PREDICATION DU DIMANCHE 28 MAI 2023  Fête de la Pentecôte
FRANCE :: RéLIGION

FRANCE :: PREDICATION DU DIMANCHE 28 MAI 2023 Fête de la Pentecôte

Textes : Actes 2, 1-11 ; 1 Corinthiens 12, 3-13 ; Jean 20, 19-23

Avant que naisse Jésus, on ne fêtait pas Noël. Ce qui semble assez logique. Par contre, avant que l’Esprit saint ne vienne sur les apôtres, on fêtait déjà Pentecôte. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, ce jour-là, une telle foule de toute race, langue, peuple et nation, se trouvait rassemblée à Jérusalem. A l’origine, Pentecôte était une fête agricole, la fête des premières moissons, et, de fait, quelle somptueuse moisson pour le Ciel les apôtres ont engrangé ce jour-là : « environ trois mille âmes » (Ac 2, 41) qui reçurent le baptême !

Mais, chez les juifs, Pentecôte commémore aussi un autre évènement. Un évènement survenu à peu près cinquante jours après la sortie d’Egypte, c’est-à-dire après Pâque. Les hébreux sont désormais au désert et ce jour-là, sur le Mont Sinaï, Dieu par l’intermédiaire de Moïse, fait à son peuple le don de la Loi : les dix commandements et l’ensemble des lois qui les accompagnent. Car il ne suffisait pas d’avoir ouvert aux hébreux les portes de la prison d’Egypte. Encore fallait-il transformer ce ramassis d’esclaves en fuite en un peuple debout, un peuple libre, le peuple de Dieu. Et c’est pourquoi Dieu lui donne une constitution ; il lui donne la Loi.

La Pentecôte est la réalisation de la promesse de Jésus faite le soir de la Cène d’envoyer l’Esprit d’auprès du Père sur les hommes. Et cela se réalise parce que Jésus siège depuis son Ascension auprès du Père dans la gloire, avec son humanité glorifiée.

Chers frères et sœurs,

Lorsqu'un penseur éminent disparaît, ses disciples pleurent la perte de ce génie, composent des éloges funèbres, érigent des monuments à la mémoire du disparu. Lorsqu'un révolté, un meneur d'hommes, est capturé et exécuté, tous ses camarades s'égaillent et disparaissent : la mort du chef provoque un irrésistible mouvement centrifuge, son programme est anéanti et la flamme de l'espoir s'éteint. Quand arriva le jour de la Pentecôte (le 50ème après Pâques), ils se trouvaient réunis tous ensemble.

« Les portes du lieu où se trouvaient les disciples étaient verrouillées par peur ».

Il n’y a pas que les petits enfants qui se réfugient dans leur chambre. Les Apôtres, eux aussi, ont fermé la porte à double tour et se sont enfermés, comme s’ils ne voulaient voir personne. Nous le savons, il y a des confinements nécessaires — aussi difficiles qu’indispensables — mais il y a toutes ces fois où nous nous enfermons intérieurement. Pas simplement pour fuir. Mais seulement pour ne pas affronter la réalité, par manque de courage ou de force…

L’Esprit de Pentecôte est ce qui vient faire éclater tous ces verrous que nous mettons pour nous protéger. Par l’effusion de l’Esprit, Dieu ouvre une brèche, il se partage, comme une langue de feu. Dieu n’a plus besoin d’intermédiaire puisque son souffle habite désormais en chacun de nous ! Dieu par son Esprit nous illumine au plus intime de nous : même dans nos zones d’ombres et nos lieux d’enfermements. Car l’Esprit est précisément cette respiration, cette sagesse qui inspire notre être profond pour que nos paroles ne soient pas du vent, pour que nos actions aient du souffle !

Comment découvrir un tel souffle dans notre propre vie ?

Regardons simplement l’expérience des disciples dans l’évangile de ce jour. Malgré leur enfermement, « Jésus était là, au milieu d’eux ». En effet, lorsque notre existence semble coincée, lorsque notre avenir est bouché et que nous ne voyons pas d’alternative, ne nous arrive-t-il pas parfois de chercher une issue ailleurs, à l’extérieur, dans un passé dépassé, un futur idéalisé, un projet irréaliste ?

Nous nous plaignons. Nous nous considérons comme victimes et nous cherchons des coupables. Or, l’Esprit de sagesse ouvre justement une brèche à l’intérieur de notre être, dans notre chambre haute, dans ce qui semble coincé et verrouillé au fond de nous. Oui, le souffle de la Pentecôte nous bouscule et s’invite, sans bruit, en nous-mêmes, pour nous dire : il y a en toi — que tu le croies ou non — les ressources d’une paix intérieure, d’une libération. Celle-ci n’est pas à attendre seulement de l’extérieur. Une paix peut se révéler en toi, si tu portes un autre regard sur ton être, si tu y discernes la présence d’un Autre.

« De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie. »

Accueillir l’Esprit de liberté en soi, c’est aussi délier nos langues, libérer la parole pour qu’elles prennent soin, qu’elles soient maternantes, qu’elles donnent vie. Vous le savez, il faut parfois une simple parole de tendresse — ou d’humour — pour assouplir ce qui est tendu, pour réconcilier ce qui semble divisé, et offrir à quelqu’un un nouvel horizon.  « Je crois en toi », « Je t’aime », « La paix soit avec toi ». La langue du soin, qui invite à la vie, qui donne la vie : voilà la langue maternelle et maternante de la pentecôte, à la portée de chacune et chacun, et qu’il nous faut cultiver chaque jour.

« Après cette parole, il leur montra ses mains et son côté. »

Nos paroles pacifiantes et maternantes peuvent aussi s’accompagner de gestes de tendresse. Une libération ne se dessine-t-elle pas lorsqu’une personne nous ouvre son cœur, son côté, ses blessures ? Lorsqu’elle nous témoigne ainsi dans l’intimité d’une relation que l’échec peut être traversé ? Ce sera toujours par nos paroles et nos gestes — non pas paternalistes, mais bien maternants — que l’Esprit de Dieu se révélera dans notre monde.

Avec de telles paroles libres, qui libèrent, et des gestes qui prennent soin, nous rendons alors enfin à Dieu la liberté d’être ce qu’il est ! Loin de notre langage parfois beaucoup trop religieux, cloisonnant le divin dans des pratiques ou des formules.

La Pentecôte est ce souffle qui fait ainsi éclater notre créativité, qui nous invite non pas à parler la difficile langue de Dieu ! Mais à le découvrir dans notre propre langue. Dans la banalité de notre quotidien. Pour découvrir cela, il nous faut quitter nos lieux trop communs, pour rencontrer le mystère de Dieu dans d’autres espaces que ceux où nous avons l’habitude de le chercher.

Bien-aimés dans le Seigneur,

Dans l'événement de la Pentecôte, plus encore qu'avant, nous sommes devenus parcelles divines à l'œuvre en notre monde.  Dorénavant, nous affirme l’apôtre Paul, nous vivons sous l'emprise de l'Esprit puisque « l'Esprit de Dieu habite en nous ».  Il y a donc du divin en tout être humain. 

Cette affirmation anthropologique est une invitation qui nous est faite pour que notre regard se transforme.  Il est vrai que dans la vie, il nous arrive de croiser des personnes avec lesquelles nous pouvons nous sentir moins en sympathie.  Nous accrochons moins, pourrions-nous dire.  C'est un fait et pourtant, elles aussi sont habités de la présence de Dieu et mérite que notre regard et notre attitude évoluent pour qu'à notre tour, nous arrivions à voir cette parcelle divine présente en chacune d'elles.  Le tout de notre être ne peut toutefois se résumer à se reconnaître comme simple résidence terrestre de notre Dieu. 

En effet, poussés par l'Esprit de vérité, par notre Défenseur, nous sommes partis à la rencontre du Fils.  Ce dernier nous propose un véritable chemin de vie.  Il nous convie à mettre nos pas dans ses propres traces et à devenir des êtres justes, c'est-à-dire des personnes ajustées à la volonté divine et qui, par ce biais, accomplissent leur destinée au cours de leur pèlerinage terrestre. Tous comme les premiers apôtres nous sommes priés de devenir, à partir des dons différents que nous avons chacune et chacun reçus, des êtres contagieux de Dieu. 

L'Esprit Saint est un esprit de feu qui embrase l'humanité entière.  Toutefois, en un jour comme celui-ci, il est utile de se rappeler que l'Esprit Saint ne peut pas se passer de nous.  Il passe par nous.  Dans l'événement de la Pentecôte, nous devenons l'Esprit de Dieu à l'œuvre dans le monde.  Nous sommes des êtres cocréationnels dans le Père, des êtres résurrectionnels dans le Fils et nous devenons des êtres actionnels dans l'Esprit.  Les fruits de l'Esprit se découvrent dans « l'actionalisation » de nos vies. « L'actionalisation » ne consiste pas à faire pour faire.  Cela va bien au-delà des actes que nous posons car ces derniers s'inscrivent à jamais dans la manière dont nous permettons à Dieu d'œuvrer parmi nous.

En nous insufflant son Esprit, Dieu nous invite à prendre en mains notre vie ; à agir là où nous sommes, puisque l’Esprit passe désormais par nous sur cette terre. L’Esprit de Dieu ne changera pas le monde. Mais il nous aide à le voir autrement, pour y découvrir la fécondité de Pâques et de l’échec traversé.

L’Esprit de Dieu réside désormais en chacune et chacun de nous. Voilà pourquoi l’Esprit n’est pas cet être qui nous parle de l’extérieur ; mais ce qui nous fait parler de l’intérieur.

L’Esprit n’est pas ce qui se fait prier, mais cette énergie qui prie en nous.

L’Esprit n’est pas ce qui agit dans ce monde, mais cette force qui nous donne d’agir.

L’Esprit n’a rien à voir avec un jugement paternaliste, mais avec une langue maternante, qui assouplit ce qui est crispé et rend droit ce qui est faussé !

Alors demandons d’être soufflés par un tel Esprit qui réside au plus intime de nous. Pour que nous devenions ces êtres inspirés et inspirant dont le monde a tant besoin !

Amen.

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