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© Correspondance : Palabre Intellectuelle
- 23 Jan 2023 12:46:52
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AFRIQUE :: Entre la cloche et le tympan, il y a la poésie de Merhoye Laoumaye :: AFRICA
Qu'est-ce qui fait le lien entre la cloche et le tympan ? Le son, assurément. Il nous résonne dans l'ouïe, kong-kong-kong... comme le kou-koula d'un tam-tam messager. Dans ce florilège (La cloche et le tympan), Merhoye Laoumaye est le poète-messager qui secoue la cloche. Sa cloche sonne d'un ton de fanfare martiale, elle nous secoue, nous gourmande, nous rappelle à l'éveil des consciences comme des paroles prémonitoires d'un texte ancien, ou d'un poème séculaire bien connu des amateurs du genre : « N'envoie jamais demander pour qui sonne le glas : il sonne pour toi. »
Le glas de Merhoye Laoumaye sonne pour toi, si tu te reconnais politique, diplomate hypocrite qui incite les autres à faire la guerre
« Afin de [te] hisser sournoisement
Sur le piédestal du guerrier de l'ombre
Puis brandir dans la main droite le flambeau de la paix
Et vendre de la main gauche les armes les plus redoutables. »
C'est écrit et gravé dans La lumière noire du temple des chacals (tel est l'intitulé de la première partie du recueil), c'est écrit que la guerre est cruelle ; la paix, le bien le plus précieux sur la terre des hommes. Pensif et amer de regret, le poète s'interroge sur l'absurdité des prétextes qui alimentent les atrocités humaines. Pourquoi ?... « Prétexte... ah! quel beau piège à rats! » Puis, de pensif amer, le poète devient doux rêveur d'une autre Afrique, et sort vainqueur du temple des chacals. C'est ainsi qu'il prophétise sa vision optimiste, comme un King :
« Je rêve d'une Afrique sans spectre de ruine,
Sans murmure ni querelle vaine des frères [...]
Afrique tu deviendras cette terre nouvelle-là ! »
Dans les deux dernières parties de La cloche et le tympan (Agonie, Les soupirs des ressuscités), le poète observe méditatif les choses de la Nature, mais aussi nous ouvre davantage son cœur et laisse libre cours à ses émotions. Libre cours... comme dans « Homme libre, toujours tu chériras la mère ! » (Je vous salue Baudelaire).
Maman ! si tu pouvais m'entendre crier...
Mère, reviens essuyer mes larmes ! [...]
Un jour peut-être, je te reverrai parmi les anges.
L'amour du poète Merhoye Laoumaye transcende les nues lorsqu'il s'agit de célébrer la femme qui l'a porté dans son sein ; lorsqu'il s'agit de célébrer la femme, tout court. Comme tout bon poète qui se respecte, Merhoye Laoumaye est un sentimental romantique doublé d'un ardent défenseur de la cause féminine.
Parlant du style, La cloche et le tympan a un pied dans la régularité métrique classique et un autre dans le vers libre des poètes dits modernes. Le vocabulaire est distingué, avec de temps à autre un terme scientifique qui vient nous rappeler de quel arbre est tombé le fruit, l'auteur étant de ces hommes consciencieux qui s'évertuent à comprendre le fonctionnement naturel des phénomènes pour rendre la vie meilleure. Pour ce qui est de la musique, ou de la musicalité, Merhoye Laoumaye aime à jouer de l'anaphore. Le rythme est bon, assez pour une danse avec les mots. Et voici, la cloche sonne dans le tympan comme une invitation. Elle sonne pour toi…
palabresintellectuelles@gmail.com
La cloche et le tympan de Merhoye Laoumaye était en lice à l'édition 2016 des Grands Prix des Associations Littéraires (GPAL).