Les terroristes vendent des ânes aux Chinois
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Ils font revendre le bétail qu' ils pillent dans des villes frontalières.

Le marché de Mémé, petite bourgade des environs de Mora était fermé vendredi dernier. Les autorités de la région de l'Extrême Nord l'ont décidé ainsi. Les collaborateurs du gouverneur Midjiyawa Bakary entendent mettre fin au trafic de bétail qui s'était installé dans ce marché depuis quelques semaines. Pourtant , après la fermeture du marché de Kolofata il y a deux mois pour les mêmes raisons et de tous les marchés frontaliers d'avec le Nigeria, celui de Mémé était devenu le plus grand marché à bétail de la Région.

Par centaines des commerçants, éleveurs et bouchers venaient le vendredi y faire des affaires. Seulement, Boko haram s'en est mêlé. A l'aide de complicité locale, ils ont inondé le marché de bêtes. Un bétail issu des pillages qu' ils commettent au Cameroun et au Nigeria. La décision des autorités aurait été motivée par une querelle entre un notable de Kolofata et des responsables du marché à bétail de Mémé.

Le notable est par ailleurs grand éleveur de boeufs. Il est aussi un acheteur assidu au marché de Mémé . Il y a deux semaines, il a reconnu quatre bêtes mises en vente comme faisant partie de l' un de ses troupeaux. Les boeufs étaient marqués. Malgré cela, le vendeur n'a pas voulu reconnaître qu' elles étaient volées. Il arguait qu' il avait toutes les autorisations des responsables du marché. Il avait en effet payé les 4000 Fcfa de taxes et obtenu l'autorisation de vente du service vétérinaire. Pour les marques, le vendeur affirmait qu' elles étaient floues et ressemblaient à d'autres tatouages.

Le notable a insisté. La querelle s'est envenimee. Les responsables du marché et certains notables de de Mémé, s'étant rangés du côté du vendeur. C'est alors que,le pot au rose a été révélé. Depuis quelques semaines, chaque jeudi soir, aux environs de minuit, un marché clandestin se tenait au terrain de football du lycée de Mémé. Entre 200 et 500 boeufs, des centaines de moutons et chèvres et des ânes étaient bradés. Des acheteurs venus de Maroua et de plus loin accouraient. Ils étaient bouchers ou receleurs, ce qui dans la région est un peu synonyme. Les bêtes les plus chères étaient vendues à 200.000 Fcfa pour un grand taureau. Beaucoup de ce bétail ainsi acquis était immédiatement abattu et la viande dispatchee dans toute la Région.

De la viande d'âne dans la nature

Des notables de Mémé, des fonctionnaires et des gendarmes étaient impliqués. M. M. un notable de Mémé était chargé de collecter la part des autorités, traditionnelles, des fonctionnaires et des membres des forces du maintien de l'ordre. Pour ne pas éveiller les soupçons comme à Kolofata, les prix avaient été légèrement rehaussés et les bêtes étaient pour la plupart abattues.

Toutefois, ce n'était pas la seule astuce de Boko haram pour dissimuler son trafic. Les terroristes,s'étant sans doute aperçus du regain de vigilance de certaines autorités pour les affaires de boeufs, moutons et chèvres ont décidé de diversifier leurs marchandises. Ils sont au courant que depuis des mois, des hommes rachètent des peaux d'ânes à un prix onéreux. L'équidé qui n'avait pas une grande valeur sur le marché est désormais très prisé.

"C'est la conséquence  d'acheteurs chinois. Ils payent 30.000 Fcfa au moins la peau d'un âne", renseigne une source proche du trafic. Personne ne se préoccupait de ce commerce"infamant". Boko haram, si. Ils introduisent des centaines d'ânes volés au Nigeria et dans les villages camerounais transfrontaliers. Les ânes sont abattus pour leurs peaux mais, que fait-on de la viande? Le mystère reste grand quant à sa destination.

Absence de recensement

Les autorités en dehors de fermer les marchés ne peuvent rien faire d'autre pour arrêter ces trafics. Depuis 2014 et les exactions de Boko haram, il leur est impossible de contrôler le flux du bétail entre les deux pays. De nombreux nigérians fuyant Boko haram, se sont réfugiés au Cameroun avec leur bétail. Ils l'ont parfois revendu,se le sont aussi fait arracher ou sont repartis impromptument une fois qu'ils ont cru la situation sécuritaire apaisée chez eux.

Un  agent vétérinaire affecté dans la région nous avoue que, il est impossible de savoir quel est le cheptel exact. "Depuis le début des troubles nous n'avons plus fait de campagne de vaccination dans les villages de la frontière. Or, c'est lors de ces vaccinations aux quelles les éleveurs adheraient que nous profitions pour recenser le bétail. Mais, maintenant qui peut s'y aventurer?" interrogeait-il.

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