FRANCE :: BEN DECCA, LA VOIX DU MAKOSSA : IL Y A QUARANTE ANS DEJA, IL PARLAIT DE RETRAITE.
© AFRIKSURSEINE : Ecrivain; Romancier Calvin DJOUARI | 07 May 2025 09:57:22 | 741Ce 4 mai à l’Olympia, quelque chose d’historique s’est produit – une vibration douce du makossa, porté par une légende encore debout. Ben Decca, pour la première fois sur cette scène mythique, a livré ce que seul un maître du temps peut offrir : une mémoire vivante, une voix qui sait d’où elle vient. Ce n’était pas un simple concert, c’était une traversée – de Douala à Paris, de Télé Podium aux salles prestigieuses, d’un refrain à une époque révolue. Et même si l’homme semblait fatigué, même si la complicité entre les voix n’était pas toujours au rendez-vous, le public, lui, écoutait avec le cœur. Il chantait avec sa jeunesse, dansait avec ses souvenirs. il faut le dire Ben Decca, c’est ce petit homme aux épaules pleines de souvenirs, dont la taille modeste contraste avec la grandeur de son héritage. On le regarde aujourd’hui avec une tendresse mêlée d’admiration, fatigué, oui, le pas lent, marchant à pas pesant, comme si chaque mouvement était un accord qu’il fallait demander à la vieillesse avant de l’exécuter.
Ce n’est plus vraiment la danse qui l’habite, – d’ailleurs, il n’a jamais dansé-, mais la musique qui le porte, une musique douce, profonde, poétique. Sur scène, il le sait, et nous le savons : un pas de trop pourrait trahir ce corps que le temps sculpté chaque jour comme une maison baroque. Alors il reste là, immobile ou presque, et pourtant c’est tous les fans douala qui vibrent autour de lui, le regard hautain, la bouche pendante toujours entrain de reprendre en refrain ces morceaux du passés. Ben n’a jamais cessé de les émouvoir, il suffit qu’il soit là, entrain de pisser, le micro à la main, ils seront toujours là pour voir cet homme qui n’a plus revu les cheveux à la tete depuis 40 ans date à laquelle il avait dit quitter la scène. Revenons au concert. On aurait dit que le peuple avait attendu ce moment comme on attend un couronnement. Il a même été dit que si le concert avait été gratuit, il y aurait eu émeute. Mais chacun a payé, comme il se doit. Car l’art mérite sa juste valeur, et l’artiste doit vivre de son travail. Le plus beau, ce soir-là, ce n’était pas seulement la musique, c’était la foi d’un public venu malgré le lundi qui suivait, malgré les choix discutables de la date, malgré les absents.
Un internaute a dit : « ce concert marque un nouveau chapitre, une urgence peut-être – celle de célébrer de leur vivant ceux qui ont bâti cette musique que nous appelons « nôtre » : des stars comme Dina Bell, Toto Guillaume, François Misse Ngoh, Douleur, Ndedi Eyango et tant d’autres que le temps n’a pas effacés nous font toujours rêver. Il faut leur offrir l’Olympia, le Stade de France, les grandes scènes – non pour flatter leur ego, mais pour rendre grâce à une époque et transmettre ce trésor aux générations à venir. Il est temps de produire des coffrets, d’archiver, de célébrer, de transmettre. » D’aucuns pensent que la musique de Ben doit survive pour qu’un jour on puisse dire aux générations futures « C’était notre voix. » Je me souviens en 1986, le monde de la musique camerounaise fut secoué par une déclaration aussi inattendue que bouleversante : Ben Decca, l’icône du makossa, annonçait son jubilé artistique. À Douala, ce soir-là, les lumières des poteaux tremblaient presque autant que les cœurs. Avec son regard calme et sa voix grave, qui avaient bercé tant de générations, il avait dit sans détour ni drame : « Je crois que le temps est venu de me retirer. »
Le Cameroun resta sous le choc. Moi-même, j’ai assisté à son dernier concert à l’Abbia ; il fit alors le tour du pays, et partout, les salles étaient archi-combles. Comment une voix aussi enracinée dans la mémoire collective pouvait-elle se taire ? C’est cette question qui tourmentait le public, le regardant avec angoisse, incapable de comprendre qu’un si bel homme, encore jeune, puisse arrêter la musique. Ses deux petites sœurs, encore innocentes dans l’univers musical, l’accompagnèrent dans ce qui ressemblait à une extravagante mise en scène, presque une supercherie douce, d’un adieu que personne ne voulait croire. Mais peut-on vraiment quitter la musique quand on est soi-même devenu une chanson ? Ben Decca, ce poète de l’amour et des espoirs brisés, ce sculpteur d’harmonies makossa, n’a jamais cessé de résonner. Car même si ses mots disaient « fin », son cœur, lui, semblait encore battant au rythme de la scène. Certains murmurent qu’il n’avait pas arrêté, qu’il s’était simplement effacé pour mieux renaître, ailleurs, autrement.
Et la suite leur donna raison : la musique ne l’a jamais quitté. Le jubilé de 1986 n’était peut-être pas un adieu, mais une pause habillée de mystère – un souffle entre deux couplets d’une chanson qui, aujourd’hui encore, ne finit pas. L’homme comme tout chanteur Douala était un bourreau de cœur. Des femmes pouvaient mourir pour lui. Il avait des ouailles, fidèles absolus, écervelés du makossa sentimental, capables de traverser marécages, orages et embouteillages pour entendre ne serait-ce qu’un soupir de sa voix. On dit d’eux qu’ils iraient jusqu’au bout du monde, mais c’est faux : ils iraient plus loin encore, jusqu’au fond d’une poubelle à ragots si le maître y donnait un concert. Qu’importe l’odeur ou la rumeur : si Ben Decca chante, alors le lieu devient cathédrale. Dans les rues de Douala ou les salons feutrés d’Europe, ils le suivent avec une ferveur qui frôle le sacré.
Ils connaissent ses paroles par cœur. Pour eux, Ben Decca est un berger d’émotions, un messager d’histoires d’amour trop vraies pour être inventées. Et s’il décidait un jour de jouer dans une casse, au milieu des carcasses de voitures et des ragots usés, ils viendraient toujours – en habits du dimanche, les yeux hagards, la langue pendante entrain de fredonner en dormant la musique de cet homme du passé. Mais il y a des noms qui brillent si fort qu’ils finissent par faire de l’ombre. Ben Decca fait partie de ceux-là. Pendant des décennies, il a porté haut le makossa, en a sculpté les contours, en a chanté les douleurs douces et les amours amères. Son œuvre est immense, son nom gravé à l’encre indélébile dans la mémoire musicale du Cameroun. Mais voilà : même le soleil, à un moment donné, doit bien se coucher. Dans la musique comme en politique, il faut apprendre à dire aux géants : merci, mais maintenant, place aux jeunes. Ben a déjà fait son temps. Il l’a bien fait, même très bien.
Mais à force de trop rester, on finit par faire tache sur sa propre légende. L’histoire ne s’écrit pas dans l’éternité d’une seule voix, mais dans la transmission. Or, qui peut dire aujourd’hui : « Je suis un enfant musical de Ben Decca ? » Quelle relève a-t-il vraiment formée ? Quel jeune a-t-il placé sur scène, dans la lumière ? On ne construit pas une dynastie artistique seul, et l’héritage n’est pas un album posthume : c’est un flambeau qu’on tend, de vivant à vivant. Les jeunes générations n’attendent pas seulement un refrain nostalgique ; elles veulent un rythme neuf, un discours neuf, une scène libre. Il est temps. Oui, il est temps que Ben se retire – dignement, doucement, mais fermement. Qu’il laisse le micro non pas parce qu’il ne sait plus chanter, mais parce qu’il sait écouter l’appel du temps.
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