Cameroun anglophone : le Parlement européen dénonce "tortures et homicides"
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Cameroun anglophone : le Parlement européen dénonce "tortures et homicides" :: CAMEROON

Aux assassinats répondent des ratissages sanglants de l’armée. Le point de non-retour a été atteint en Ambazonie, la région anglophone du Cameroun où certains réclament l’indépendance. Le Parlement européen a récemment voté une motion condamnant la politique de Yaoundé. Le bilan serait aujourd’hui d’un millier de morts. 500 000 personnes ont été déplacées et 50 000 autres se sont réfugiées au Nigeria.

Le 11 avril 2019, le Parlement européen votait une résolution en 11 points sur la situation politique et sociale au Cameroun. En fait, les reproches faits au pouvoir camerounais portent à la fois sur la situation dans la partie anglophone du pays, les provinces du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, et aussi sur les attaques contre l’opposition nationale.

Sur la situation dans la zone anglophone, les eurodéputés ont déploré "la violence et la discrimination à l’encontre de la communauté anglophone". L’attitude des forces gouvernementales pose question. Le Parlement européen "se déclare particulièrement préoccupé par les allégations selon lesquelles les forces gouvernementales seraient responsables d’homicides, de recours excessif à la force et de tortures". Dans leur vote, les parlementaires demandent au gouvernement de prendre "toutes les mesures nécessaires pour mettre fin à la violence et à l’impunité dans le pays".

Au mois de mars déjà, c’est la diplomatie européenne qui montrait son inquiétude. Federica Mogherini, sa cheffe, déplorait "le nombre inacceptable de victimes et un impact lourd en termes humanitaire et économique".

Indignation à Yaoundé

Des critiques que le pouvoir camerounais n’a pas laissé passer. Marcel Niat Njifenji, le président du Sénat, parle d’une résolution "qui déroule une litanie de contre-vérités" et "d’une campagne de dénigrement". Le président de l’Assemblée nationale, Cavaye Yéguié Djibril, a lui invité une délégation du Parlement européen à se rendre sur le terrain "afin que ses membres puissent juger de l’ampleur des atrocités et de la barbarie perpétrées par des bandes armées au nom des revendications séparatistes".

Même réaction dans les partis politiques de la majorité. Le président du Front pour le salut national du Cameroun (FSNC), Issa Tchiroma Bakary, a condamné l’ingérence européenne dans les affaires intérieures du Cameroun. "L'indulgence de l’Union européenne envers les sécessionnistes auteurs de nombreuses exactions dans les régions anglophones est une atteinte grave à la souveraineté de l’Etat camerounais", a ajouté celui qui fut porte-parole du gouvernement du pays.

Les ONG confortées

En revanche, le Front citoyen du Cameroun, plateforme de la société civile regroupant des associations et des organisations non gouvernementales, soutient le vote du Parlement européen. "La résolution de l’Union européenne va en droite ligne de nos préoccupations déjà exprimées et rendues publiques. Elle ne saurait, de ce fait, être interprétée comme une dénonciation sans fondement", précise la plateforme dans un communiqué.

Sur le terrain, justement, la situation reste très tendue. Les séparatistes lancent un appel à des journées villes mortes le 1er mai pour la fête du travail et le 20 mai pour la fête de l’unité. Les menaces suivent : les sécessionnistes promettent "des conséquences négatives" pour tous ceux qui participeraient aux festivités. Les attentats répondent aux opérations de l’armée avec une sauvagerie rarement atteinte. Un jeune gendarme kidnappé a ainsi été retrouvé décapité et démembré.

Dans ce contexte, la présidente du Cameroon People’s Party, Edith Kah Walla, originaire de la région et opposante au président Biya, a surpris beaucoup de monde en renvoyant dos à dos les belligérants. "Le régime Biya a tué des anglophones sans distinction et a commis toutes sortes d'abominations sur la population. Cela n'enlève rien au fait que ceux qui ont décidé de prendre les armes ont également eu recours à l'intimidation et à la violence dès le premier jour. Cela n'enlève rien au fait que leur choix de prendre les armes a créé une situation catastrophique et intenable pour la population dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest."

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