PREDICATION DU DIMANCHE 09 AVRIL 2023  Par le Rév. Dr Joël Hervé BOUDJA
FRANCE :: RéLIGION

FRANCE :: PREDICATION DU DIMANCHE 09 AVRIL 2023 Par le Rév. Dr Joël Hervé BOUDJA

Fête de Pâques

Textes : Actes 10, 34-43, 1 Corinthiens 5, 6-8 ; Matthieu 28, 1-10

" Voici le jour, l'immense jour où tout culmine ", et où nous célébrons la Pâques du Christ ; l'espérance plus forte que le désespoir, la vie plus forte que la mort. "

En cette célébration de Pâques, nous sommes invités à refaire la longue route des Alliances de Dieu avec son peuple, progressant de victoire en victoire, de lumière en lumière, il nous est proposé de recueillir à chaque étape les germes de la résurrection, les signes avant-coureurs de temps nouveaux.

Christ est ressuscité, il est vraiment ressuscité ! Voilà comment se saluait la chrétienté primitive au matin de Pâques. Réjouissons-nous, Dieu est plus fort que la mort. Comment cela se fait-il que son fils mort ait pu être ramené à la vie ? Nous ne le savons pas, nous ne le comprenons pas puisque cela dépasse nos capacités humaines. Pourtant voilà une espérance formidable offerte qui change les perspectives.

Tous nous avons déjà connu des morts, dans notre parcours. La mort d’un proche ou d’autres morts plus symboliques. L’un me dit : je suis dévasté depuis la maladie de mon fils, l’autre me confie : je suis à terre depuis mon divorce, d’autres ne voient pas comment ils pourraient se relever après tel deuil ou souci. Qui nous relèvera quand tout s’est effondré, ce à quoi nous avions cru ; une amitié, un amour, un idéal ?

Les disciples voient tout ce en quoi ils ont cru, mourir sur la croix. Le message qui les a fait tout quitter, ce message d’amour de Jésus qui pouvait changer le monde. Et puis cet homme, Jésus de Nazareth, en qui ils avaient trouvé un ami, un maitre, un appui sans faille. Et cela fait mal car tout ceci est à l’agonie sur la croix.

Dieu lui-même souffre, Dieu lui-même se meurt sur la croix. Il a envoyé son Fils unique et le monde n’en a pas voulu. Ni de son message, ni de sa personne. Le monde les a condamnés à mourir. Dieu doit faire son deuil d’une humanité qui accepterait l’amour qu’il lui donne, qui accepterait d’être sauvée.

Voilà pourquoi au matin de Pâques, tout commence nouvellement, c’est une nouvelle naissance pour Dieu et l’humanité. La perspective est nouvelle. C’est le matin de la nouvelle naissance pour moi et pour le monde. Et Dieu sait, qu’il y en a des choses à changer dans ma vie et dans le monde !

C’est un jour de crainte et de tremblement qu’évoque l’évangile selon Matthieu. D’abord il y a ce tremblement de terre dont on ne dit ni l’origine ni les conséquences. Ensuite, il y a ce tremblement de nerfs de deux femmes à qui on enjoint de ne pas avoir peur. Vous le savez bien, si vous êtes dans une situation étrange ou difficile et qu’on vous répète de ne pas avoir peur, ça vous fait peur. Mais ce n’est pas tout, il y a aussi cet être mystérieux qui, seul, fait rouler sur elle-même la pierre pesante du tombeau. Ce jour, tout respire le danger.

Mais de quoi ces femmes ont-elles peur ? Peur de la mort, peur du néant ! Ce qu’elles viennent voir au tombeau, ce n’est pas une personne, c’est un corps froid et sans vie. Nous ne pouvons pas comprendre le sens et la vérité de ce que nous célébrons ce matin si nous ne regardons pas en face la réalité hideuse de la mort. Je parle de la mort dans sa laideur, dans l’horreur qu’elle nous inspire.

Oui, nous avons peur de la mort, de son silence glacé ; nous avons peur de ne pas savoir mourir. Et la mort du juste, la mort sur la croix de l’Homme qui avait proclamé les huit béatitudes ne peut que nous enfoncer dans cette peur.

Alors finalement cette loi de la mort qui nous terrorise, nous l’acceptons malgré les progrès de la médecine qui ne fait qu’en retarder la sanction, avec tant d’ambiguïtés. Comment se rebeller contre la nature, contre la corruption de la matière, contre l’usure de notre pauvre corps de chair. Nous subissons la mort comme un esclave supporte son maître. Nous la subissons ou plutôt nous la subissions. Car il s’est passé quelque chose. Le fait de Pâques, l’événement de Pâques change tout. A l’aube, dans le cimetière, Marie de Magdala et l’autre Marie ne trouvent pas un cadavre mais rencontrent un Vivant. Parties visiter la mort, elles ont rencontré la vie. C’est cela, la grande nouvelle de ce jour de Pâques, gravons la dans nos cœurs : qui cherche le Crucifié trouve le Ressuscité.

Trois femmes près d'un tombeau, l'honneur du genre humain !

Ron, Ron, Ron, Deux mondes : ceux qui dorment et ceux qui sont debout.

Ron, Ron Pilate, avec ses petites mains bien lavées, dort à poings fermés. Hérode rêve de prophètes revenants. Caïphe ronfle un peu. Les docteurs de la Loi ont leur conscience pour eux. Les disciples font des cauchemars... Mais trois femmes sont debout pour honorer le supplicié. Elles accomplissent rituellement ces gestes d'extrême humanité que tant de femmes ont posés en fidélité à leurs morts, gestes dérisoires et impuissants mais qui disent la tendresse et la mémoire du cœur.

Elles font ce qu'il faut, jusqu'au bout. Elles n'ont jamais déserté, elles ont suivi à chaque étape le condamné sur son chemin de croix et, ce matin très tôt, les voilà de nouveau. Elles ne craignent pas d'entrer dans le caveau. Pour cela, elles ont traversé la ville, sont sorties par la porte gardée, se sont approchées du lieu d'exécution. L'inquiétude de ces femmes est simplement de pouvoir rouler la pierre d'entrée. Tout est calme jusque-là, rien ne bouge apparemment. Mais la porte est ouverte, un message les attend, une mission. C'est alors seulement que la peur les saisit. Elles tremblent soudain et s'enfuient hors d'elles-mêmes, incapables de parler. Que s'est-il passé ?

C'est incommunicable, impossible à exprimer. Le choc est trop inattendu. Elles n'ont pas de mots, pas d'images, pas de concepts, pas de références pour recevoir, situer, partager cet événement totalement nouveau qu'elles vivent brutalement.

Ouverture, absence et envoi ! La pierre roulée, pas de cadavre à honorer, un message à répéter qui renvoie vers les frontières. Pas moyen d'accomplir les gestes prévus. Le message envoie ailleurs. L'événement, en sa source, n'est pas une consolation, encore moins une solution. Il est un vide redoublé : l'absence de vie dans le corps et finalement l'absence de corps. Après la croix, un immense point d'interrogation. Mais c'est un excès de vie. Celui que l'on cherche dedans, est annoncé dehors, à l'horizon, en Galilée, au « carrefour des nations », au cœur de la mondialisation ! Par deux fois, arrive cette précision, Jésus ressuscité vous attend en Galilée, pourquoi ? La Galilée c’est le lieu d’origine des disciples, c’est l’endroit de leur quotidien ; là où ils pêchaient, là où ils réparaient leurs filets, là où se trouvent leurs familles. C’est là que vous le verrez, vivant.

Notre récit est d'une immense discrétion. « Vous cherchez le Crucifié ? Il est Ressuscité ! » « Il n'est pas ici où on l'a mis ». Il n'est pas dans le tombeau, ni dans les concepts des théologiens, ni dans les livres de liturgie, il n'est plus où on l'a mis ! Il est vivant, en liberté ! Alors que faites-vous avec moi ce matin ? Nous rejoignons, par la foi, trois jeunes femmes essoufflées, le cœur battant, face à un tombeau ouvert.

Il y a là un respect très curieux du sommeil de Pilate, des hésitations d'Hérode, du décalage des grands prêtres et des jeux stériles des docteurs de la Loi. C'est leur affaire s'ils se prennent au sérieux ! Le pardon est offert gratuitement, en vrac et sans publicité : comprenne qui pourra ! Le reçoive qui voudra, en silencieuse contagion ! « Moi je vous dis : Aimez vos ennemis ! ». Qu'ils aient au moins le monde qu'ils ont choisi ! Leur histoire poursuit son cours, la nôtre aussi mais sur une autre voie, une croix nous a aiguillés ailleurs, radicalement. Dans la création du Père, il y a beaucoup de place et des rythmes variés. Personne n'est obligé de vivre à tombeau ouvert !

Magistrale leçon d'altérité, d'acceptation des différences et même du désaccord ! Comment Dieu pourrait-il créer, sans apprécier le différent, faire surgir du non-dieu, et une liberté qui puisse dérailler, presque inévitablement ? Avec une patience infinie et une brûlante passion, Dieu attend, des siècles, des siècles de siècles, que mûrisse le monde, que lève la vie, que s'éveille la conscience, que l'on commence à parler, à partager, à pardonner, à devenir créateurs, re-créateurs, dieux enfin, comme Lui, avec Lui et en Lui, en vérité !

Ce jour est le premier jour d'une nouvelle création. Au lever du soleil, allez vous promener dans le jardin du monde neuf ! Regardez les arbres en pleine sève et les petits canetons des parcs. Plus loin, sur les chemins de ceux que l'espoir a déçus, que l'amour a blessés, qu'une religion a trahis, glissez-vous dans les conversations. Dans les pubs, si vous êtes invités, acceptez d'entrer. Le Ressuscité y est déjà, il vous y attend.

La foi au Christ ressuscité élargit d’une façon incroyable les perspectives de l’humanité. Quand nous sommes en butte à nos étroitesses, nous comprenons qu’elles ne sont que passagères. Cette certitude doit dilater notre cœur. Si nous sommes amenés à communier aux souffrances du Christ, c’est pour pouvoir communier à la joie de la Résurrection. Comment ne pas vivre avec une espérance invincible ?

Oui, frères et sœurs, pour nous aussi, il y aura un matin, dans le Jardin de la Résurrection, où le Christ viendra à notre rencontre et nous appellera par notre nom et nous disant, comme à Marie de Magdala et à l’autre Marie : « Je vous salue !» Christ est ressuscité ! Alléluia !

Joyeuses Pâques à chacune et chacun de vous ! Amen.

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