Congo Brazzaville :Immortel ,Franklin Boukaka, le poète assassiné en 1972
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Congo Brazzaville :Immortel ,Franklin Boukaka, le poète assassiné en 1972

La musique occupe un rôle prépondérant dans la culture africaine. Jadis, les griots étaient passeurs d’histoire. Aujourd’hui, les chanteurs utilisent le même art pour soulever les problèmes de la sociét. S’il y avait une référence musicale africaine à redécouvrir dans son discours politique panafricain, Franklin Boukaka assassiné en 1972 serait un candidat idéal. Celui dont ses chansons avaient littéralement supplanté l’horizon installant l’artiste dans la double chaise du musicien poète et du politique 

La disette de messages et de contenus dans laquelle sombre une part trop importante des musiques africaines oblige presque à une réécoute, une reconsidération de ces héritages que le tout bruissant pseudo musical, heureusement ne parvient recouvrir. Sous l’autorité processionnelle de péripatéticienne dame l’«ambiance», sésame d’une activité essoufflée et vide d’inspiration, les artistes, musiciens, créateurs divers se perdent dans une course au tube, dans une concurrence radiophonique, dj-sonique de décibels et de vitesse qui dessert probablement ce que le continent aurait de plus défendable en la matière.

Les Anciens, là et dans bien d’autres domaines, sans souscrire à une gérontocratie simplette, ont des leçons probantes à donner. Plus qu’un recours poussif à des objets sacralisés, quelques œuvres choisies des illustres devanciers offrent encore, à l’instar de la musique de Boukaka des moments de pur bonheur, en franchissant le mur du son et des rythmes pour accéder à cette plénitude que la musique seule sait convoquer. 

Mélodies lumineuses, force du lyrisme allié à la poésie et à l´engagement politique : qui écoute le disque " Le Bûcheron " de Franklin Boukaka est subjugué non seulement par la beauté du style dépouillé des pièces et par leur arrangement (dû à Manu Dibango présent de même au piano) mais également par l´actualité du message véhiculé par cet artiste congolais de grand talent, trop tôt disparu (en 1972), victime de la violence politique. 

En effet il y a quarante et quatre ans Franklin Boukaka dénonçait déjà, à travers cette oeuvre, véritable pierre angulaire de la musique africaine - et qui à ce titre mériterait de figurer dans toutes nos discothèques - la répression sévissant à travers le continent tout en réclamant la mobilisation de tous pour une véritable indépendance des nations africaines. 

Artiste à la pointe du débat politique il chantait la liberté de l´Afrique et la bravoure des figures emblématiques qui marquèrent la scène politique du Tiers-Monde. Ainsi reliait-il, dans " les Immortels ", le destin révolutionnaire de Ben Barka à celui de Lumumba, Simon Kimbangu, Che Guevara, Malcom X, Um Nyobe, Félix Moumié, André Matswa, tous assassinés ou morts en prison au nom de la liberté, du nationalisme, du panafricanisme. 

En 1967 le chanteur, qui vécut quelques années à Kinshasa, reprend à sa façon l´idée d´unification des deux Congo avec son fameux " Pont sur le Congo ". 

Le caractère panafricain de l´intellectualité musicale de Boukaka est tel qu´en 1969, il crée l´évènement au Festival Culturel Panafricain d´Alger. Une de ses compositions (Muanga) est même reprise par le légendaire groupe cubain Aragon. 

Mais c´est assurément sa plus célèbre chanson, " Le bûcheron " (et son lancinant violon joué par une musicienne de l´orchestre national de France), qui révèle encore, plus de 44 ans après son assassinat politique, le vrai sens de son combat nationaliste et panafricaniste à travers ses vers chantés. Prémonitoire, Boukaka (la solitude, en langue Kongo) y observait : " tout homme doit mourir un jour; mais toutes les morts n´ont pas la même signification ". Boukaka est mort mais Boukaka est grand. Et sa voix singulière, son message, qui retentit du fond de notre histoire faite de luttes, parle toujours à des générations d´africains. 

" Les Immortels ", Franklin Boukaka, 1967
Africa mobimba e................ .......... ......... L´Afrique tout entière
Tokangi maboko e ........................................A croisé les bras 
Tozali kotala e ...................................Nous observons impuissants 
Bana basili na kokende................... .............La perte de ses enfants 
Bana basili na kotekama e................ ..........Le trafic de ses enfants 
Na banguna a ............................................Auprès des ennemis 
Tolati mokuya ata maloba te .......Silencieux, nous avons porté un voile noir de deuil 
Congo na bana Africa baleli......Le Congo et l´Afrique fondent en larmes (2x)

Oh o Mehdi Ben Barka ............... ........... ..Oh ! Mehdi Ben Barka 
Mehdi nzela na yo ya bato nyonso .....Mehdi, ta voie est celle de toute l´humanité 
Mehdi nzela na yo ya Lumumba ............Mehdi, ta voie est celle de Lumumba 
Medhi nzela na yo ya Che Guevara......Mehdi, ta voie est celle de Ché Guevara 
Medhi nzela na yo ya Malcom X ...........Mehdi, ta voie est celle de Malcom X 
Medhi nzela na yo ya Um Nyobe ...........Mehdi, ta voie est celle de Um Nyobe
 
Medhi nzela na yo ya Coulibally .......Mehdi, ta voie est celle de Coulibally 
Medhi nzela na yo ya André Matsoua ...Mehdi, ta voie est celle de André Matswa
Medhi nzela na yo ya Simon Kimbangu..Mehdi, ta voie est celle de Simon Kimbangu 
Medhi nzela na yo ya Albert Luthuli ........Mehdi, ta voie est celle de Albert Luthuli

Oh ya Tiers-monde ...............................Oh ! celle du Tiers-Monde 
Oh ya libération ya ba peuple .........Oh ! celle de la libération des peuples 

Paroles 

Un vieux, que je considère toujours jeune, m´a dit un jour : " Mon petit, tout homme doit mourir un jour; mais toutes les morts n´ont pas la même signification ". 

Mehdi Ben Barka(xxx). 
Mehdi Ben Barka(xxx). 

" Le bûcheron ", Franklin Boukaka (album, Franklin Boukaka à Paris, 1970)

Ah e e Africa ................. ........... ............Ah ! l´Afrique 
Eh e Africa .............................................Eh ! l´Afrique 
O Lipanda............................................Où est ton indépendance ? 

Ah e e Africa ................. ........... ...........Ah ! l´Afrique 
Eh e Africa .............................................Eh ! l´Afrique 
O Liberté................................................Où est ta liberté ? 

Kokata koni pasi ................ ....Couper du bois de feu est un dur labeur 
Soki na kati koteka pasi ......................Vendre ce bois en est un autre 
Na pasi oyo ya boye ...................Avec ce lot de malheurs et les enfants 
Ngai na bana mawa ................................Je suis loin de m´en sortir 
Nakoka te 

Basusu oyo naponaka ............... ........Certains à qui j´ai donné ma voix 
Bawela bokonnzi ..................Ont développé la boulimie du pouvoir et des 
Pe na ba-voitures ..................................Voitures 

Bavoti tango ekomaka ................Quand arrivent les échéances électorales 
Ngai nakomaka moto ...........................Je deviens alors important 
Pona bango ...........................................devant eux

Nakomi tuna:Mondele akende .....Je me demande: le colonisateur s´en est allé 
Lipanda tozuwaka o ya nani e? ....Pour qui avons-nous obtenu l´indépendance ? 
Africa e....................................................Oh ! l´Afrique

Ah e e Africa ................. .................... ....Ah ! l´Afrique 
Eh e Africa ..............................................Eh ! l´Afrique 
O Lipanda...........................................Où est ton indépendance ? 

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