Cameroun: COMMENT JE SUIS DEVENU ANGLOPHONE par Patrick Messi
CAMEROUN :: POINT DE VUE

Cameroun: COMMENT JE SUIS DEVENU ANGLOPHONE par Patrick Messi :: CAMEROON

Le cadre. Je suis né dans la partie francophone de ce pays avec pour horreur, l’anglais. Une simple 2ème langue (comme espagnol, allemand). Et puis il y’avait ces natifs Muyuka, Kumba qui s’habillaient bizarrement. Et puis vint la Fac avec ces « make quick, la resto a ouvri ». L’époque où Ngoa-Ekelle était le casse pipe de mes frères du sud-ouest et nord-ouest. Tout était réconfortant pour nous autres. La nécessité de parler anglais absolument ne se justifiait pas. Pour résumer mêmes les émissions en anglais de Radio Cameroun étaient barbantes. Il n’existatit pas encore de TV au Cameroun. Bref, « I do so swear » lors du serment du Chef de l’Etat, était un luxe. J’étais né du bon côté du Moungo.

Le choc,

En 2005, une mission professionnelle me conduit à Ekondo Titi. Je ne parle pas un traitre mot d’anglais. Ce n’était pas un problème dans nos consciences. Et comment s’y attarder, les anglophones faisaient des efforts pour parler français. Pendant 6 mois à Ekondo, j’ai rencontré des camerounais qui à la limite faisait comme d’hab des efforts pour que je reste dans ma zone de confort. C’était suffisant quand même pour que je percoive le mal-être. Le signal clignotant de la CRTV, obligeait tout le monde à regarder les Tv nigériannes. C’était compréhensible, il se retrouvait mieux. Comment ils ont pu vivre comme ça depuis 1961 ? Comment ils pu surmonter notre condescendance pendant tout ce temps ? Ma perception était superficielle…je vous dirais pourquoi plus tard. J’étais le brave touriste qui vient et qui part. Mais dans une partie du cerveau, je savais qu’une partie du Cameroun n’était pas bien.
La gifle, Comme si Ekondo Titi m’avait préparé je me retrouve 2 ans plus au Qatar. Ici on parle anglais et arabe. Je suis recruté depuis le Cameroun par une société locale française. La langue de travail était le français. Le contrat terminé je rejoins une multinationale cette fois-ci. Heureusement, française. Mais ils veulent un collaborateur qui parle français est un peu d’anglais. Je m’en sors. Et puis vint l’offre de Nestlé Qatar. L’offre de ma vie. Logement de cadre, voiture de fonction, prise en charge de la famille, billets d’avion pour les vacances avec toute la famille, je ne parle pas du salaire. La totale. Avantages pour expatriés européens. Le DG est français. Content de travailler avec un francophone. La DRH est indienne basée a Dubaï. A l’entretien final devant la DRH, je suis recalé parce que mon anglais est approximatif. Mon rêve est dynamité.

Comment un ressortissant d’un pays bilingue fort peut-il perdre une opportunité comme celle-là ? Vint les regrets des cours d’anglais séchés. Le système ne m’avait pas obligé de m’exprimer en anglais comme la constitution me le demande. Le système m’avait démontré que l’anglais est une deuxième langue. Rien d’important.

Je croyais que j’étais au bout de mes surprises. Le système de sponsorship au Qatar voudrait que chaque fois que tu changes de société, tu dois faire certifier tes diplômes et autres certificats par l’ambassade de ton pays. Malheureusement pas d’ambassade du Cameroun. Rentrer au Cameroun n'est la seule solution. Un officier du ministère de l’intérieur me conseille d’aller à l’mabassade des Royaumes Uni. Il a déjà reçu des documents d’africains certifiés par cette ambassade. Si cette ambassade peut, pourquoi pas celle de la France ? Accueil au consulat de France à la gauloise. On te regarde de haut et tutti quantI. Le consulat de France ne certifie que les documents français. Je me prépare à faire le voyage pour le Cameroun. Je fais un tour à chez les british sans convictions. L’accueil est formidable. Je pose mon problème. La préposée hésite, prend mes documents se retire et revient au bout de quelques minutes, « Monsieur repasser dans 2 jours. Votre pays est éligible ». Je ne voudrais pas savoir pourquoi. J’ai échappé à un voyage pour le Cameroun c’est le plus important. 2 jours plus tard, mon enveloppe scellée sous le bras. Je demande à la dame, le pourquoi des choses. Elle me dit : Votre pays fait parti du commonwealth. A ce titre vous bénéficiez de tous les avantages de citoyen de cette espace. Et elle ajoute partout où vous irez ayez toujours le réflexe de voir si l’ambassade de sa majesté ne peut résoudre votre problème. La francophonie nous sert alors à quoi ? Et pourtant dans mon pays les média ne communiquent que sur les sommets de la francophonie, on vous saoule avec ça matin, midi, soir. Plus grave, sommet du commonwealth à Yaoundé dernièrement les discours sont en français.

Et vlan, Le Cameroun ce n’est pas seulement riche de son sous-sol. Je découvre le caractère béni de ce pays même dans les langues imposées. Pourquoi mes aînés n’ont pas pris conscience de cet avantage culturel ? Le système est-il complice de francophonisation affichée de ce pays ? Tout porte à le croire et le confirmer. Je décide de devenir bilingue. Vraiment bilingue. Ekondo Titi me retrouve, à 15 mille km. Je créé sur facebook un forum pour s’interroger sur le problème Tout le monde est péremptoire il n’ ya pas de problème anglophone au Cameroun. J’étais plus royaliste que le roi. Pourquoi les anglophones ne se plaignent pas ?

Le malaise

Et pourtant, le natif de zoétélé adopté à Ekondo savait qu’il était le pur produit d’un système qui avait décidé de fabriquer les « autres camerounais », les « others ». Face à la vindicte des francophones sur mon forum. Je me remets en question. Je décide de devenir un anglophone du Cameroun. C’est alors que j’ai découvert la face hideuse du système.

Défilé militaire du 20 mai, sur toutes les voitures les pancartes qui annoncent les détachements motorisés sont en français. Des « bridges » qui sont baptisé pont sur les rivières du nord-ouest. Aucun discours officiel à quelques niveaux que ce soit n’est en anglais. Pour preuve le discours d’ouverture du commonwealth. En vacances au cameroun je décide de ne parler qu’anglais. Dans les services publiques à Yaoundé, j’entends « Ne me parle pas les choses là »…Je peux citer des exemples à la pelle Je comprends pourquoi ce qu’on croyait être une force des anglophones, est en fait une contrainte pour survivre. Pour un jeune parti de Muyuka pour Ngoa-Ekelle, la survie passait par l’obligation de devenir francophone. L’université finie, pour trouver du travail il fallait obligatoirement parler français. La seule société valorisante de la région est la SONARA, envahi par le personnel d’expression française. Je ne sais même pas si la Direction Générale été une seule fois été confiée à un natif du sud-ouest ou du Nord Ouest. Ne parlons pas des fonctions régaliennes ou des ministères forts.

Nier que le Cameroun s’est francophonisé est une insulte à l’intelligence. L’émergence des écoles privées anglophones est une question de survie alimentaire et non une observation d’un article de la constitution qui stipule que le Cameroun est bilingue. On est dans la même situation des anglophones qui cherchaient à tout prix à parler français pour avoir un travail. Le monde de l’entreprise s’anglicise. Même les français de France veulent parler anglais. Ce n’est pas une exception camerounaise.

La solution (Réapparition du terme sous-système)

Le problème anglophone. En fait il ne s’agit pas de problème d’une langue d’expression. Il ne s’agit pas de problème d’un territoire. Il ne s’agit pas de partage de gâteau. Il ne s’agit pas des recettes de pétrole mal réparties. Il ne s’agit pas du, « toutes les régions ont des problèmes » Le titre du problème a trompé tout le monde. Il n’ya pas de problème anglophone, il y’a un problème de respect d’un système de gestion. Yaoundé par exprès a voulu phagocyter un leg. Les colons nous ont dépossédés de notre héritage culturel séculaires en échange on nous a imposé 2 sous-systèmes. Et un sous-système a décrété son intelligence du fait de son poids pour annihiler l’autre. Etait-ce un plan conscient ? Comment peu-on vulgariser, (je dis bien vulgariser et non éditer) les textes OHADA sans la version anglaise ? Comment peut-on se réveiller en 2017 et créer une section common law à la cour suprême ? Comment peut-on envoyer un magistrat qui ne parle pas anglais à Bamenda ? Est-ce que le contraire est faisable ? Comment on a pu traiter ce dossier avec autant de condescendance ?
Maintenant le terme « sous-système », est d’actualité. Il était où avant ? Nous pouvons citer toutes les décisions prises par le gouvernement en 2017, qui prouvent qu’on a traité les sujets de ce pays en monolinguisme
Tout doit passer par une conférence souveraine. Les décisions issues de ce forum doivent avoir force de loi.

Nos frères de l’autre côté du Mungo ont tous compris. Les revendications corporatistes, ont été résolues avec une rapidité légendaire grace à la violence. Et régler ces problèmes prouvent qu’il y’avait des insuffisances. Avec cet aveu de Yaoundé, pourquoi ils vont s’arrêter maintenant ? Quand on commence à donner, on donnera toujours. Ils le savent et nous le savons. Il ne reste qu’une seule solution. L’anticipation. Anticiper quoi ? La violence contre la violence nous mènera toujours à la table de négociation. Mais avec beaucoup de biens détruits, des pertes en vies humaines.

C’est maintenant qu’il faut convoquer cette conférence nationale souveraine. Elle aura l’effet premier de décrisper les relations. Et son caractère souverain et immédiat va rassurer les méfiances. A cette conférence inclusive doit s’inviter les problèmes des autres régions. Le régime actuel peut-il porter ce projet ? La réponse ne peut pas être exclusivement militaire.

Il faut qu’enfin des deux côté du mungo qu’on se sente qu Cameroun. Est-ce le cas pour tout le monde en ce moment ? Les prochains jours nous le diront.

Lire aussi dans la rubrique POINT DE VUE

Les + récents

partenaire

Vidéo de la semaine

évènement

Vidéo


L'actualité en vidéo