AFRIQUE :: Nouvelle stratégie Américaine au Sahel : Le Prétexte Antiterroriste au Service des Ressources :: AFRICA
© Camer.be : Nding Tchibi | 13 Sep 2025 18:23:47 | 567Alors que les États-Unis n'ont pas officiellement annoncé un retour militaire direct dans la région du Sahel, les signaux envoyés ces derniers mois laissent peu de doute sur l'intention réelle de Washington de reprendre pied dans cette zone stratégique, sous une forme certes remodelée, mais motivée par les mêmes objectifs fondamentaux : contrôle sécuritaire, influence géopolitique et surtout, accès aux ressources naturelles critiques.
Selon un rapport publié par "France 24", ce retour anticipé semble s’inscrire dans une logique de troc déguisé, où la promesse de lutte contre le terrorisme sert de monnaie d’échange pour obtenir l’accès privilégié aux métaux stratégiques comme le lithium, l’or ou encore le manganèse.
Plusieurs visites diplomatiques de haut niveau témoignent de cette réorientation stratégique. En mai dernier, Troy Fitrell, haut responsable du département d’État américain pour l’Afrique, a déclaré à Abidjan : « le commerce, et non l’aide, est désormais notre politique réelle envers l’Afrique ». Une formule révélatrice, interprétée par de nombreux analystes comme un retour à une politique de conditionnalité intéressée, où l’argument économique prime sur les considérations humanitaires ou démocratiques. Dans le même esprit, Rudolph Atallah, directeur adjoint principal chargé de la lutte contre le terrorisme à la Maison-Blanche, s’est rendu au Mali en juillet pour proposer « la solution américaine » à l’insécurité chronique qui mine la région depuis plus d’une décennie. Il a affirmé que les États-Unis disposent des « équipements, renseignements et forces nécessaires pour neutraliser la menace », si le Mali acceptait de coopérer. Quelques jours plus tard, William B. Stevens, sous-secrétaire adjoint aux affaires africaines, évoquait ouvertement la possibilité d’investissements privés américains dans la lutte contre les groupes jihadistes, lors de son passage à Bamako.
Le message est clair : Washington ne cache plus sa volonté de troquer ses moyens militaires et logistiques contre l'accès à des ressources stratégiques. Ulf Laessing, directeur du programme Sahel à la Fondation Konrad Adenauer, confirme que les États-Unis ont offert d’« éliminer les chefs des groupes djihadistes en échange de l’accès au lithium et à l’or » pour les entreprises américaines. Une telle stratégie implique logiquement une présence militaire prolongée. Comme le souligne Liam Karr, analyste pour l’American enterprise institute, toute exploitation des minerais critiques ne peut être que le fruit d’un engagement sur le long terme. Le combat contre le terrorisme devient ainsi l’alibi d’un projet économique aux contours de plus en plus assumés. Michael Williams, ex-responsable du Pentagone, va jusqu’à suggérer que Trump pourrait conclure un accord garantissant la majorité des parts de production minière aux entreprises américaines, en échange d’un soutien contre les groupes armés, y compris via l’envoi de mercenaires.
Cette logique suppose, en creux, le maintien, voire l’instrumentalisation, d’un certain niveau d’instabilité sécuritaire. À ce titre, des révélations récentes ont mis en lumière le rôle trouble joué par l’Agence américaine pour le développement international (USAID) dans la région. Derrière son image d’acteur humanitaire, l’USAID aurait, selon plusieurs sources, servi de canal de soutien logistique et financier à des groupes armés, y compris à ''Boko Haram'', via son bureau à Abuja, au Nigeria. Ce soutien indirect n’a pas seulement été évoqué par des analystes indépendants, mais a été publiquement dénoncé par un membre du Congrès républicain Scott Perry quelques mois avant ainsi que par Donald Trump lui-même.
Le vernis humanitaire masque mal une logique de manipulation géopolitique.Ce recours au soutien indirect s’est également manifesté par l’implication de sociétés militaires privées telles que la FOG (Forward Operations Group), accusée par plusieurs organisations de soutenir et entraîner des groupes armés ou séparatistes dans le Sahel, renforçant ainsi un climat de guerre permanente qui justifie rétroactivement l’intervention étrangère.
Ce modèle d’“externalisation” de la guerre a déjà démontré ses limites – et ses dangers – en Irak et en Afghanistan, et risque de reproduire les mêmes dérives en Afrique de l’Ouest. Dans le même esprit, le transfert annoncé du commandement d’AFRICOM de Stuttgart vers la base militaire de Kénitra, au Maroc, renforce cette dynamique. Il s’agit d’un réajustement stratégique majeur, visant à rapprocher l’appareil militaire américain des zones de tension du Sahel, tout en s’affranchissant de la dépendance logistique vis-à-vis de l’Europe. Cette relocalisation, validée par le Congrès américain, vise clairement à accélérer la capacité d’intervention dans la région, au moment même où des voix s’élèvent à Washington pour dénoncer l’aggravation de la menace terroriste qui, selon certains responsables, « pourrait atteindre les côtes américaines » si rien n’est fait. Selon un rapport publié par L’Opinion, ce transfert vise à réorganiser l’architecture militaire américaine en Afrique pour répondre plus rapidement aux foyers de crise sahéliens.
Les discours récents à l’ONU, notamment celui de Dorothy Shea, représentante américaine, insistent sur l’urgence sécuritaire au Sahel et en Afrique de l’Ouest. Toutefois, cette rhétorique, centrée sur la justice et les droits humains, semble surtout destinée à restaurer une légitimité morale perdue, après des années de politique inefficace et parfois destructrice. Selon les propos tenus par Dorothy Shea lors d’un briefing au Conseil de sécurité des Nations Unies, publiés sur le site officiel de la mission américaine auprès de l’ONU, la menace terroriste au Sahel pourrait avoir des conséquences directes pour la sécurité internationale, y compris pour les États-Unis.
L’historique américain dans la région est lourd d’échecs. Selon une analyse publié récemment par ''Le diplomate'', les résultats des vingt dernières années de stratégie américaine dans la région sont loin d’être probants. Malgré des centaines de millions de dollars investis en formation, logistique et soutien militaire, le terrorisme ne recule pas.
Le même site, depuis 2002, les programmes de formation, les livraisons d’armes, et les opérations spéciales se sont multipliés. Le résultat : une recrudescence de la violence, des coups d’État soutenus par des officiers formés par les États-Unis, comme au Niger en 2023, et une instabilité chronique. Selon une analyse du projet "Costs of War", dirigé par Stephanie Savell et relayée dans un article publié par Le Diplomate, les aides militaires américaines ont souvent été détournées par des régimes autoritaires pour réprimer l’opposition ou marginaliser des groupes ethniques, exacerbant ainsi les tensions internes.
Comme le souligne Katherine Ebright, juriste au ''Brennan Center for Justice'', et selon ce même article, l’absence de contrôle démocratique sur les actions d’AFRICOM a permis la prolifération de dérives graves, sans évaluation rigoureuse de l’impact réel de ces politiques. Au lieu de construire la paix, cette approche sécuritaire autoalimentée a créé un système d’instabilité permanente, où les mêmes erreurs se répètent sous de nouveaux prétextes.
En conclusion, la perspective d’un retour américain au Sahel, fondé sur un échange implicite entre “sécurité” et “ressources”, n’est pas simplement contestable sur le plan éthique. Elle est dangereuse dans ses implications géopolitiques et sociales. Elle maintient la région dans un état de dépendance, de conflit latent, et empêche toute dynamique de souveraineté réelle ou de reconstruction institutionnelle. Ce qui est présenté comme une solution au terrorisme pourrait bien en devenir l’un des moteurs les plus puissants.
Car plus qu’un retour militaire, ce que semblent chercher les États-Unis, c’est une position durable d’influence et d’exploitation dans une région où le chaos n’est pas un obstacle, mais un levier stratégique
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