ARRIVE EN FRANCE POUR ETUDIER, SON REVE SE TRANSFORME  EN CAUCHEMAR
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ARRIVE EN FRANCE POUR ETUDIER, SON REVE SE TRANSFORME EN CAUCHEMAR

Honoré, un jeune Camerounais d’une vingtaine d’années arrive en France en septembre dernier pour suivre des études de sciences à l’université de Lorraine. Mais la bureaucratie à la française va vite mettre à mal son projet. Aujourd’hui seul, sans argent, sans possibilité d’étudier, Honoré est désespéré. Récit de l’odyssée administrative d’un étudiant africain.

Roissy,  aéroport Charles de Gaulle  le 19 septembre dernier.  En descendant de son avion, en provenance  de Yaoundé Honoré, le Camerounais,  est encore plein d’espoir. Il est sur le point de réaliser  le plus grand rêve de sa vie : étudier en France.

Mais à peine  débarque-t-il  à Nancy que ses illusions  s’envolent.  Entre les difficultés  pour s’inscrire  à la fac, les déboires avec l’administration  française  et les soucis pour joindre les deux bouts, son rêve se transforme vite en cauchemar.  « «J’étais très optimiste. Je n’avais jamais imaginé que les choses pouvaient s’effondrer aussi vite », déclare-t-il.

Les problèmes  du jeune homme  commencent  le 20 septembre 2021, jour de sa rentrée universitaire.  

L’université  de Lorraine  vient  d’accepter d’appliquer  l’augmentation  des frais de scolarité  pour les étudiants  extracommunautaires  soient 2770 euros au lieu de 170 euros l’année  précédente.

Alors qu’il misait  sur la possibilité  de payer en trois tranches, son responsable  de formation  l’appelle  et lui dit qu’il doit payer entièrement  la scolarité  ou trouver une alternance  dans les plus brefs délais pour pouvoir s’inscrire.  « Je me trouvais à ce moment dans une situation très compliquée. C’était impossible pour moi d’avoir les 2770 euros et trouver une alternance dès ma première année en France, c’était une mission difficile voire impossible », déclare-t-il.  

Mais optimiste,  le jeune homme  se rend le lendemain   au service de la scolarité  de sa faculté  en compagnie  d’un autre camarade pour essayer de négocier.  Mais là encore rien ne se passe comme il l’imaginait.  La dame qui le reçoit ne lui laisse  même pas le temps de finir  d’exposer son problème  et se montre très désagréable  à son égard : « Elle m’a agressé verbalement. Elle a crié sur moi. J’étais avec un ami.

Elle m’a humilié  », raconte Honoré encore marqué par la violence  de la scène. « J’ai pris un coup. Depuis, je n’ai plus jamais mis mes pieds à la scolarité » ajoute-t-il

Une galère pour une autre.

Honoré commence   malgré  tout, les cours avec ses camarades.

Mais pour  s’inscrire,  il devait pouvoir  trouver rapidement  une alternance.  Il se lance dans une course contre la montre. L’étudiant  en agronomie  générale  envoie  son CV aux propriétaires  de ferme qu’il trouve sur internet.  Mais les retours défavorables  se succèdent. Et à chaque fois son espoir de pouvoir régler sa situation  en prend un coup.

Une bouffée d’air plus qu’éphémère.

Alors qu’il commence  à désespérer, au bout d’un mois et demi de recherches infructueuses,  il reçoit une réponse favorable.  Un fermier  de Landroff,  une commune  rurale  située à  l’est de la Moselle, accepte de le prendre.

Mais à 52 km de Nancy, mal desservi par les transports en commun,  les conditions  sont trop contraignantes  et peu avantageuses  pour le jeune étudiant. «  Je ne pouvais gagner que 60 % du SMIC au lieu des 100 % et je devais travailler le week-end pour compenser mon logement ‘’, affirme-t-il  avant d’ajouter : « j’ai accepté parce que je n’avais pas le choix. » Malgré tout, c’est une véritable  bouffée  d’air pour le jeune homme.  

Avec ce travail,  il peut  enfin  s’inscrire  dans sa faculté  et pourra renouveler son titre de séjour l’année  prochaine.  Honoré déclare : « J’étais de plus en plus  détendu en cours. Je pensais être au bout de mes peines car il ne me restait qu’à signer mon contrat d’apprentissage  pour régler ma situation auprès de la scolarité »

Quand la sécurité sociale vient tout plomber.

C’est justement  au niveau  de la signature  de son contrat que les soucis reviennent.  Il devait fournir  à son futur  employeur  son numéro  de sécurité sociale  qu’il n’avait  pas encore. A la suite de négociations,  sa faculté  lui délivre  le certificat  de scolarité  afin qu’il puisse faire  sa demande de numéro  de sécurité  sociale. «  J’ai obtenu une inscription  provisoire, avec un délai de deux semaines pour fournir  mon contrat d’apprentissage à la scolarité », se souvient- il.

Un peu soulagé,  le même jour, Honoré fait sa demande, en espérant un retour rapide de l’administration  française.  «  Je croyais qu’une  semaine après, je pouvais avoir mon numéro de sécurité sociale provisoire. J’ai attendu une semaine, puis deux, en vain. » L’attente  devient  longue  et pesante. «  Je vérifiais mon compte au moins trois fois par jour », affirme-t- il.  L’angoisse  de perdre cette opportunité  le ronge terriblement.  Il contacte son entreprise  pour essayer de négocier  la possibilité  de signer  le contrat d’apprentissage  et de commencer  à travailler  sans le numéro  de sécurité  sociale.

Mais son employeur  reste inflexible  et refuse catégoriquement. Plusieurs  jours se succèdent et toujours  aucune  attestation de sécurité  sociale.  Alors le jeune étudiant,  se rend au siège régional  de la caisse primaire  de l’assurance  maladie  pour essayer de faire évoluer  son dossier. La personne qui le reçoit lui donne le numéro  de téléphone  de l’organisme  à contacter.  « Mon appel est resté en attente au moins pendant 45 minutes.

Au bout du compte, quelqu’un  a décroché et quand j’ai expliqué ma situation, il m’a dit que mon dossier allait être traité dans les meilleurs délais », déclare-t-il.  Mais il attend encore un mois environ  sans obtenir  de retour.

Jamais trois sans quatre: le coup de grâce qui vient au mauvais moment.

Honoré se retrouve  confronté  à la situation  qu’il faisait  tout pour éviter  jusque-là.  Le 15 novembre  2021, pratiquement  deux mois après sa rentrée universitaire,  il reçut un mail de son responsable  de formation.  

Ce dernier lui explique  que l’entreprise  qui avait accepté de le prendre, lassée d’attendre avait fini par embaucher  une autre personne à sa place. Et par conséquent,  dans le même temps, il n’était  plus autorisé à suivre  les cours. Pour le jeune homme,  figé  devant son écran, le coup est terrible,  difficile  à encaisser.  « Je ne pouvais plus rien faire. Je suis resté là, comme ça », se souvient  Honoré.

En plus de perdre son contrat, il est  renvoyé de sa faculté.  Il se retrouve  dans l’impasse,  complètement  désespéré. Mais ironie du sort, le jour suivant  cette terrible  nouvelle,  il vérifie  sans intérêt  son compte: ‘’ On m’a arrêté à la fac aujourd’hui,  le lendemain mon numéro  de sécurité est sorti.’’ Mais  c’était maintenant  trop tard. Le train de la sécurité sociale  avait eu un jour de retard, un jour crucial qui avait déjà condamné  Honoré : « Je m’étais dit que c’était fini pour moi. Il fallait que je retourne  dans mon pays » affirme-t- il  en pensant qu’il n’avait  plus aucune  raison de rester en France sans aucun statut et sans argent. Actuellement,  le jeune Camerounais est toujours  sur le territoire  français  et espère encore pouvoir trouver  une solution  à son problème.  

Plus autorisé  à suivre  les cours, il passe désormais  ses jours, enfermé  dans sa chambre. «  Je suis triste. Je ne sors même plus. Je suis désespéré » déclare-t-il.

BARDOT Prisca,stagiaire

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