Selon Atangana Mebara… : Paul Biya est accro au pouvoir
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Dans un livre à paraitre bientôt aux éditions l’Harmattan, l’ancien secrétaire général de la présidence de la République, aujourd’hui incarcéré « détournements de deniers publics », raconte ses années passées en qualité d’assistant du chef de l’Etat. Il en ressort une image du chef de l’Etat méconnue de ses concitoyens. Un homme « jaloux de son pouvoir ».

Dans la conduite de la Cité, la chronique populaire et mondaine, dit le président Paul Biya très inspiré par « Le Prince » de Machiavel. Ce n’est pas tout à fait l’avis de Jean-Marie Atangana Mebara, ministre d’Etat, ancien secrétaire général de la présidence de la République (Sg/Pr) de 2002 à 2006, et aujourd’hui embastillé à la prison centrale de Yaoundé Kondengui.

Pour cet ancien proche collaborateur de Paul Biya, le chef de l’Etat serait plutôt un adepte d’un autre auteur, théoricien pragmatique du pouvoir : « je dirais simplement que c’est quelqu’un [Paul Biya] qui a certainement beaucoup lu le Bréviaire du Cardinal Mazarin », dixit Jean Marie Atangana Mebara, dans « Le secrétaire général de la présidence de la République ; entre mythes, textes et réalité », le nouveau livre de ce célèbre détenu des geôles du pouvoir de Yaoundé.

Pour Jean-Marie Atangana Mebara, Paul Biya a fait sienne la philosophie de ce prélat italien d’origine, naturalisé français, et dont l’opuscule « est rempli de conseil pratiques à l’intention de ceux qui veulent accéder au pouvoir, ou qui, ayant accédé au pouvoir, entendent le conserver ». L’ancien ministre pense que le président Paul Biya suit scrupuleusement cinq préceptes de Mazarin : « simule, dissimule, ne te fie à personne, dis du bien de tout le monde, prévois avant d’agir ».

Jean-Marie Atangana Mebara, dans ce livre de 326 pages, dont la première partie est une brève histoire du secrétariat général et des secrétaires généraux de la présidence de 1960 à 2012, et la seconde partie prend la forme d’une interview qui n’est en fait, d’après l’auteur qu’un « dialogue avec moi et moi-même », à la façon de la « doxa », déjà utilisée par de grands auteurs tels Socrate, ou Platon, l’auteur souligne ce goût prononcé du chef de l’Etat pour le pouvoir.

« Je crois avoir découvert que c’est quelqu’un qui est jaloux de son pouvoir, celui que lui reconnaît la Constitution. Il ne comprenait pas que certains membres du gouvernement ignorent la nature du régime, c’est-à-dire, présidentiel », écrit cet ancien ministre de l’Enseignement supérieur. En 2008, le président Paul Biya est à l’origine d’une modification constitutionnelle qui fait sauter le verrou d’une limitation de mandat. Cela lui permettait ainsi d’être candidat à la présidentielle autant de fois qu’il le souhaitait.

Pas de dauphin

Plus loin, l’ancien Sg/pr va également reconnaître que « le président Biya est un homme de pouvoir, qui sait s’organiser pour préserver son pouvoir ». Jean-Marie Atangana Mebara révèle que le chef de l’Etat « veille particulièrement à être toujours bien informé », appliquant de fait un autre précepte de Mazarin : « tu dois avoir des informations sur tout le monde, ne confier tes propres secrets à personne, mais mettre toute ta persévérance à découvrir ceux des autres.

Pour cela espionne tout le monde, et de toutes les manières possibles ». Cependant, l’ancien proche collaborateur du président Paul Biya qui, depuis son incarcération en 2008, fait face à une procédure judiciaire-tiroir, se défend de toute accusation d’espionnage du chef de l’Etat envers ses collaborateurs : « je ne prétends pas qu’il ‘ espionne’ ses collaborateurs ; mais je peux vous assurer qu’il était au courant de beaucoup de choses de la vie de ses principaux collaborateurs ».

Pour ce qui est de son successeur, Jean-Marie Atangana Mebara, qui fut également ministre des Relations extérieures après ses années en tant que Sg/pr, avoue que le président Paul Biya a toujours rejeté l’idée d’un « dauphin ». « Le président Biya ne m’a jamais promis de me confier le pouvoir un jour, raconte-t-il à la page 47, avant de poursuivre, je l’ai plutôt entendu dire que s’il disait aujourd’hui, de manière plus ou moins claire ou même déguisée, que le choix de son successeur a été porté sur telle ou telle personnalité, qu’il imaginait les ligues qui allaient se constituer pour détruire ce « dauphin désigné ». Le chef de l’Etat lui aurait également confié, à propos de sa propre succession, « le moment venu, si [son] parti lui faisait toujours confiance, il recommanderait la personne qui pourrait être le candidat du parti ». Et cette mise en garde de celui qui dit avoir bénéficié de la confiance et du soutien du chef de l’Etat : « penser que le président Biya peut dire à quelqu’un qu’il lui confierait le pouvoir un jour, serait vraiment le méconnaître » …

Joueur de « Songo »

« Le secrétaire général de la présidence de la République ; entre mythes, textes et réalité », est le deuxième livre de Jean-Marie Atangana Mebara, après « Lettres d’ailleurs », toujours écrit derrière les barreaux. La préface de cet opuscule est d’Eric Chinje, ancien journaliste à la Crtv. Dans ce livre également, riche en anecdotes qui révèlent les arcanes et les intrigues du pouvoir de Yaoundé, l’auteur a choisi de ne pas « balancer » sur ses anciens collègues du gouvernement. Il apporte par ailleurs sa version du « G11 », de même que son rôle dans l’acquisition foireuse d’un jet pour les déplacements du chef de l’Etat. Dossier qui lui vaut d’être aujourd’hui poursuivi en Justice. Le livre ne tarit pas d’éloges envers le chef de l’Etat, il révèle que Paul Biya est un « gros travailleur », qui ne passe pas son temps à jouer au «Songo». Voici ce qu’il écrit à ce sujet page 237 : « conséquemment, cela m’amusait toujours d’entendre dire que le président était un homme paresseux, qui passait son temps à jouer au « songo » (jeu traditionnel chez certains groupes bantous). D’ailleurs je le lui ai dit un jour, que les gens disent qu’il passe son temps à jouer et à se reposer. Il m’a alors révélé qu’il ne savait même pas jouer à ce jeu du songo»…

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