Lions Indomptables : Le paradoxe Fabrice Ondoa
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Brillant avec la sélection, ce gardien de buts peine à trouver du temps de jeu en club. Peut-il tenir sur la durée ?

Un gardien qui se troue. Une équipe qui perd. Le doute qui s’installe. Au soir de la lourde défaite du Cameroun en amical face au Nigéria (0-3) le 11 octobre 2015, on avait bien cru que le glas avait sonné pour Fabrice Ondoa, le jeune gardien de buts (20 ans) de la sélection nationale. Les critiques avaient alors pointé du doigt le faible temps de jeu de l’ancien pensionnaire de la Masia (le centre de formation du FC Barcelone) en club. Ils n’avaient pas tort. Depuis la fin de la saison 2014, Ondoa n’a quasiment pas joué en club. Viré du Barca avec plusieurs de ses compatriotes, (Bagnack, Dongou, Enguene, Ebwelle et bien d’autres) le joueur formé à la Fundesport avait bien trouvé un point de chute au Nastic Tarragona, un club de D2 espagnole lors du dernier mercato d’hiver.

L’espoir était alors grand de le voir grappiller du temps de jeu dans son nouveau club pour donner le change à un Carlos Kameni, qui avait été ramené dans les buts par Finke, sous la pression du public et des médias. Il n’en fut rien. Ondoa a encore rongé son frein regardant du banc de touche les frères Emana illuminer le jeu d’une équipe de Nastic, qui est passée tout proche de la montée. Depuis la mi-août de cette année, le joueur a rejoint le FC Séville où ses chances de jouer sont encore plus minces. Le péruvien David Soria est certes blessé, mais l’équipe a fait venir l’italien Salvatore Sirigu pour seconder les très convaincant Sergio Rico dans les buts. Quid donc de Ondoa ?

« Il a été a priori recruté pour l’équipe réserve », fait-on savoir dans l’entourage du club. Le joueur est plus perçu comme un « prospect » (un talent à venir) et Séville s’est engagé sur un prêt avec option d’achat pour garder une marge de décision. Traduction, cette saison encore, Ondoa a très peu de chances de figurer en club et devrait, sauf miracle, se contenter de quelques apparitions avec la réserve du FC Séville.

Confiance et tactique

Pourtant, dans le même temps, le joueur enchaîne des performances 4 étoiles sous la tunique vert-rouge-jaune, à l’instar de son match somptueux face à l’Algérie le 09 octobre dernier. Remis sur orbite par la brouille entre Kameni et Bross, Ondoa a depuis démontré qu’il a l’étoffe pour tenir le poste. Mais comment donc comprendre qu’un joueur si brillant en sélection demeure à la peine en club ? Roger Tcheuko, entraîneuradjoint chargé des gardiens de buts d’Ums de Loum, l’équipe championne du Cameroun en 2016 avance d’abord le facteur relationnel : « Est-ce que les qualités qu’il a en club convainquent l’entraîneur principal ?, s’interroge- il. Tout dépend du jeu réduit qu’ils font en club aussi. Est-ce qu’il est performant dans le jeu réduit qu’en match ? Le sérieux qu’il met lorsqu’il est en sélection est-il le même en club ? C’est chaque entraîneur qui classifie ses gardiens de buts (titulaire, N°2, N°3 d) ».

Cet argument tient difficilement la  route. Ondoa est connu pour sa discipline et son sérieux. En plus, on ne peut justifier le fait qu’il n’ait eu la confiance d’aucun des entraîneurs dans les trois clubs qu’il a connus jusqu’ici. Il faut donc chercher ailleurs et Roger Tcheuko revient à la charge : « Sur le plan tactique, répond-il aux critères de son club comme en sélection nationale ? S’il réunit toutes ces conditions et ne joue toujours pas en club, c’est qu’il y a des problèmes extra sportifs qui peuvent être à l’origine de sa mise sur le banc de touche en club. Les difficultés des gardiens de buts africains résident sur le plan de la culture tactique. Il ne sert à rien de faire des arrêts reflexes spectaculaires alors que sur le plan tactique on a des limites. La technique seule ne suffit pas, parce que si le club joue en attaque placée, le gardien de but doit être beaucoup plus technique sur le jeu au pied. Si l’équipe joue la contre-attaque, le gardien de but doit être très bon dans la relance au pied comme de la main. Si Ondoa ne répond pas à certains de ces critères, il est fort explicable qu’il ne soit pas titulaire en club ».

Kameni comme exemple ?

Voilà un argument qui ne manque pas de pertinence. Excellent sur sa ligne, Ondoa n’est pas aussi efficace balle au pied. Sa relance doit encore être travaillée et c’est pourtant un point « non négociable » en Liga. Outre cet aspect technique, il y a la spécificité même du poste de gardien de but qu’il faut faire intervenir. « C’est un poste ingrat et c’est très difficile de s’en sortir surtout quand on est africain. Les clubs recherchent en priorité de bons attaquants et se disent toujours qu’ils peuvent se débrouiller avec un gardien issu du pays », analyse Charles Itandje, l’ancien gardien de but des Lions Indomptables.

Ces propos rappellent le chemin de croix enduré par Carlos Kameni qui a lui aussi mangé son pain noir en club alors même qu’il triomphait en sélection. On se demande même à quoi aurait ressemblé la carrière de l’actuel rempart de Malaga s’il n’avait bénéficié du précieux entregent de Thomas Nkono, qui l’a recruté et imposé dans les buts d’une équipe d’Espagnol Barcelone où il officiait comme entraîneur des gardiens. Il n’y a donc rien de définitivement rédhibitoire dans le statut actuel d’un Fabrice Ondoa qui sait pouvoir compter sur les précieux conseils de Carlos Kameni dont il reste très proche.

Tant qu’il a la  confiance de Broos, Ondoa peut continuer à engranger. Mais à la moindre boude, les critiques referont surface et remettront au goût du jour la rengaine d’un joueur aligné en sélection alors qu’il ne joue pas en club. Etrange paradoxe tout de même.

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