CAMEROUN :: Guy Wandji : « il y a une chance pour l’Afrique de sortir de la pauvreté par le numérique et l’IA » :: CAMEROON
© Camer.be : Propos recueillis par Alain Ndanga | 25 Sep 2025 15:49:22 | 1582Activiste du numérique au Cameroun et fondateur du Groupe scolaire privé Nkuimy, partenaire du Collège Libermann à Douala, Jean-Guy Wandji Nkuimy croit fermement que l’Afrique peut sortir de la pauvreté grâce à la révolution numérique et à l’intelligence artificielle.
Il y a plus de dix ans, vous plaidiez déjà pour que le numérique soit reconnu comme un levier de développement économique. Quel bilan dressez-vous aujourd’hui au Cameroun ?
Effectivement, depuis plus d’une décennie, je n’ai cessé d’interpeller les autorités sur le potentiel immense du numérique pour l’Afrique. Malheureusement, à l’époque, la réactivité était faible. Aujourd’hui, je me réjouis de voir que le discours a changé : de plus en plus de décideurs évoquent la révolution numérique et l’intelligence artificielle. Certains établissements scolaires introduisent désormais des modules d’acculturation numérique dans leurs programmes. C’est une avancée notable.
Nous vivons une époque charnière : celle de la 4ème révolution industrielle, et le Cameroun comme l’Afrique ne peut rester en marge. À chaque siècle, une révolution a façonné le monde. Le numérique est celle de notre époque, et l’Afrique doit impérativement s’y arrimer.
Mais nombreux sont ceux qui parlent du numérique sans en saisir les véritables enjeux. Pourquoi est-ce si crucial pour notre continent ?
Parce que le numérique répond directement aux besoins de développement de l’Afrique. Prenons l’exemple du mobile money, devenu un outil indispensable dans nos économies. Nous avons une jeunesse dynamique, une connectivité de plus en plus étendue, et l’infrastructure en fibre optique qui permet l’accès au monde entier.
L’Afrique a une force démographique unique : 70 % de la population est jeune, contre 30 % dans d’autres régions du monde. Ce sont eux qui peuvent porter la transformation numérique. Le numérique est une opportunité pour résoudre nos problèmes à partir de nos réalités locales, tout en s’ouvrant à l’économie mondiale.
Pourtant, l’Afrique reste dominée par des métiers informels. Quelle est la place du numérique dans un tel contexte ?
C’est justement là que le numérique prend tout son sens. Comme l’Asie qui a profité de la révolution informatique pour booster son économie, l’Afrique doit se saisir de cette 4ème révolution pour créer des zones numériques, former sa population et capter une part de l’économie numérique mondiale, estimée à plus de 2000 milliards de dollars.
Grâce à internet, depuis son village, un jeune peut aujourd’hui travailler à distance pour une entreprise basée à l’étranger. Des emplois à distance existent, accessibles depuis un simple smartphone, et permettent de générer des revenus complémentaires, voire un revenu principal. Il suffit d’apprendre à utiliser ces outils, de chercher les bonnes plateformes, et de se former un minimum.
Presque toutes les zones sont couvertes de nos jours grâce à la fibre optique et les satellites. De plus nous allons aussi vers des solutions « sans internet ». Il y a déjà des pays où on est à 90% du taux de pénétration. On n’a aucun évènement qui a pu autant pénétrer les Africains dans les villages qu’internet. Et c'est grâce à cet internet ou à la fibre optique que nous pouvons agir dans le monde entier. Et c'est grâce d'ailleurs à ce taux de pénétration qu'on dit aujourd'hui que le numérique est une chance pour l'Afrique. Aujourd’hui, un enfant qui se trouve au Nord, à l'Extrême nord, à l’Est ou dans l’arrière-pays peut non seulement recevoir des enseignements à distance (cf. le centre d’éducation à distance du Ministère des Enseignements Secondaires) mais aussi peut travailler à distance pour des entreprises situées au bout du monde et gagner de l'argent.
J’ai d’ailleurs eu un entretien avec Madame le Ministre des Enseignements Secondaires, le Pr Pauline Nalova Lyonga, sur le sujet, qui m’a rassuré que les cours de l'acculturation numérique seront désormais intégrés dans le programme des lycées et collèges.
Lors de l’Assemblée générale, je rappelais aux enseignants du Collège Libermann et du Collège privé Nkuimy que les jeunes peuvent faire des travaux à distance sur leur smartphone pour gagner un peu d’argent et aider les parents à payer leur scolarité. Au lieu de passer du temps sur TikTok ou Facebook, on peut consacrer une heure par jour à une activité rémunératrice. C’est un changement de mentalité que nous devons impulser, avec les outils déjà disponibles. Les enseignants grâce au numérique et à l’IA peuvent arrondir leur fin du mois. Bien sûr qu’il y a ce problème de formation. C’est l’un nos défis en ce moment, mais on va y arriver.
Justement, concrètement, comment un enseignant ou un élève peut-il tirer parti du numérique pour gagner de l’argent ?
C’est simple : avec une courte formation à l’utilisation de son smartphone, on peut déjà accéder à des plateformes d’opportunités, comme LinkedIn. Il ne s’agit pas de devenir technicien, mais de savoir utiliser les outils numériques à sa disposition.
Par exemple, un enseignant peut corriger des copies à distance. Il suffit juste de lui envoyer l’épreuve et les copies, fixer le format et le moyen de paiement. Un élève peut réaliser des micro-tâches ou du tutorat en ligne. Ce sont des activités qui ne nécessitent pas de déplacement et qui peuvent générer des revenus.
Maintenant que ce message-là a sonné au collège Libermann et au groupe scolaire Nkuimy, comment trouvez-vous l’introduction du numérique dans leurs offres de formation ?
Cet engagement est venu du Père Recteur du collège Libermann qui est un établissement centenaire. Au cours d’une assemblée générale du collège, il a été adopté à l'unanimité que l'enseignement de l'acculturation numérique va commencer dès cette année en classe de 6ème. Il en a été de même au groupe scolaire Nkuimy. Le programme commence à partir de la classe 6e parce que le collège Liberman a sept classes de 6e. Nous nous réjouissons de cela. Il n’est pas question de prendre toutes les classes au même moment. C'est une première expérience ; on va étape par étape. Quand l'enfant dira à ses parents qu’aujourd'hui j'ai gagné 40 000 ou 50000 Fcfa, ils comprendront qu’il était nécessaire d’y penser.
On veut toucher les autorités au plus haut niveau. Il y a une vraie révolution en cours, qu'il faut rattraper ; créer les conditions veut dire créer les zones numériques. Créer les zones numériques, c'est créer les conditions, c'est-à-dire donner des facilités à toute personne de ramener de l'argent à la maison et de gagner sa vie.
Vous avez mentionné l’introduction de l'acculturation numérique au Collège Libermann et au Groupe scolaire Nkuimy. Quelle est la différence avec les cours d’informatique classiques ?
C’est une distinction cruciale. Il y a justement cette confusion qui plombe les avancées et la démocratisation du numérique. Même les experts confondent, mélangent l'informatique que nous connaissons qui est une invention du 20e siècle.
L’informatique, c’est une discipline technique, avec ses langages, ses protocoles, ses réseaux. Le numérique, lui, concerne l’usage des technologies par tous, sans prérequis technique.
Un cours d’informatique forme des techniciens. Un cours de numérique apprend à utiliser efficacement son smartphone ou un ordinateur pour en tirer un bénéfice concret, comme créer un CV en ligne, postuler à un job, animer une page professionnelle, vendre sur une marketplace, etc.
Le numérique est accessible à tous, même à ceux qui n’ont jamais été à l’école. On peut l’enseigner en langue locale, dans un village. Ce que nous appelons l’acculturation numérique, c’est exactement cela : donner à chacun les clés pour participer à l’économie numérique.
Cette formation a un coût. Avez-vous des partenaires pour vous accompagner ?
Oui. Depuis plusieurs années, nous travaillons avec des institutions comme la Banque africaine de développement (BAD), qui soutient activement les projets de zones numériques et de formation. Ces institutions sont prêtes à investir, mais il faut que les États apportent les garanties nécessaires et définissent clairement leurs priorités.
Le Nigéria, par exemple, a déjà bénéficié de financements importants. Le Cameroun et d’autres pays doivent accélérer leur engagement, car les fonds sont là, mais les projets peinent à se concrétiser.
En résumé, vous êtes convaincu que le numérique est la seule voie possible pour l’Afrique ?
Absolument. Je prends le risque de le dire clairement : je ne vois pas d’autre voie pour que l’Afrique sorte durablement de la pauvreté que le numérique et l’intelligence artificielle. C’est la chance historique de notre continent, et nous ne devons pas la rater.
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