Cameroun: MARTIN PAUL SAMBA. L'AUTRE INSOUMIS FUSILLE DU 08 AOUT 1914 PAR LES ALLEMANDS :: CAMEROON
© Correspondance : David Ekambi Dibonguè | 16 Aug 2018 10:02:23 | 8556Après la signature du traité de protection germano-duala du 12 juillet 1884, les Allemands dans leur désir de coloniser le Kamerun, sentiront le besoin de former une élite noire autochtone en Allemagne, dont fera partie Martin Paul Samba. Revenu Officier de l’infanterie coloniale, il servit ses maîtres avec fidélité et intrépidité dans leur pénétration et la « pacification » de l’hinterland ; jusqu’au jour où excédé par les exactions des Allemands, Samba se rebella et s’organisa pour les combattre. Mais le temps et la traîtrise de certains compatriotes l’empêchèrent d’atteindre son but. Arrêté, il fut jugé et exécuté.
Samba de son vrai nom Mebenga M’Ebono, est né vers 1875 à Metoutou-Engong, non loin d’Ebolowa dans le clan Yémé-yéma de l’ethnie boulou. Mebenga M’Ebono, le père du futur Samba meurt aux derniers jours de la grossesse de sa femme Mengue M’Eyi, qui elle-même rendra l’âme aussitôt après sa délivrance. L’orphelin sera recueilli par son oncle Obam Ebono et il grandira auprès de l’épouse de celui-ci. Obam qui vivait de la chasse, à laquelle il initiait aussi le jeune Mebenga, allait habituellement négocier ses produits de chasse à Kribi en échange du sel, des étoffes et d’autres produits. A chaque fois, il se faisait accompagner par son neveu Mebenga. Finalement, le jeune garçon repéré pour la pertinence précoce de son esprit et sa vivacité sera sollicité par l’ami de son oncle, Issamba à Kribi.
Issamba, le frère de Veah, Chef des Batanga qui à Kribi, gère le commerce de Sonnerberger, une firme de Hambourg, veille sur les entrepôts de cette dernière, diligente les déchargements
et traite avec les autres intermédiaires pour les produits à échanger. Auprès d’Issamba, Mebenga apprendra beaucoup de choses : des subtilités du troc aux rudiments de la langue du Blanc. Avec une sagacité particulière, l’adolescent Mebenga deviendra incontournable aux côtés d’Issamba. C’est ainsi qu’un jour à Kribi, il a le toupet de dire : Güten Morgen ! Au Capitaine Kund, Commandant de la région. Ce dernier surpris par cette audace, dit au jeune noir de s’approcher et lui demanda :
- Comment t’appelles-tu ? - Samba
Mebenga M’Ebono devint à partir de ce jour, Samba. Et ensuite, il va se mettre au service du Capitaine Kund, successivement comme « boy » puis guide à travers les brousses. Le 22 octobre 1889, le Capitaine Kund sera victime d’une attaque d’apoplexie et remettra ses prérogatives au lieutenant Von Curt Morgen, à qui il conseillera de prendre Samba à son service. Avec le lieutenant Von Curt Morgen, commencera l’épisode qui transformera la vie de Samba. Car à la vie de guide, se substitua celle marquée de scènes violentes, d’attaques guerrières lors des expéditions, des installations et la « pacification » pendant la pénétration des Blancs dans l’arrière-pays. C’est dans ce nouveau contexte qu’il fit ses premières armes d’apprenti soldat auprès de Morgen, à travers le Sud-Cameroun jusqu’à Tibati, Ngaoundéré.
FORMATION EN ALLEMAGNE ET CAMPAGNES MILITAIRES
C’est dans cette atmosphère, que survient en avril 1891, la décision du Kaiser Guillaume II, de recevoir en Allemagne de jeunes noirs pour des formations, lesquels à leur retour devraient participer à la réalisation de l’unité et du développement du Kamerun. Cette demande qui devait être diligentée par le gouverneur Von Soden, était assortie d’une précision : que les fils des Chefs fassent partie du groupe. Le Chef Veah des Batanga refusa que son fils y soit intégré. Après un conseil des notables Batanga, Samba fut choisi.
En Juin 1891, Samba part pour l’Allemagne en compagnie de Morgen. Il réside à Kladow où il est confié au Pasteur Schall pour son éducation. Auprès de ce dernier, il recevra une solide instruction de base et sera baptisé sous le prénom de Martin Paul. Martin Paul Samba, sur recommandation de son protecteur Curt Morgen et avec l’accord de l’Empereur Guillaume II, entra à l’école militaire impériale après moult discriminations et obstacles que le jeune kamerunais affrontera avec de multiples actes d’adresse et de bravoure.
Il revient au Cameroun en 1894 avec Morgen, qui avait en charge, la formation de la Schutztruppe (milice de protection publique locale allemande), dont l’une des missions était la pénétration méthodique de l’intérieur du pays et l’affermissement de l’autorité Allemande au Kamerun. Au sein de la Schutztruppe, l’officier Martin Paul Samba, sera de toutes les campagnes militaires, aussi violentes que cruelles, et quelques fois pacifiques chez les Chefs de village « amis ». En plus de cette vertigineuse escalade, il y eut un fait nouveau : à son retour au pays, le Kamerun était maintenant sous la direction d’un gouverneur militaire du nom de l’intraitable Von Putkamer. A cette intensification frénétique de la volonté autoritaire de l’Allemagne d’imposer sa présence, certains villages entiers répondaient par des révoltes, ce qui entraînait plus de sang et d’interrogations même chez les noirs versatiles. Ainsi autant chez les Abo, les Bakoko, les Bassa, les Ewondo sous la conduite d’Omgba Bissogo, les
Voûté ou les Ngumba et même au pays Boulou avec NtongT Zo’olé, la pax germanica ensemençait dans le sang et se heurtait partout à des résistances héroïques.
REFUS DE L’UNIFORME ET ORGANISATION DE L’INSURRECTION
Mais après des années passées au service de cette implacable troupe, au seuil de 1900, brusquement Martin Paul Samba abandonne l’uniforme pour se consacrer au commerce. Commerçant pour la firme Randad et Stein, il s’installe successivement à Nanga-Eboko et Olama de 1902 à 1912, menant une vie fastueuse avec un commerce florissant.Néanmoins, des interrogations et des supputations ont entouré ce brusque changement. D’aucuns ont avancé qu’avec le désir effréné des Allemands de s’installer dans l’arrière-pays par tous les moyens, Samba devait être tôt ou tard confronté à la dure réalité d’affronter aussi ses frères Bulu, qui se révoltaient déjà. D’autres, par contre ont affirmé qu’avec la maturité et le temps de la griserie martiale passée, Samba se serait regardé dans le miroir, et aurait détesté ce rôle de bras armé sanguinaire des Blancs.
D’autant plus que, les Allemands pour la consolidation de leur pouvoir au Kamerun s’adonnaient avec perversité et sadisme aux exactions multiples, parfois inutiles au regard même de leurs amis noirs autochtones. Peu à peu, Samba découvre ce triste visage de ses anciens maîtres et décide de les combattre. Nous sommes en 1910. Constatant que sa résidence d’Olama ne se prête pas à une telle aventure, il se replie à Ebolowa en 1912. Continuant son entreprise commerciale pour couverture, il effectue de nombreux déplacements pour rallier d’autres Chefs et clans ethniques à sa cause et obtenir des caches d’armes et des lieux d’entraînement pour le combat à venir.
Par ailleurs à Douala, depuis 1911 les Duala sous la conduite du Roi Duala Manga Bell sont en conflit ouvert contre les Allemands au sujet de l’expropriation-ségrégation du Plateau Joss. De ce fait, l’accord sera complet entre Duala Manga Bell et Martin Paul SAMBA, qui se rencontreront à plusieurs reprises pour la coordination des opérations. L’immensité des tâches pour le soulèvement prémédité ne pouvant être couvert par les seules activités commerciales de Samba, ce dernier trouve un prétexte : la menace d’une guerre des Ewondo contre les Bulu, au mieux une possible révolte des Ewondo contre les Blancs. Ainsi les Bulu entraînés et armés seraient aux côtés des Allemands. Ce prétexte lui permet d’acquérir officiellement des armes d’Allemagne.
Mais la jalousie des compatriotes ainsi que le non-respect strict de certaines règles de la clandestinité pour une action si périlleuse, vont alerter les Autorités. Et les fouilles entreprises chez Samba et d’autres compères accusés vont les confondre pièces à conviction à l’appui : les correspondances et les factures d’armes non seulement d’Allemagne mais également des gouvernements anglais et français! Le 1er août 1914 Samba et ses collaborateurs principaux : Edandé, Madola, Assoko Nna et Mba Enam sont arrêtés et jugés. Samedi, le 08 août 1914 : Madola, Edanté Mbita et Assako sont pendus à Kribi. Le même jour à Ebolowa, Martin Paul SAMBA est fusillé.
Ainsi mourut Martin Paul Samba sous les balles de ses anciens maîtres allemands, pour avoir même tardivement, refusé la soumission et l’avilissement de son peuple.
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