Scolarité des enfants : Pour ou contre l’internat ?
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Au moment où leur progéniture entre simultanément dans l’adolescence et dans l’enseignement secondaire, les parents se retrouvent face à un dilemme par rapport à la responsabilité du meilleur suivi dont les enfants ont grand besoin. Faut-il s’en charger en famille ou les placer en internat ? Pour une infime minorité de parents nantis, consacrer des moyens conséquents à l’encadrement en famille de leurs enfants lycéens ou collégiens ne pose a priori pas de problèmes. Du côté de la frange sociale démunie, le poids des charges minimales pour un enfant au secondaire (frais de scolarité, fournitures scolaires, tenue, transport, ration etc.) est déjà suffisamment lourd pour envisager autre chose que le suivi en famille.

Entre les deux extrêmes, on retrouve de nombreux parents désireux de garantir à leurs adolescents admis dans l’enseignement secondaire un cadre pour mieux travailler, mieux se comporter, et autant que possible obtenir les meilleurs résultats scolaires.  Pour toutes sortes de raisons et de contraintes, professionnelles ou autres, un grand nombre de parents n’est pas en mesure d’assurer personnellement le suivi des adolescents à la maison. Et même, le recours aux services de répétiteurs est considéré comme un palliatif, faute de mieux.

Convaincus de ne pouvoir assurer à la maison un suivi adéquat de la manière dont les adolescents gèrent, en dehors des heures de classe, leur temps d’étude, de loisirs et de repos, de nombreux parents optent pour leur placement en internat. Là où le bât blesse, c’est qu’au regard des effectifs considérables de jeunes Camerounais accédant dans l’enseignement secondaire, trop peu d’établissements proposent aujourd’hui la formule d’internat.

Les Camerounais d’un certain âge ont encore en mémoire quelques établissements secondaires dont la renommée s’est bâtie sur l’excellente qualité des nombreuses promotions d’élèves formés en grande partie dans leurs internats. Sur les sites du Lycée Général Leclerc à Yaoundé, du Lycée de Garoua, du Lycée classique de Bafoussam, du Lycée du Manengouba à Nkongsamba, du Lycée bilingue de Buéa, pour ne citer que quelques-uns des établissements les plus réputés des premières années de l’indépendance du Cameroun, les installations jadis dé- volues à l’internat (dortoirs, réfectoires) ont depuis belle lurette été reconverties en salles de  classe.

De nos jours, les établissements à ré- gime d’internat les plus sollicités relèvent presque exclusivement de l’enseignement privé confessionnel. Depuis quelques années cependant, quelques établissements privés laïcs proposent autour de nos métropoles des formules d’internat. Une offre certes suscitée par un besoin réel, mais qui n’est ni suffisante ni à la portée de toutes les bourses pour constituer une véritable alternative à la quête des parents pour un cadre propice à l’épanouissement de leurs ados.

Il est loisible d’observer que les établissements à régime d’internat reviennent au goût du jour, après avoir connu une perte de vitesse, à mesure que se multipliaient les lycées et collèges toujours plus près des familles. Pour autant choisir d’envoyer les adolescents du secondaire dans les internats tel qu’ils fonctionnent aujourd’hui demande mure réflexion par rapport aux avantages et inconvénients de ce système.

Contre

Un lieu de mauvaise cohabitation : Cosmas Atanga, professeur des lycées d’enseignement général en retraite
« Le regard de désolation que nous posons, ces derniers temps, sur nos lycées et collèges est quasi similaire à celui que nous  posons aujourd’hui sur l’internat, les pensionnaires, élèves du cycle secondaire, sont généralement âgés de neuf à 22 ans. La différence d’âge des internes est déjà en soi un problème et non des moindres quand on connaît la fragilité des enfants autour de dix ans, les séismes émotionnels liés à l’adolescence ainsi que les écarts de comportement des jeunes adultes de 20 ans et plus.

Réunir dans un même espace de vie des teen-agers et  des adultes en gestation ne peut être qu’un cocktail explosif qu’engendre une cohabitation horrible où les plus âgés deviennent des loups pour les plus jeunes, une véritable jungle qui, non seulement désoriente mais conduit inéluctablement au dépit, et voire à la désertion. L’un des problèmes majeurs demeure, sans nul doute, le déficit des structures minimales d’accueil et leur capacité à héberger décemment les pensionnaires délibérément admis! A ce problème de l’inadéquation des structures d’accueil s’ajoute le déficit de l’encadrement humain et moral des jeunes de nos internats.

Ces derniers sont pour certains parents des « camps de redressement » pour les cas difficiles, un lieu idéal de socialisation et de formation intégrale de l’homme. Malheureusement dans ces « camps » où tout le monde est à l’étroit, où les trois repas conventionnels sont mal assurés se développe, comme un rituel incontournable, la loi de la débrouillardise et de la force. C’est le règne du vol et de l’arnaque. Et que dire du fléau nouveau : l’addiction aux TIC avec ses leurres et ses lueurs?

Inénarrable… A cette déliquescence morale viennent trôner au-dessus de tout comme un point d’orgue les catastrophiques résultats scolaires…  Quel gâchis quand on sait les sommes énormes d’argent que les parents doivent débourser pour couvrir les frais divers exigés, sans oublier que soigner le moindre bobo est à leur charge exclusive tout comme les multiples séjours et sorties inopinés hors de l’internat !

L’on en vient donc à se poser des questions sur la qualité et l’autorité des maîtres d’internat et leurs hiérarchies ascendantes. Tout se passe comme si les pensionnaires sont laissés à eux-mêmes sans balise, ni guide, sans repère, ni autorité ».  

Nuancé

Tout dépend de l’objectif : Suzanne Florence Manga, conseiller principal d’Orientation.
L’envoi des enfants à l’internat peut se voir sous deux aspects. Celui des avantages que l’on y tire et les problèmes que peut poser ce système. S’agissant des avantages, nous pouvons dire que l’internat contribue à fa- çonner des valeurs chez l’enfant. On y dénombre : sa formation intégrale, la prise en charge personnelle, l’acquisition de l’esprit de socialisation, le bon suivi sur le plan scolaire, l’apprentissage à l’exécution de certaines tâches ménagères et même champê- tres, en même temps qu’il peut lui permettre de supporter la solitude, dans la mesure où il vit désormais éloigné des siens.

Pour ce qui est des inconvénients, l’enfant est appelé à vivre dans un environnement nouveau avec des personnes qui proviennent d’autres familles et qui ont chacun une éducation différente acquise dans des environnements différents. Ce qui expose donc l’enfant à de nombreux maux comme le suivisme comportemental avec des influences venant des autres environnements, la perte des objets, la solitude dans la mesure où certains ont du mal à supporter cet environnement qui leur est étranger. L’autre problème ici s’apparente à la fuite des responsabilités de certains parents qui préfèrent confier l’éducation des enfants aux autres.

Il faut également comprendre ici que certains points devraient être considérés comme avantages et inconvénients. Il s’agit notamment du fait que  l’enfant devra faire face à un nouveau régime alimentaire, un autre rythme de vie lui est imposé (heures de repas, de repos, d’études qui peuvent être différentes de ce qu’il connaît dans son environnement familial), l’interdiction de l’utilisation de certains appareils à l’instar des téléphones portables, les tablettes… Nous pouvons aller plus loin en distinguant selon qu’il s’agit d’un internat dans un établissement laïc ou alors en milieu confessionnel. L’on peut voir que chez les confessionnels, il est parfois exigé le port d’une même tenue pour éviter les frustrations. Ce qui n’est pas le cas chez les laïcs. En tout état de cause, prendre la décision d’envoyer l’enfant à l’internat dépendra donc de l’objectif que veut atteindre le parent pour l’éducation de celui-ci.

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