Hôpital central de Yaoundé : la garde rapprochée de  Mbarga Nguélé bloque le pavillon Lagarde
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Après l’entrée du délégué général de la Sûreté nationale au pavillon Lagarde où il est descendu réconforter « son » malade, en situation d’évacuation sanitaire pour l’étranger, ses hommes de main, ont installé derrière lui, à la stupéfaction et la colère générale, un dispositif de sécurité qui a rendu l’accès difficile à tous.

Hôpital central de Yaoundé. Pavillon Lagarde. Il est un peu plus de 11heres 30 minutes, lorsqu’en cette fin de matinée du samedi, 21 mai dernier, le reporter du Messager, qu’accompagnent, une dizaine d’amis, arrivent à l’esplanade de l’institution sanitaire. Après des épreuves physiques de « sports pour tous», ils font le déplacement de l’hôpital central de Yaoundé, à l’effet de rendre visite à la mère d’un des leurs, internée depuis jeudi.

A un jet de pierre de la grille qui sert d’entrée au pavillon Lagarde, du grand monde visiblement, des visiteurs et garde-malades font foule ; attendent et piaffent d’impatience. De part et d’autre, on peut percevoir une quinzaine de policiers tant en uniforme qu’en civil. A l’approche de pareille mobilisation des forces policières et d’un dispositif sécuritaire, quelques observateurs curieux, pensent qu’il s’agit d’un des pontes du régime du Renouveau, détenu à l’une des maisons d’arrêt du Sed ou de Kondengui, transporté en ces lieux pour des soins intensifs.

Au moment de franchir la grille qui s’ouvre au pavillon Lagarde, les sportifs du samedi qui n’ont rien vu venir, sont stoppés. Une interdiction formelle est faite de ne pas accéder sur les lieux par deux policiers en civil, particulièrement agités, impertinents et très zélés. Un peu plus poli et pondéré un 3ème policier qui accourt, lance en direction des visiteurs, qu’ils ne peuvent entrer parce que « le ministre Martin Mbarga Nguélé, délégué général à la Sûreté nationale est dans une des chambres haut standing, en train de s’entretenir avec son malade qui doit faire l’objet d’une évacuation sanitaire ».

A la différence des autres qu’on envoie se pavaner ou déambuler ailleurs, le policier demande d’aller contourner pour utiliser la voie annexe dans l’arrière du pavillon. Ce que nous faisons. Alors qu’on croit être sorti du supplice et d’un abus de pouvoir qui ne se justifient pas, nous nous retrouvons nez à nez avec d’autres policiers baraqués qui composent la garde rapprochée du Dgsn.

« Vous n’avez rien à faire dans ce couloir. Circulez rapidement. Le brancardier qui transporte le malade du ministre Mbarga Nguelé sort bientôt. Le délégué ne doit trouver personne à son passage », hurlent les hommes de main de Martin Mbarga Nguele. De la parole à l’acte, ils sont sur le point de nous bousculer avec violence et brutalité, lorsque l’écho de notre indignation et notre volte-face, attire l’attention de deux braves dames, qui arrivent de la chambre où se trouvent le malade du Dgsn et lui-même. Très courtoises et assez compréhensives, elles parviennent à discipliner les policiers belliqueux ; elles nous sortent de leurs griffes et nous conduisent jusqu’à la chambre de notre malade.

Colère et frustration

Après une trentaine de minutes au chevet du malade que nous sommes allés visiter, le malade du Dgsn, n’était toujours pas sorti. Martin Mbarga Nguélé qu’on disait être à l’intérieur non plus. Les policiers n’avaient toujours pas baissé leur dispositif sécuritaire. Bien plus, nonobstant qu’il était déjà douze heures, grand moment de forte affluence pour les visiteurs et garde-malades, la surveillance et le blocage de l’entrée du pavillon Lagarde se poursuivaient. « J’ai fait le tour des pharmacies de garde pour trouver des sondes qu’on doit placer à mon père. Mais je suis interdite d’entrée » s’indigne une jeune femme.

Elle est aussi visiblement vexée que le jeune qui est allé rapidement acheter du papier hygiénique et de l’eau minérale pour son grand-père ; mais qui se trouve bloqué à l’entrée. Pendant près de deux heures que dure ce spectacle désolant et ridicule, les visiteurs, les garde-malades, les malades, vont vivre une ambiance infernale faite de : colère, amertume, indignation, frustration. Sur le visage du personnel médical qui fait la ronde du pavillon, se lit un sentiment de gène et d’impuissance, face aux abus des forces de police.

« Visiteur exceptionnel » ou « garde-malades pas comme les autres », difficile de savoir si le Dgsn qui était au chevet de son malade, était au courant que les autres Camerounais subissaient le martyrs dehors, victimes des abus ; de torture morale et psychologique outranciers ? Difficile de savoir si le directeur de l’hôpital central était informé que les forces policières avaient pris possession des lieux et que les usagers de l’institution sanitaire, malmenés et chagrinés, étaient plongés dans l’angoisse et le désenchantement. Mais qui a pu donner des ordres ou des instructions aux policiers de bloquer l’entrée d’un pavillon d’une institution sanitaire publique.

Le pavillon Lagarde est un espace pour la médecine adulte ; on y retrouve essentiellement des malades du 3ème âge, des malades à l’état de santé cliniquement grave et complexe. Les signataires d’un acte aussi grave, ont-ils mesuré les conséquences, la panique et la frayeur qui pouvaient arriver ? Doit-on croire que la sécurité du Dgsn, était menacée, de telle sorte qu’il y avait lieu de mouvementer ou de déployer dans un hôpital (qui par ailleurs n’est pas un hôpital de la police), un tel dispositif dissuasif de sécurité ?

L’affaire de l’hôpital Laquintinie à Douala est encore saignante. Doit-on déduire que les forces de police ne mesurent toujours pas l’ampleur du ras-le bol, de l’indignation collective, des soulèvements populaires, des émeutes et de la révolte que de tels abus peuvent provoquer ?

A l’instar des mouches en errance ou en sursis, le peuple spectateur est pris pour une masse d’idiots. Zèle de flic, démonstration de force ou de domination. Et si un malade, sur ces entrefaits trépassait entre temps, faute d’assistance, à qui incomberait la responsabilité ? Dans un pays sérieux et dans un cadre aussi sensible, même les hauts commis de l’Etat par humilité, se font discrets.

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