Le lourd prix des fonctionnaires
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On pourrait raisonnablement se poser la question de savoir si Alamine Ousmane Mey, ministre des Finances de Paul Biya, n’a pas délibérément menti à la Communauté nationale, lorsqu’il déclarait en 2014, que la masse salariale totale de l’Etat est de l’ordre de 650 Mds F. CFA par an.

Cela, au lendemain de la hausse des salaires décidée par le président de la République, au bénéfice de l’ensemble des fonctionnaires et autres agents de l’Etat.

Des chiffres dont on se demande aujourd’hui encore où le ministre les avait pris, quand on les confronte à la réalité de ce qu’est communiqué par l’Administration du Trésor sur les dépenses mensuelle de l’Etat. Tous les mois en effet, ce ne sont pas moins de 85 Mds F. CFA (soit plus de 30 Mds de plus que le taux officiellement avoué) qui sont mobilisés par les pouvoirs publics pour payer les fonctionnaires et agents de l’Etat. 85 milliards mensuels, qui représentent, sur une année, la rondelette somme de 1 020 Mds F. CFA. En clair, sur les 110 Mds F. CFA que l’administration fiscale mobilise en moyenne tous les mois, les 2/3 du  montant vont à ces dépenses alimentaires.

Des chiffres qui ouvrent à toute une série de questions embarrassantes à savoir :

  1. le ministre des Finances connaît-il ces chiffres et si oui, pourquoi ne les  assume-t-il pas publiquement ?
  2. S’il les ignore, comme cela se pourrait-il qu’un gap mensuel de 30 Mds F. CFA lui soit ignoré pendant une aussi longue période ?
  3. Dans tous les cas, qu’est-ce qui pourrait expliquer un tel gap entre le discours public et la réalité : est-il dans le déni, le mensonge le plus cru, ou l’ignorance ?
  4. Comment expliquer ce gap, où vont ces dizaines de milliards qui, chaque mois, disparaissent sans laisser de traces des caisses de l’Etat ? Qui en profite ?

Pourquoi personne n’a jamais été sanctionné pour ce véritable crime économique de longue durée ? Pourquoi ont systématiquement échoué l’ensemble des « opérations » de « nettoyage » engagées successivement par de nombreux ministres – tant des Finances que de la Fonction publique – dans le but de traquer les fonctionnaires « fictifs » ? Comment faire pour – un de ces jours, sait-on jamais – obtenir un peu plus de transparence sur l’affaire du paiement des fonctionnaires ? Il est en tout cas extraordinaire que tel scandale se déroule depuis tant d’années, dans un pays dit moderne, en recherche permanente de concepts et de méthodes innovants pour sa gouvernance publique.

Impossible d’imaginer que l’Etat accepte de « perdre » de son plein gré de telles sommes, sans que cela ne fasse clairement partie d’une stratégie explicite, destinée à siphonner ainsi les ressources publiques pour les redistribuer à des clientèles. C’est bien à cet aucune qu’apparaît comme extrêmement choquante la dernière nomenclature du budget de l’Etat, pour l’année 2017, qui donne par exemple quelques 3,8 Mds F. CFA au ministère de la Culture,  alors qu’il est su de tous que des centaines de milliards disparaissent des caisses de l’Etat, chaque année, sur le seul poste solde des fonctionnaires.

C’est, à la fin, à se demander de qui l’on se moque au juste ! Car, sur les sept dernières années, c’est à pas moins de cinq opérations de débusquage des « faux fonctionnaires » que le gouvernement s’est livré – sans jamais, évidemment, faire l’économie de la première tonitruance. Lesquels – du moins, quelques-uns d’entre elles – ont conduit aux résultats suivants : 7 000 fictifs en février 2001 (sous le passage de René Ze Nguele, qui annonça une suspension immédiate de leurs salaires), 4 000 fonctionnaires véreux en mars 2006 et, en 2016, 3 000 nouveaux fonctionnaires suspendus par l’actuel ministre de la Fonction publique, Ange-Michel Angouing.

En faisant un calcul simple, pas moins de 14 000 fonctionnaires illégaux auraient donc été sortis des fichiers de la paie, sur les six dernières années. Mais pourquoi donc le montant global de la paie des fonctionnaires lui, continue d’augmenter ? Seule conclusion, au passage : le gouvernement du Cameroun, pour sûr, ignore lui-même le nombre de fonctionnaires qu’il emploi. Et, à cette extension, n’a aucune idée de ce qu’il lui en coûte comme effort pour les payer. 

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