Massacre des enfants à Kumba: L'ONG Mandela Center International exige une enquête internationale
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Mandela Center International, ONG internationale à Statut Consultatif Spécial auprès des Nations Unies, porte :

A l’attention de la communauté nationale et internationale :

1. Qu’en date du 24 octobre 2020, à 10h52mn, huit hommes armés de fusils de guerre, circulant à bord de trois motocyclettes non identifiées, ont fait irruption au sein d’un établissement scolaire, Mother Francisca International Bilingual Academy (MOFRIBA), situé à Bamiléké Street Fiango, appartenant à dame Judith FOBINDIA, dans l’Arrondissement de Kumba 2, Département de la Mémé, Région du Sud-Ouest ;

2. Que, sans foi ni loi, ces hommes armés ont ouvert le feu sur des élèves en quête du savoir, un droit fondamental de l’homme;

3. Que le lourd bilan de cette attaque d’une horreur insoutenable et d’une barbarie inqualifiable fait état de sept (07) enfants tués, six (06) filles et un (01) garçon, et treize (13) blessés, soit dix (10) filles et trois (03) garçons, dont sept (07) cas toujours dans un état critique, tous âgés entre neuf (09) et douze (12) ans ;
4. Que le Ministre camerounais de la Communication, porte-parole du Gouvernement, René Emmanuel SADI, au cours d’un point de presse à Yaoundé le 25 octobre, au lendemain du drame, a attribué ces attaques à des bandes armées terroristes sécessionnistes, en affirmant que le complexe scolaire privé «Mother Francisca International Bilingual Academy » n’a lancé ses activités qu’en ce début d’année scolaire 2020/2021, à l’insu des autorités administratives compétentes, et n’a pu bénéficier des mêmes mesures de protection que d’autres établissements scolaires du Département de la Mémé;

5. Que ces déclarations du gouvernement camerounais sont mensongères et dénouées de tout fondement surtout qu’aucune enquête n’a été diligentée pour identifier les auteurs et déterminer les circonstances de l’attaque ;

6. Que selon le porte-parole du Gouvernement, le Ministre Délégué à la Présidence, Chargé de la Défense, Joseph BETI ASSOMO, « a été instruit, en liaison avec les autres services concernés, de diligenter une enquête afin de déterminer les circonstances exactes de cette attaque, et de rechercher activement les coupables, afin qu’ils répondent de leurs actes devant la justice » ;

7. Que l’ensemble de la société civile camerounaise dont la quasi-totalité des organisations de défense des droits de l’homme et de la classe politique ont condamné, à l’unanimité, cette énième attaque barbare et injustifiée contre les enfants innocents dans les régions du Nord-Ouest et Sud-Ouest ;

8. Que le Secrétaire Général de l’Organisation des Nations unies, dans une déclaration du 25 octobre 2020, a affirmé que «ces attaques contre les structures scolaires et éducatives sont une violation grave des droits des enfants » en exhortant fortement les parties à répondre positivement à son appel au cessez-le feu et « la disponibilité des Nations unies à soutenir un processus de dialogue inclusif menant à une sortie de crise dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest Cameroun » ;

9. Que ces tueries interviennent après les massacres du 14 février 2020 de 35 femmes et enfants dans le village NGARBUH 3, Arrondissement de NDU, Département de Ndonga-Mantum, dans la région du Nord-Ouest du Cameroun et attribués clairement à l’armée camerounaise;

10. Que Mandela Center International est en mesure d’affirmer que plusieurs bandes armées, les groupes armés séparatistes et les milices progouvernementales pullulent et opèrent, dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest depuis le début de la guerre en 2016 et se livrent, en toute impunité, à de nombreuses exactions / crimes sur les populations civiles ;

11. Que depuis le début de la crise anglophone en octobre 2016, aucun rapport d’enquête n'a été rendu public en dehors de celui sur le massacre de Ngarbuh 3 fortement contesté par les organisations de défense des droits de l’homme et aucun élément des forces de défense et de sécurité camerounaises n'a été poursuivi ou sanctionné malgré les multiples crimes de guerre recensés;

12. Qu’il s'agit de violations graves des droits de l'homme au sens de la Déclaration universelle des droits de l'homme (DUDH) de 1948, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) de 1966, de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (CADHP) de 1981, de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (CAT) du 10 décembre 1984, toutes ratifiées par le Cameroun;
13. Que les droits des enfants sont les droits les plus protégés au monde notamment à travers la Convention Internationale relative aux Droits de l’Enfant (CIDE) du
20 novembre 1989 et ratifiée par le Cameroun le 11 janvier 1993, la Charte Africaine des Droits et du Bien-être de l’Enfant ( CADBE) de juillet 1990 et ratifiée par le Cameroun le 05 septembre 1996, les dispositions de la Loi N° 2016/007 du 12 juillet 2016 portant Code pénal camerounais; tout comme la quasi-totalité des instruments juridiques internationaux consacrés à l’enfant et comme l’affirmait le Chef de l’État camerounais, Paul BIYA, au cours de la Session extraordinaire de l’ONU consacrée aux enfants en 2002, « le Cameroun a ratifié la quasi-totalité des instruments juridiques internationaux consacrés à l’enfant »;

14. Que ces faits sont clairement constitutifs de crimes de guerre (meurtres, tortures, attaques contre les populations civiles et notamment les pillages et les destructions des biens, etc…) consignés dans la Convention de Genève, du Statut de Rome, l’acte fondateur de la Cour Pénale Internationale en son article 8 ;
15. Que selon le droit international des droits de l'homme, l'État du Cameroun a l'obligation absolue de respecter et de faire respecter le droit à la vie (DUDH, PIDCP, CADHP …) ;

16. Que compte tenu de ses engagements internationaux et selon le droit international des droits de l’homme, le Gouvernement camerounais a l'obligation absolue respecter et de faire respecter le droit à la vie, d'empêcher l'exécution extrajudiciaire de civils, y compris de criminels présumés, que ce soit par la police ou d'autres forces de sécurité, de faire appel à ses forces de sécurité et de défense pour faire en sorte que les populations civiles vivant dans les régions anglophones ne soient pas assassinées par des agents non étatiques tels que des groupes armés sécessionnistes ou les milices progouvernementales, et doit impérativement ouvrir une enquête sur les responsables des exécutions extrajudiciaires et les traduire en justice ;

17. Qu’outre les obligations découlant du droit international des droits de l’homme, les conflits qui ont lieu tant au Nord-Ouest qu’au Sud-Ouest du Cameroun sont des conflits armés non internationaux (CANI) auxquels s’applique totalement le Droit International Humanitaire (DIH) ou droit de la guerre dont toutes les parties (l’État et les groupes armés séparatistes) sont liées par ce dispositif juridique commun aux quatre Conventions de Genève de 1949 et les deux Protocoles additionnels de 1977 relatifs à la protection des victimes des conflits armés non internationaux (Protocole additionnel II) ;
18. Tous les chefs militaires ou chefs de milices impliqués dans ces exactions doivent répondre à la lumière de plusieurs jurisprudences qui rendent pénalement responsable des délits "commis par des subordonnés placés sous son autorité et son contrôle effectifs, lorsqu'il n'a pas exercé le contrôle qui convenait à ces subordonnés en les cas où: (i) le supérieur savait que ces subordonnés commettaient ou étaient sur le point de commettre ces crimes ou a délibérément négligé de prendre en compte des informations qui les indiquaient clairement; (ii) ces crimes étaient liés à des activités sous sa responsabilité et son contrôle effectifs, et (iii) le supérieur n'a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables en son pouvoir pour empêcher ou punir leur exécution ou pour saisir les autorités compétentes pour enquête et poursuites ", renforcé par l'article 28 de la Cour pénale internationale sur la responsabilité des militaires et d'autres dirigeants ;

19. Que le gouvernement camerounais doit respecter ses engagements internationaux, y compris la Convention de non-applicabilité des limitations statutaires des crimes de guerre ; les Crimes contre l'humanité du 16 octobre 1972 ; la 3e Convention de Genève de 1987 ; la Convention des Nations unies contre la torture, les traitements cruels, inhumains ou dégradants de 1984, la Convention des nations contre les génocides, dans ce conflit armé non international ;

20. Que plusieurs cas de meurtres, d’assassinats, d’exécutions extrajudiciaires, sommaires, détention arbitraire, torture, traitements ou punitions cruels, inhumains et dégradants, violence sexuelle, disparition forcée, déplacement forcé ou violations massives et graves contre la communauté anglophone (environ 20%) tant par les forces armées gouvernementales que par les groupes armés non étatiques ont été documentés par Mandela Center International;

21. Que selon plusieurs sources concordantes, des agents étatiques et non étatiques ont pris part à ces tueries sauvages de Kumba 2 et seule une commission d'enquête internationale indépendante sera en mesure de clarifier les circonstances et de définir les responsabilités des uns et des autres, en très peu de temps ;

22. Que tous les appels au dialogue inclusif entre les deux parties belligérantes dont ceux du Secrétaire Général Adjoint de l’Organisation des Nations Unies (ONU), depuis la rencontre du 9 Août 2017 avec la délégation conduite par le directeur de cabinet du Premier ministre camerounais, Paul GHOGOMU, la Secrétaire Générale du Commonwealth, Patricia Scotland, le 19 décembre 2017 au cours d’un dîner officiel avec Paul Biya, en passant par les négociations de Genève selon le communiqué rendu public le 27 juin 2019 par le Département fédéral des Affaires Étrangères Suisse (DFAE), se sont tous heurtés à la sourde oreille du régime de Yaoundé.

23. Que la responsabilité de tous ces faits est ainsi CLAIREMENT attribuée à l’Etat camerounais en vertu du droit international, au terme des articles 4 et suivants d’une résolution 56/83 de l’Assemblée générale en date du 12 décembre 2001 sur la responsabilité de l’Etat pour FAIT INTERNATIONALEMENT ILLICITE.

Eu égard à tout ce qui précède, Mandela Center International:

1.Condamne, avec la toute dernière énergie, ces attaques d’une rare barbarie sur les enfants à Kumba 2 et cette atteinte grave contre les droits à la vie et à l’éducation ;

2.Exige, avec une rare fermeté, une commission d'enquête internationale indépendante (CEII) conforme, en tout point de vue, aux Lignes Directrices concernant les Rapports et Missions Internationales d'enquête sur les Droits de L'homme, notamment les Lignes Directrices De Lund-Londres avec la participation inévitable des acteurs des droits de l'homme afin de clarifier toutes les circonstances et d'établir des responsabilités dans un délai très court;

3.Demande instamment, avec insistance, de traduire en justice tous les acteurs de la chaîne qui ont abouti au massacre des enfants à Kumba 2 à la lumière de plusieurs jurisprudences et de l'article 28 de la Cour pénale internationale sur la responsabilité des militaires et d'autres dirigeants ;

4. Rappelle clairement aux parties en conflit qu’elles doivent se conformer strictement au Droit International Humanitaire (DIH) ou droit de la guerre;

5. Rappelle, avec fermeté, aux autorités camerounaises que la fin de la guerre dans les régions anglophones passe OBLIGATOIREMENT par un dialogue inclusif, franc et sincère entre les belligérants ;

6. Demande, avec insistance au gouvernement de fournir une indemnisation appropriée et adéquate à toutes les victimes ;

7. Demande au Conseil de sécurité, à l'Assemblée générale des Nations unies, au Conseil des droits de l'homme des Nations unies et aux organisations de défense des droits de l'homme de maintenir la pression sur les autorités camerounaises afin de mettre fin à l'impunité des acteurs de violations des droits de l'homme;

8. Prie instamment la communauté internationale d'intervenir avec effet immédiat pour persuader le gouvernement camerounais d'engager un dialogue inclusif avec les chefs des groupes d'opposition armés par le biais de médiateurs internationaux afin de mettre un terme à la crise en cours qui a causé des souffrances aigues à la population dans lesdites régions depuis leur escalade en fin 2016.


Pour toute information complémentaire, bien vouloir nous contacter aux adresses suivantes :

Email : mandelacenterinternational@yahoo.com  ou comptoirasssitancejudiciaire@gmail.com  ou mandelacenter2@gmail.com  
Tél. : (00237) 679 79 81 80 / 678 912 205 / 699 25 87 77

Fait à Yaoundé, le 28 Octobre 2020

Le Secrétaire Exécutif Permanent
Jean Claude FOGNO

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