Lutte contre Boko Haram : L’opération Logone 2015 se peaufine
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Le général de corps d’armée René Claude Meka va commander la force de la coalition. La diplomatie se déploie pour lui donner une légitimité internationale. Au Nigéria, les politiques sortent de leurs torpeurs.

La coalition contre Boko Haram dévoile ses contours. L’opération militaire qu’elle va mener s’appelle « Logone 2015 ». Son poste de commandement est à Maroua. Son commandant (Com force)  est le général de corps d’armée camerounais René Claude Meka selon les informations diffusées dans l'émission Honneur et fidélité de samedi dernier sur la Crtv radio. Il va être secondé par le général de division tchadien Ahmat Darry Bazine. Un colonel va être nommé à la tête de l’état-major de l’opération.

Les jours prochains, d’autres officiers vont être désignés pour faire partie de cet état-major. Il y aura des bureaux : du renseignement opérationnel, de la logistique, des transmissions électroniques et des relations publiques. Des colonels notamment pour coordonner les trois composantes (terrestre, aérienne et marine). Pour harmoniser la distribution des postes de commandement entre les ressortissants des différents pays membres de la coalition. Il est prévu que pour certaines fonctions comme le renseignement opérationnel, qu’un officier camerounais et un officier tchadien soient nommés comme responsables du bureau.

Seuls deux pays ont pour l’instant des troupes engagées dans l’opération Logone 2015. D’autres contingents sont attendus. Le Com force va se charger de l’imbrication harmonieuse des différents contingents et de la désignation de leurs officiers dans l'état-major de l’opération. Le général de corps d'armée René Claude Meka doit sa nomination au fait que le Cameroun est la base de combat de l’opération. Mais, surtout au fait que le contingent camerounais sera le plus important. Il sera composé des moyens (armes et servants) de l’opération Emergence 4. Elle est composée de la 4ème région militaire interarmées et de la 4ème région de gendarmerie qui seront diluées dans cet ensemble, le temps que va durer l’opération Logone 2015.

L’opération Alpha du Bir, qui pourrait garder son autonomie, sera mise à la disposition du commandant de l’opération Logone 2015 qui pourra l’utiliser en cas de besoin. Un officier de liaison sera désigné au Bir qui va être affecté à l’état-major de Logone 2015. En additionnant les effectifs de l’opération Emergence 4 à ceux de l’opération Alpha et éventuellement à un détachement de la délégation générale à la Sûreté nationale, le contingent camerounais devrait avoisiner les 5.000 hommes. Une autre opération d’arithmétique élémentaire montre que la force de la coalition peut atteindre 10.000 hommes.

Dans ce calcul on intègre les 5.000 Camerounais ajoutés aux 2500 Tchadiens, auxquels doivent probablement s’ajouter des Nigériens et des Béninois. Dans la nomenclature de l’Otan, c’est la taille d’une armée. D’où la désignation du général de corps d’armée René Claude Meka, plutôt qu’un général de division. En dehors de la mise en place de l’opération militaire, la coalition renforce sa légitimité. La semaine dernière, elle a reçu la couverture de la Ceac. Hier, le secrétaire d’Etat, ministre des Affaires étrangères des Etats Unis d’Amérique, a rendu visite au président du Nigéria « pour l’aider dans la lutte contre Boko Haram », en réalité pour lui demander de se mêler à cette coalition.

Cette semaine il est prévu, lors d’un sommet de l’Union africaine à Addis Abeba en Ethiopie, que les chefs d’Etats africains accordent l’égide juridique à cette coalition. Cette démarche pour formelle qu’elle paraisse est très attendue par les militaires qui sont engagés dans l’opération Logone 2015. « Si on reçoit l’onction de l’UA après celle de la Cemac, nous pourrons poursuivre Boko Haram partout où il se trouvera », réagit un militaire. Pour lui, il suffira d’une attaque des terroristes pour que la coalition enjambe la frontière et traque en territoire nigérian « ses ennemis ».

Au Nigéria, l’on ne semble pas du tout indifférent aux apprêts de la coalition. Boko Haram a libéré des dizaines d’otages la semaine dernière tout en resserrant son carcan autour de Maiduguri. La secte cherche à entretenir son illisibilité, au moment où certains de ses combattants, sans doute les moins radicalisés, déposent leurs armes. Les politiques, eux, s’égosillent en annonces. Mohamed Buhari, principal concurrent du président Goodluck Jonathan à l’élection présidentielle du 14 février prochain, a fait une déclaration qui écoeure les Tchadiens.

C’était lors d’une visite de campagne électorale à Enugu. Selon le journal tchadien en ligne Al Widha, il a dit : «Nous nous battrons avec les troupes tchadiennes qui ont envahi notre territoire. Nous allons les jeter hors de notre territoire ». Pour sa part, le président du Nigéria a effectué sa deuxième visite à Maiduguri en deux semaines samedi dernier. Il ne s’y était pas aventuré pendant deux ans. En campagne pour sa réélection, il a promis aux populations de la ville d’éradiquer la secte. Il tenait son meeting dans un stade sous haute sécurité alors que les terroristes dévastaient des villages 5 km plus loin. Depuis que la coalition a commencé sa mise en place, les Nigérians de tous bords semblent avoir un sursaut de nationalisme.

Aucun homme politique n’a encouragé l’organisation qui se fait contre une secte qui gangrène leur pays et étend ses métastases chez les voisins. Un conseiller du président du Nigéria, s’exprimant sur la coalition, veut qu’elle soit incorporée à des opérations nigérianes. Seulement, depuis des mois, l’armée de ce pays semble avoir rendu les armes devant les terroristes. La première économie d’Afrique, avec 500 milliards de dollars américains, de budget en 2013, dont 3,87 milliards consacrés aux dépenses de défense, refuse de combattre. Officiellement, elle boude depuis que les USA auraient bloqué une commande d’armes qu’elle a faite au prétexte que les militaires nigérians seraient corrompus.

Mais, plus vraisemblablement, l’armée nigériane semble atteinte dans sa volonté de combattre par les discours corrosifs des amateurs de complot qui foisonnent làbas. Ils accusent les voisins et l’ensemble de la terre de vouloir la partition de la première nation noire. Pour eux, cette déstabilisation de leur pays proviendrait des voisins, hommes-liges des Occidentaux qui instrumentalisent les Boko Haram.

© Le Jour : Aziz Salatou

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