Pour 500 000 FCFA, la Sogelait ferme ses portes
CAMEROUN :: ECONOMIE

CAMEROUN :: Pour 500 000 FCFA, la Sogelait ferme ses portes :: CAMEROON

Un contentieux né du défaut de paiement de cette somme au service des impôts a fini par avoir raison de la volonté des travailleurs à poursuivre leur carrière au sein de cette entreprise.

«Ils ne l’ont pas abandonné. Ils n’avaient simplement pas l’intention de s’établir ici. Leur objectif était de lancer le projet et de le laisser entre les mains de l’Etat ou des particuliers qui pouvaient en assurer la continuité. La Sogelait avait 55% des actions, la Fédération des unions des GIC des producteurs laitiers de l’Adamaoua (Fékossam) en avait 35 % et l’Etat 10 %. L’Etat devait jouer un rôle important dans ce projet », déclare une source à la délégation régionale de l’Elevage, des Pêches et des Industries animales de l’Adamaoua que nous avons rencontrée ce mardi 20 septembre 2016 dans le cadre de cette enquête sur les flops des projets de développement dans la région de l’Adamaoua.

Notre interlocuteur est très remonté contre James Onobiono, le président du conseil d’administration (PCA) de la Sogelait. « Ce projet a été victime d’un mauvais management de la part de ses responsables et surtout de ce personnage qui ne peut pas avoir l’excuse de ne pas maîtriser le management des entreprises. Il n’est pas imaginable que ce n’est que pour 500.000 FCFA que les impôts avaient apposé des scellés sur les locaux de la Sogelait.

Une véritable honte non seulement pour ces gestionnaires mais aussi pour le Cameroun qui prend un coup dans la promotion de son image », précise notre source dont les propos sont confirmés par le centre régional des impôts de l’Adamaoua à Ngaoundéré. C’est la pose de scellés qui avait alors sonné le glas de la Sogelait.

Un patrimoine en ruine

Manwi est dans ce village du département de la Vina, région de l’Adamaoua, situé à une dizaine de kilomètres sur la nationale N°1 qui relie Ngaoundéré à Garoua. C’est là que se dresse, si on peut encore se permettre de le dire, l’immense domaine ayant servi de base au projet laitier de Ngaoundéré. La dizaine de bâtisses qui y avaient été construites sont encore visibles. De loin, l’on a l’impression que le temps n’a pas eu d’effet sur elles. Mais à mesure qu’on s’en approche, l’on constate que le désastre. Maisons d’habitation, bureaux, magasins, champs de fourrager, grange, usine de transformation de lait et garage jadis bien fourni sont aujourd’hui abandonnés. A l’entrée, de gros engins sont encore visibles.

Des tracteurs endommagés, des cars de transport portant encore l’effigie du projet laitier « Kossam ». Pour veiller sur ce patrimoine de l’ancien projet laitier pilote en décrépitude, juste un homme qui a fortement requis l’anonymat, et sa famille. Depuis plus d’une dizaine d’années, c’est à lui que revient cette lourde charge. « Ce matériel n’a pas été utilisé pendant longtemps, les intempéries et les pièces qui ont été emportées ont détruit ces machines de travail», relate le veilleur. Pour ce qui est de l’usine elle-même, le bâtiment a conservé sa splendeur, mais le matériel a été volé.

« Il y a quelques années, des gens venaient avec des mots signés soit du délégué régional de l’Elevage soit des services du gouverneur de l’Adamaoua pour ramasser du matériel. Comme on est loin de Ngaoundéré et que je ne peux pas vérifier l’authenticité de ces documents, je ne pouvais pas refuser surtout que les détenteurs de ces mots maniaient bien menaçaient de me faire partir d’ici en cas de refus de ma part », regrette le gardien de la base de la Sogelait. Conséquence de ce pillage organisé, des gros tuyaux sont visibles de l’extérieur alors que des pièces maîtresses pour leur fonctionnement ont été « volées ». De même que des cuvettes dans lesquelles le lait frais acheté auprès des bergers était conservé.

3 milliards FCFA pour redonner vie à la Sogelait

« Aujourd’hui, ces cuvettes, on les retrouve un peu partout dans les bars laitiers et établissements de commercialisation de lait de la ville. Personne ne vous dira avec exactitude la provenance de ce matériel. Nous avons tenté de les récupérer, mais c’était perdu d’avance, parce que les interventions sont venues de partout pour nous dissuader dans notre démarche», déclare un des responsables de la Fekossam. La désolation se lit sur le visage de l’un de ceux qui assuraient le suivi pour le compte de la Fékossam des activités du projet à travers les 35% de part d’action de cette fédération des producteurs laitiers dans le capital de la Sogelait, et qui a repris le projet après le départ des Canadiens.

Plus de dix ans après la fermeture de cette entreprise, les producteurs de lait de vache qui fournissaient la matière première à la Sogelait sont toujours aux abois parce qu’ils n’ont pas encore pu rembourser les dettes contractées afin d’augmenter leurs productions et honorer leurs commandes. Idem pour leurs employés dont l’horizon d’un avenir radieux s’est brusquement assombri. Pour ce qui est des 400 hectares qui couvrent la superficie du projet laitier, ils sont désormais utilisés par des riverains pour la culture du maïs et du fourrager pour animaux. Mais à la Fékossam, on n’est pas découragé pour autant. L’heure est à la recherche des fonds, environ 3 milliards FCFA, pour redonner vie à la Sogelait même si ce n’est plus sous le même label.

« Il faut absolument que des élites locales reprennent en mains cette entreprise », conseille un riverain, fin connaisseur des méandres de la production du lait et de sa commercialisation. La volonté de reprendre l’affaire bute sur ses « limites financières ». Il ne comprend pas « la cupidité de ces responsables alors que le « Projet laitier pilote » n’était encore qu’à sa phase pilote comme son nom l’indique ».

Lire aussi dans la rubrique ECONOMIE

Les + récents

partenaire

Vidéo de la semaine

évènement

Vidéo


L'actualité en vidéo