il contrôlait politiquement et quasiment sans partage, la Guinée.

Ruben Um Nyobè, pour ce qui le concerne, traînait avec lui de nombreux handicaps. Le Haut-commissaire André Soucadaux, était parvenu à lui fermer systématiquement l’entrée à quelque assemblée élective que ce soit, par la fraude électorale. Il avait fait battre Ruben Um Nyobè aux deux élections auxquelles il s’était porté candidat : Assemblée Nationale à Paris, en 1951, et Assemblée Territoriale du Cameroun, ATCAM, à Yaoundé, en 1952. Il le plaçait ainsi dans une situation à la fois paradoxale et difficile. D’un côté, il jouissait d’une extrême popularité dans le Sud du Cameroun, plus particulièrement dans la région de Douala et en pays Bassaa, mais d’un autre, il n’était doté d’aucun statut politique, excepté celui de secrétaire général d’un parti politique, qui, somme toute, était dérisoire, face à des élus siégeant à l’Assemblée Nationale à Paris, par exemple. Ce handicap était colossal. Toutes les fois où il se rendait à l’ONU pour défendre la cause du Cameroun devant la 4ème Commission, il se retrouvait obligé de citer la liste

d’associations au nom desquelles il s’exprimait, afin de prouver sa crédibilité et sa représentativité. C’est ainsi que lors de son voyage à l’ONU au mois de décembre 1953, c’est-à-dire le second, il avait obtenu de l’Union Nationale des Etudiants du Kamerun, UNEK, lors de son transit à Paris, un mandat pour s’exprimer en son nom. Lors de sa première audition le 17 décembre 1952, Louis Paul Aujoulat, président de l’ATCAM, et les deux obligés et protégés de l’administration coloniale qui l’accompagnaient et dont le voyage avait été financé par les autorités françaises, à savoir Alexandre Douala Manga Bell et Charles Guy René Okala, avaient eu beau jeu de contester sa représentativité devant la 4ème commission, en arguant que, à leur différence, il venait de se faire battre copieusement aux élections du mois de mars 1952 dans son propre fief électoral c’est-à-dire en Sanaga-Maritime, et que, à ce titre, il était un individu sans représentativité politique aucune.

Ruben Um Nyobè, à la différence d’Ahmed Sékou Touré, traînait également un second handicap. La majorité des fonctionnaires camerounais de l’administration coloniale étaient plutôt indifférents à son discours. La raison ? Ils se sentaient déjà un peu des « Blancs », par le fait qu’ils se situaient, dans la hiérarchie de la société coloniale, au-dessus des autres Noirs, et immédiatement en dessous des Blancs. (…)

Troisième grand handicap que traînait Ruben Um Nyobè, le handicap religieux. Dans le Sud du pays, seules les églises protestantes lui apportaient plus ou moins leur soutien. Lui-même, du reste, était membre de la Mission Protestante Américaine MPA, au Cameroun, devenue Eglise Presbytérienne Camerounaise, EPC, en 1957. L’église catholique, en revanche, dominée par les Français, le combattait vigoureusement. Il en était de même pour les musulmans du Cameroun. Ils voyaient en lui un dangereux mécréant mangeur de porc qui, en plus, venait leur demander, ô ineptie ! de chasser les Blancs du pays.

(…) Nous l’avons dit plus haut, Ruben Um Nyobè serait parvenu à empêcher l’installation du néo-colonialisme au Cameroun, qu’il aurait été victime d’un coup d’Etat ou d’un assassinat. Tout d’abord, il n’existait pas, véritablement, de force militaire camerounaise qui aurait pu le protéger et empêcher la France de le faire. Ce pays aurait bien vite déniché un Etienne Eyadema, ou un Jean-Bedel Bokassa, c’est-à-dire un ancien soldat français de nationalité camerounaise, pour le faire. Des anciens combattants, ou de jeunes officiers camerounais formés dans des écoles militaires en France, il en existait un grand nombre au Cameroun, en 1960. Même au Congo, on a vu comment, malgré l’envoi de troupes ghanéennes par Kwamé Nkrumah pour assurer la protection de Patrice Lumumba, ce dernier a été assassiné par Joseph Désiré Mobutu, commandité par les Belges et les Américains. Qu’est-ce qui allait protéger Ruben Um Nyobè devenu président de la République ?

A supposer qu’il n’aurait pas succombé à un coup d’Etat, il aurait, en revanche, pu mourir d’un accident d’avion comme Barthélemy Boganda en Oubangui-Chari, actuelle République centrafricaine, orchestré par les colons

français du Cameroun : Monilatti, Robert Coron, Coulouma, Guerpillon, Desuarez, etc. Pour tout dire, Ruben Um Nyobè, cela ne fait l’ombre d’aucun doute, était condamné d’avance (…).

Sommaire

Introduction……………………………………………………………………

Chapitre I : L’assassinat de Ruben Um Nyobè

A – L’assassinat selon Georges Chaffard ………………………......

B – L’assassinat selon l’opinion publique bassaa……………….

Chapitre II : Um mort : mise en place du néo-colonialisme

A – Les critères du choix du 1er président camerounais……..

B – Mbida, Soppo Priso, Njoya Arouna réfractaires : Ahmadou Ahidjo consentant ………………..

Chapitre III : Les conséquences immédiates de l’instauration du néo-colonialisme au Cameroun

A – L’éradication du bel esprit patriotique des années 1950……………………………

B – L’introduction de l’esprit tribaliste au Cameroun………..

Chapitre IV : Le maintien du Cameroun dans le sous-développement

A – la planification du pacte colonial ……………………………….

B – Le scandale du pétrole camerounais ………………………….

Chapitre V : Um Nyobè aurait-il pu réussir son combat ?

A – Um n’était pas Ahmed Sékou Touré …………………………..

B – Um comme Boganda, Lumumba, Olympio …………………

Chapitre VI : Les tentatives de reprise du combat après Um

A – Les différents maquis des Camerounais ……………………..

B – La lutte dans la clandestinité ………………………………………

Chapitre VII : L’indépendance toujours d’actualité

A – Pouvoir à Yaoundé : décision à Paris ………....................

B – Refonder la relation France-Cameroun ……………………… 7 8 9 12 15 16 20 29 29 32 41 41 44 50 50 54 55 56 57 62 64 71

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