Notre Dame de Paris : Si loin et si proche des Africains
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France :: Notre Dame De Paris : Si Loin Et Si Proche Des Africains

Un violent incendie a touché la cathédrale Notre-Dame de Paris lundi soir, "potentiellement lié" aux travaux de rénovation de l'édifice. Le feu a pris dans les combles de la cathédrale pour ensuite détruire l'ensemble de la charpente. La flèche, véritable symbole de l'édifice culminant à 93 mètres de haut, s'est effondrée sur elle-même une heure après le début de l'incendie.

Le peuple français s’est montré profondément affecté, on a vu des gens pleurer, comme on pleure la mort d’un ami, d’une personne proche. Une émotion quasi planétaire s’en est suivie des Etats-Unis à la Russie, de la chine au japon en passant par le Liban et Israël. Tous les grands pays se sont montrés solidaires. Le japon s’est dit prêt à participer à sa reconstruction. A côté de ce vacarme de solidarité et de compassion il y avait l‘attitude un peu ambigüe de l’Afrique. Une attitude où se mêlaient le besoin de compassion, le silence, la moquerie, la compétition des souffrances…

De la compassion..Elle est venue de certains chefs d’Etat qui ont twitté. C’est le cas d’Alassane Ouattara : « J’exprime notre solidarité avec la France et toute la communauté chrétienne » Avec la même tonalité Macky Sall Twittait lui aussi : <<  Un des plus grands symboles de la France, Notre-Dame, est en proie aux flammes depuis plusieurs heures. Au nom du Sénégal, j’exprime toute notre solidarité à la France et à toute la communauté chrétienne à travers le monde >> Yaoundé ne fut pas en reste. Le locataire d’Etoudi déclarait apprendre << avec consternation, la nouvelle du gigantesque incendie qui a embrasé la cathédrale "Notre Dame de paris" [...] Je tiens suite à ce grave sinistre, à vous exprimer, ainsi qu'à la conférence des Evêques de France et à la nation française, ma réelle émotion>> plus enthousiaste que son maître Jean De Dieu Momo, Ministre délégué auprès du ministre de la Justice garde des sceaux a témoigné à «sa manière» son soutien au peuple français. Sur son mur Facebook, le Président du Paddec  a invité les camerounais résidant en France à se rassembler ce samedi 20 avril devant  la Cathédrale Notre Dame de Paris. «Rassemblons-nous ce samedi à 15 heures devant Notre Dame de Paris pour dire avec des pancartes notre compassion à la France et aux chrétiens de France pour l’incendie de cette œuvre architecturale, fruit de plusieurs siècles de construction par des générations successives. Nous de la Diaspora Camerounaise responsables sommes solidaires des français dans  la Douleur partagée et nous nous mettons avec les autorités françaises pour faire renaître Notre Dame de Paris de ses cendres»

Si la parole des élites politiques fut à la compassion, les sociétés civiles furent partagées entre indifférence, réserve , moquerie, Compétition des souffrances. Les médias africains n’ont accordé à l’incendie de Paris qu’un faible intérêt comme s’il était disqualifiant d’en parler. Deux cadres de la diaspora africaine dont nous avons sollicité l’opinion ont estimé que c’était un non-évènement. Trois autres ont relevé qu’il s’était produit au même sur le continent africain des drames plus importants.

Il y eu des dérapes verbaux venant d’une étudiante d’origine marocaine membre de l’UNEF, le syndicat national des étudiants de France. Elle a écrit ceci : << Je m’en fiche de Notre-Dame car je m’en fiche de l’histoire de France >> ; << Les gens ils vont pleurer pour des bouts de bois. Wallah vous aimez trop l’identité française alors qu’on s’en balek objectivement. c’est votre délire de petits blancs >>a ajouté. Ses propos ont suscité de vives protestations. Une plainte a été déposée.

L’élan de compassion des dirigeants africains n’a pas manqué de susciter ici et là réserves et sarcasmes. On les a accusés tour à tour de suivisme, d’accorder plus d’importance aux malheureux des autres. Ce n’est pas la première qu’on entend cette polémique. On leur avait fait ce procès après les attentats contre Charlie Hebdo

Nous serons moins sévères. Il est bien possible qu’un tel élan de compassion procède tout simplement d’une appréciation froide des contraintes de la Realpolitik.

Les Etats sont comme les êtres humains. Lorsqu’un individu est touché par un drame, il sera attentif aux réactions de ceux qui vont se montrer compatissants. Et ne manquera pas d’analyser l’attitude de ceux qui vont se montrer indifférents. Le jour où ces derniers seront touchés par un malheur lui non plus ne va pas se montrer très solidaire. On ne peut pas bouder une invitation de François Hollande après un malheur de grande résonnance comme les attentats contre Charlie Hebdo, et deux semaines après se prosterner devant ce dernier pour lui demander le soutien de la France suite à un tremblement, une éruption volcanique, l’imminence d’une invasion djihadiste. Croire que les Etats Africains pourront traverser toute l’histoire enfermés sur eux-mêmes, indifférents aux malheurs des autres, relève un peu du panafricanisme du Dimanche.

Ce qui peut être fondamentalement critiquable, ce n’est pas tellement l’élan de solidarité relevé plus haut, même adressé à une ex-puissance coloniale. Ce qu’on reproche à nos chefs d’Etat c’est que la compassion aux problèmes extérieurs au continent contraste étonnement avec un faible intérêt pour les tragédies internes à leur pays respectif.

Au demeurant le spectacle d’une foule en sanglot parce qu’un bâtiment (classé patrimoine historique) est en flamme peut paraitre lointain à certains d’entre-nous. Oui certains africains interrogés dans le cadre de cette réflexion ont déclaré que c’était un non-évènement et ont d’ailleurs moqué l’intérêt de leurs frères pour une telle actualité. Oui pour cette franche de nos opinions publiques, Notre Dame de Paris, C’est trop loin..Mais pourquoi c’est si loin. C’est parce que la préservation du patrimoine historique n’est pas encore en Afrique un marqueur identitaire suffisamment fort. Lorsqu’on se promène sur le continent on ne voit pas des bâtiments qui datent de plus d’un siècle comme en Asie ou en Europe. Pourquoi pleurer pour un bâtiment alors qu’on aurait dû pleurer les vies humaines ? La hiérarchie a été très vite établie. C’est dans l’espace mental construit par ce genre de d’interrogations qu’a pu surgir la réaction très malheureuse d’une étudiante d’origine marocaine membre de L’UNEF : << Les gens ils vont pleurer pour des bouts de bois. Wallah vous aimez trop l’identité française alors qu’on s’en balek objectivement. C’est votre délire de petits blancs>>.

Cette étudiante a fondamentalement tort. On ne pleure pas pour <<des bouts de bois>>. On pleure la disparition d’un patrimoine historique vieux de plusieurs Siècles. A quoi ça sert de se battre pour sa préservation ? Ça permet aux gens d’aujourd’hui de s’émerveiller devant le savoir-faire d’une époque très éloignée de la nôtre.
Cette étudiante a tort de n’y voir qu’un chagrin lié à l’identité française. Notre Dame de Paris appartient au patrimoine mondial de l’humanité.

Pour fermer la boucle, notre Dame n’est il pas finalement si proche de l’Afrique ? Dans une certaine mesure.

Le catholicisme français est devenu un catholicisme africain. Allez à la messe à Paris ou à Bruxelles ? Que verrez-vous ? C’est un public composé à moitié parfois aux trois quarts d’immigrés venus de l’Afrique subsaharienne. Il existe une spécificité du catholicisme africain. Les occidentaux le disent festif. Les africains participent à la messe en chantant et en dansant. Nombreux sont les occidentaux qui avouent venir à la messe africaine pour retrouver ce coté joyeux qui a disparu dans leur civilisation.

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