Quand le Pr Jean Emmanuel Pondi appelle à une éducation africaine contre une éducation en Afrique.
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Le 30 octobre 2019, l’amphi 300 a fait le plein d’œuf pour servir de cadre à un banquet intellectuel. L’universitaire camerounais Jean Emmanuel Pondi y a donné une conférence sur « Le système éducatif en Afrique, est-il de nature à porter notre continent vers le développement ? ».

C’est aux environs de 15h45 que le directeur de l’école normale supérieure du Cameroun, le professeur Barnabé Mbala Ze introduit le conférencier. Il s’est d’abord acquitté du devoir de signifier que cette grande conférence, parmi tant d’autres, initiée sous sa houlette en application des directives des institutions de la République du Cameroun faire de l’université un lieu de production des savoirs et des propositions au développement.

À la prise de parole du conférencier du jour, le professeur Pondi tient à signaler qu’il n’est pas un spécialiste de l’éducation et recommande de ne pas le considérer comme tel. Seulement, sa riche expérience d’enseignant depuis 33 ans, son désir de connaître et son sens critique guidé par l’interdisciplinarité l’ont conduit à s’interroger sur l’éducation en Afrique.

Comme dans un cours à l’amphi, le chercheur fait d’abord une présentation sur PowerPoint des trois grandes lignes devant conduire son propos : Un mini tour du monde des systèmes éducatifs, Les caractéristiques majeures du système éducatif en Afrique et Comment passer d’un système éducatif en Afrique à un système africain ?

Au premier point, les systèmes éducatifs des pays comme le Japon, la France, le Royaume uni, la Chine sont passés au peigne fin. Le trait distinctif étant le fait que ceux-ci sont encrés dans la culture du terroir dans la langue et la civilisation. Pour le cas des deux pays d’Asie, il a été fait mention de leur propension à la modernité technologique mais en restant fondé sur son substrat culturel propre. Les Anglais ont pensé l’école surtout pour servir la révolution industrielle, or la France elle a eu une tradition de précepteurs pour les privilégiés au Moyen Age avant de se porter vers la création du lycée en 1802 avec Napoléon.

Au sujet des caractéristiques majeurs de l’éducation en Afrique, Jean Emmanuel Pondi commence par projeter une carte géographique des infrastructures disponibles sur le continent en termes de pénétration au kilomètre carré. Le Maghreb et l’Afrique australe se taillent la part du lion en termes de bons résultats, par contre l’Afrique centrale et de l’Ouest peine encore à

se faire des marques. Il en est de même du Soudan. Des pays comme le Niger, la Guinée Conackry ont encore beaucoup de chemin à faire.

Avant la conquête coloniale, l’Afrique ne disposait pas d’école sous la forme actuelle. Mais un type d’éducation y était appliqué. Toute personne adulte dans la citée était un enseignant pour les jeunes. Les savoirs faire, savoirs être et savoirs leur sont distillés à tout moment, partout et par tout le monde jusqu’à la mort.

Les années 1880 ont marqué le début de la césure entre l’Africain authentique et lui-même. D’où la personnalité duale de l’Africain actuel. Ceci dut aux poussées impérialistes dont on connait le funèbre dessein sur le destin de l’Afrique. On a assisté à un processus de lessivage de la mémoire de l’Africain pour lui dire qu’il ne vaut rien.

Les conséquences sont que désormais, les critères d’évaluation de l’éducation en Afrique ne tiennent pas compte de la culture africaine. Aussi, on a introduit d’autres cultures sportives qu’on a imposé aux jeunes Africains au détriment des sports qui lui sont propres : lutte traditionnelle, songho,…

Au troisième point, au moment de donner les voies pour une éducation non pas en Afrique mais d’une éducation africaine, Pondi recommande de mettre un accent particulier sur la connaissance de l’Histoire africaine. Cette histoire qui est disponible en plusieurs volumes en accès gratuit sur Internet, un travail piloté sous l’égide de l’UNESCO : Histoire générale de l’Afrique.

Il entend par éducation africaine celle qui a pour socle les savoirs, savoirs faire et savoirs être propres à l’Afrique elle-même. Une connaissance de la philosophie africaine devant être mise en exergue pour donner une âme africaine à l’Africain. Il signale qu’il ne s’agit pas de chercher à se forger sur des traditions obsolètes et impropres à la vie moderne et démocratique.

Il s’est félicité de l’existence des filières comme Langues et cultures camerounaises, médecine traditionnelle à l’université de Yaoundé I. Il pense que c’est un début de solution. Dans cette quête de nous-mêmes, un accent doit être mis sur la vulgarisation des leaders africains et panafricains comme Sankara.

Il conseille de lire certains travaux des auteurs comme Cheick Anta Diop, Ngugi Wa Thiongo, Augustin Simo Djom et lui-même.

La communication a été suivie d’une séance très houleuse et dense de questions réponses qui a permis à l’exégète de mettre un point d’honneur sur l’existence des contingences endogènes et exogènes à l’avènement d’une éducation africaine.

Compte rendu de conférence de Gaétan Guetchuechi, enseignant de français et chercheur en littérature et civilisations africaines.

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