Cameroun, Crise anglophone : la radicalisation par le feu
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Cameroun, Crise anglophone : la radicalisation par le feu :: CAMEROON

Stratégie de lutte. Plus d’une vingtaine d’incendies enregistrés depuis le début de la grogne. Criminel ou pas, le feu semble devenir un important moyen de contraindre les populations à obéir aux mots d’ordre diffus.

Le siège du Cameroon General Certicate of Education (Gce) Board, dans la ville de Buea, région du Sud Ouest, a été le théâtre d’un incendie au petit matin du dimanche 21 mai 2017. Le feu a envahi le premier niveau du bâtiment R+2 situé au quartier Molyko. 

Depuis que la perspective d’une année blanche a été écartée par le gouvernement, des artifices sont multipliés pour fragiliser l’organisation de cette session d’examen. Et des institutions sensibles comme celle là sont censées être sous surveillance. Les gendarmes qui ont visionné les images des caméras de surveillance installées autour des services n’ont toujours pas dit comment un pan de l’office des examens anglophones a pu se retrouver dans les flammes. Plus de peur que de mal, il n’a dévasté que le bureau du chargé de la communication et des relations publiques.

On ignore si les ordinateurs et la paperasse consumés par les flammes comportaient des données liées à l’organisation de l’actuelle session. Tout au plus, on se félicité de ce que le bureau du «Registrar », le directeur de l’office, n’a pas été touché.

Criminel ou non, l’incendie indique que des risques pèsent sur le travail de l’office. Le lundi, 15 mai 2017 déjà, cinq salles de l’école publique d’Atwakum, en plein cœur de la ville de Bamenda, dans le 2ème arrondissement, étaient ravagées par des flammes d’une rare violence. Don de la coopération nippo-camerounaise, l’école qui devait abriter des activités liées à la fin de l’année scolaire a brûlé la veille du « commom entrance », l’équivalent du concours d’entrée en sixième.

L’intervention des sapeurs-pompiers avait néanmoins permis de circonscrire les flammes et de sauver d’autres installations de cette école construite en 2014. Mais dans les consciences, l’insécurité a pris des marques. L’incendie d’Atwakum intervenait alors que le ministre des Enseignements secondaires terminait une visite d’apaisement dans ces régions.

Du coup, les épreuves pratiques du General certificate of education (Gce), programmées ce jour, n’avaient pas connu l’affluence attendue, malgré l’ouverture d’un concours spécial de recrutement des lauréats
lancé pour les appâter.

Omniprésence

On en était à déplorer cette destruction ciblée, dans un pays qui manque cruellement d’infrastructures scolaires de qualité, que dans le sillage de la préparation de la fête du 20 mai, le Centre de promotion de la femme et de la famille (Women empowerment centre) de Bamenda a été incendié dans la nuit du 19 au 20 mai 2017. Situé à Old Town, un quartier qui héberge le Commissariat central, la Sous-préfecture de Bamenda 2 et la Division régionale de la police judiciaire du Nord-Ouest,le bâtiment dédié à l’encadrement de la jeune fille a passé la fête de l’Unité sous les flammes. 

Le même jour, le feu a réduit en cendres la brigade de gendarmerie de Banga Bakundu, non loin de Muyuka, dans le département du Fako.

Depuis décembre 2016, le feu a fait d’importants dégâts.

Le commissariat de Bamenda 3 a ainsi subi les coups de boutoir des manifestants, qui brûleront deux véhicules d’Elecam et s’attaqueront aux véhicules des chefs militaires, entre autres.

Dans la nuit du dimanche au lundi 16 janvier 2017, le domicile du chef d’escadron Ayongo, commandant de la compagnie de gendarmerie de Mbengwi a pris feu. L’incendie s’est déclaré en pleine nuit, alors que les occupants de la maison dormaient. L’officier de gendarmerie n’a eu que le temps de sauver sa peau et celle des enfants.

La ville de Mbengwi était particulièrement agitée ce lundi. Et des hordes d’excités ont, selon nos sources, menacé de mettre le feu à la brigade locale de gendarmerie. On n’exclut pas l’hypothèse d’un avertissement au chef des gendarmes.

Marchés et écoles morts

Plus tard, le feu sera orienté vers les marchés. Dans la nuit du lundi 13 au mardi 14 mars 2017, des boutiques ont brûlé au marché des vivres de Bamenda. Plusieurs millions de Fcfa sont partis en fumée. Action punitive sanctionnant des tracts qui avaient circulé des jours auparavant, contre des commerçants accusés de fermer leurs boutiques au grand marché pour venir troubler le jeu. Le marché de Fundong n’a pas échappé aux flammes punitives, tout comme des étals précaires au marché de Nkwen.

Dans la nuit du 30 au 31 mars 2017, Old market de Limbe a brûlé. Les autorités ont indexé un certain Paul Vincent Suh Fuinwie, prétendument commandité de Bamenda pour mettre le feu, contre 100 000F. Le
mercredi 31 janvier déjà, des boutiques boycottant les mots d’ordre de ville morte avaient brûlé dans le marché de Buea.

Quelques jours avant, le maire Rdpc Patrick Ekema avait menacé de sceller ceux des commerçants qui observaient la désobéissance civile.

A présent, les établissements scolaires où on a essayé de contourner l’école morte ont payé le plus lourd tribut. Le lycée d’Atiela a perdu son véhicule. Celui de Wum a été incendié. Au lycée de Nkambe, le véhicule du proviseur a été carbonisé. Son collègue de Nkwen n’a pas eu plus de chance. Le bloc administratif à Nitop, les toilettes du provisorat à Bayelle, des documents au Cenajes ont subi la furie des flammes. Un enseignant du lycée technique « canadien » de Bamenda a perdu son véhicule ; le censeur du lycée bilingue a sauvé une partie du sien. Un pavillon de l’hôpital régional de Bamenda affecté à la faculté de médecine de l’Université publique a reçu la visite des pyromanes. Des inconnus ont tenté de mettre le feu dans des toilettes et des mini-cités à Bambili, etc. Sans compter que des feux touchent certains biens de particuliers.

Un bus de la compagnie Amour Mezam, en attente de dépannage, a été incendié dans un garage.

En général, l’origine des incendies reste inconnue. Cependant, si les officiels ne l’avouent pas, ils ne doutent pas qu’il s’agit d’actes de représailles vis-à-vis de la non observance des différents mouvements de débrayage lancés depuis la crise sociale que traversent les Régions anglophones du Cameroun.

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